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Le salut du corbeau

Le salut du corbeau

Titel: Le salut du corbeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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que tu me veux, petit ? demanda-t-elle. Ne viens pas me dire qu’il n’y en a pas une en bas qui ferait ton affaire. Un beau gars fringant comme toi !
    Tout à coup, elle s’en voulut de s’être ainsi vieillie avant l’âge.
    — Moi, tu sais, j’aime les beaux garçons, mais je suis plus bonne à grand-chose, maintenant. J’ai le foie malade. Tu vois, on m’a pour ainsi dire expulsée, poussée dans un coin de la maison comme une guenille défraîchie qui a fait son temps. Ah, si j’étais plus jeune, je te dis pas… Au fait, la patronne m’a bien parlé de deux visiteurs. Où est l’autre ?
    — Euh, balbutia l’Écossais.
    Elle ouvrit davantage sa porte. Une grande main se plaqua contre le battant ouvert, juste au-dessus de sa tête, et le maintint fermement contre le mur. Par son geste, l’homme à qui appartenait cette main se dévoila et il fut impossible à la putain de refermer sa porte.
    — Il est là, dit Louis gentiment.
    Il repoussa Sam un peu et entra dans la chambre en penchant la tête. La femme recula. Son teint jaunâtre vira au gris.
    — Maître, oh… veuillez me pardonner… si j’avais su… comprenez bien que je me serais arrangée un peu.
    — C’est sans importance, dit Louis, qui nota le ton poli sans toutefois le lui laisser voir.
    Il se tourna vers Sam qui était demeuré sur le seuil.
    — Entre. Et ferme la porte.
    L’Écossais obéit. Le regard froid et scrutateur du géant examina dédaigneusement son hôtesse de la tête aux pieds. Les yeux de Desdémone brillèrent de rage contenue.
    — Bon, m’as-tu bien regardée ? Es-tu satisfait de ma déchéance ?
    Louis prit le temps de déposer son sac dans un coin de la chambre et d’en dénouer l’ouverture. Il dit, d’un ton détaché :
    — Ouais. Le temps n’a certes pas arrangé les choses, hein ? Ça se détériore. On croirait voir une vieille carne. Tu as le sang tourné. Ça t’a rendue si ridée et si jaune que même un Escot* ivre ne voudrait pas de toi.
    — Eh ! Oh ! Attention à ce que vous dites, bourrel*, dit Sam.
    — Salaud ! Tout ça, c’est de ta faute, dit Desdémone à Louis.
    — Tut-tut, pas de gros mots.
    — Et d’abord, qui c’est, au juste, ce rouquin-là ? Le roi des mouches a amené son assistant ?
    — Eh ! Oh ! protesta Sam.
    — Laisse, Aitken.
    Il précisa à Desdémone :
    — C’est un vieil ami de ma femme. Je l’ai emmené pour lui donner l’occasion de se distraire un peu. Bien…
    Il se pencha pour fouiller dans sa besace et dit :
    — Ta bienfaitrice m’a écrit. Ce n’est pas la grande forme, à ce qu’il paraît.
    — Non, et tu en connais la raison aussi bien que moi. Bertine se fait-elle donc du souci au point de s’arranger pour que tu te pointes ici avec tes savants remèdes ?
    — Des remèdes ? Oui, si on veut.
    — Je me méfie de tes remèdes. Qu’est-ce que c’est que ça ?
    Il avait extrait quelque chose de sa besace et le présenta à la femme. À première vue, Sam crut qu’il s’agissait d’un objet décoratif. Louis tenait-il donc à cette prostituée au point de lui offrir un présent ? Qui donc était-elle ? Une amante ? Voilà qui pouvait tout changer. Mais pourquoi ce bibelot de métal ouvré en forme de poire ? Cela devait avoir une quelconque signification symbolique pour eux. Desdémone, elle, regarda tour à tour le bibelot, puis Louis, apparemment sans comprendre. Elle ne s’approcha pas non plus. Ce fut Louis qui en prit l’initiative. Ce faisant, sans quitter la putain des yeux, il tourna la petite clef ronde qui se trouvait sous la poire. Elle produisit un clac métallique et se sépara brusquement en quartiers. L’objet ressemblait maintenant à une fleur épanouie dont les pétales étaient en fait quatre lames acérées. Desdémone haleta. Louis revissa la poire avec ostentation (19) .
    — Comme tu peux le voir, j’ai l’outillage adéquat. Et ce n’est pas tout.
    Un rouleau de corde suivit.
    — Faut faire attention avec le chanvre. C’est une herbe étouffante, dit-il.
    Et il termina en exhibant une espèce de bride en fer à laquelle était attachée une paire de tenailles.
    Avant qu’elle eût eu le temps de tenter quoi que ce fût, Desdémone se retrouva étendue sur sa couche ; Louis était par-dessus elle, tenant une dague sous son menton.
    Sam était incrédule. Le monstre avait poussé l’audace jusqu’à l’emmener avec lui pour qu’il assiste à cette horreur. Et

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