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Le sang des Dalton

Le sang des Dalton

Titel: Le sang des Dalton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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à sauter en selle depuis le toit en tôle de la remise. Broadwell, écarlate et ahanant, et Doolin, hilare, avec son rire bizarre  – « Hayuk, hayuk, hayuk ! »  – ont fait un bras de fer dont l’enjeu était d’écraser le poing du perdant dans une assiette de beurre. Et Julia a prêté l’oreille à Bill Powers le gentleman, qui résinait son archet face à elle.
    « Mes tomates ont été calcinées par le soleil, cette année, a-t-il expliqué. Mes plants de maïs ont bruni et se sont décomposés avant d’arriver à hauteur de genou. J’ai coupé la tête de treize crotales qui rôdaient près des cabinets. Je ne me déplaçais jamais sans ma binette et j’étais bien content de ne m’être jamais marié. Il fait trop sec dans l’Ouest pour jardiner. »
    Julia paraissait d’autant plus distinguée en si fruste compagnie. Elle avait une ombrelle sous laquelle elle s’est abritée pendant le plus clair de cette torride après-midi et elle avait soin de soulever le bas de sa robe quand elle marchait dans l’herbe. Mon frère et moi avons joué aux dames à table et Julia est demeurée assise à côté de moi en silence, pendant qu’Eugenia la croquait en train de s’éventer avec un exemplaire du magazine Womans Home Companion (« Le Compagnon de la ménagère »). Comme je lui prenais un pion et arrivais à dames, Bob s’est penché pour examiner le carnet de dessin de Miss Moore.
    « C’est très réussi », a-t-il commenté.
    Eugenia a essuyé sur un pan de sa chemise le fusain qu’elle avait sur les doigts.
    « Julia est facile à dessiner, a-t-elle affirmé. Elle peut rester si longtemps sans bouger. La plupart des gens souffrent de la danse de Saint-Guy.
    — Ça lui est passé quand elle était plus jeune, ai-je expliqué.
    — Tu sais, Julia, c’est vraiment remarquable, a déclaré Bob. Comment tu t’y es prise pour devenir adulte si vite ?
    — Tu me taquines, pas vrai ?
    — Non ! Je t’assure, tu es en avance de dix ans sur moi.
    — Tu es vraiment très mûre », a renchéri Miss Moore.
    Julia s’est tournée vers moi.
    « Ils se moquent de moi, hein ?
    — Non, je pense qu’ils sont sincères. »
    Elle a timidement souri à Miss Moore.
    « Je peux être effroyablement sainte-nitouche, parfois. »
    Puis la nuit est venue, tout le monde s’est séparé et Charlie Pierce a raccompagné Julia chez elle à bord d’un cabriolet qu’il avait acheté à quelqu’un au Kansas.
    Blackface Charley Bryant avait loué une Victoria pour emmener Miss Jean Thorne et j’ai ainsi débarqué à l’hôtel Rock Island à l’issue d’un trajet inconfortable à l’arrière de la voiture, à battre des pieds au-dessus de la route, pendant que Bryant conduisait sur la banquette avant, voûté, le col de chemise rabattu pardessus sa cicatrice. Il l’avait crépie de poudre de riz, ce qui lui conférait un teint crayeux. Un vilain chancre lui déformait la lèvre.
    Il était dix heures du soir quand nous avons attaché l’attelage à Hennessey. Des ballons en papier en forme d’ânes étaient accrochés à la barre d’attache. Des torches de signalisation ferroviaire crachotaient et crépitaient dans la rue et des représentants de commerce qui s’étaient retrouvés à l’hôtel Rock Island se les lançaient les uns aux autres. Des cheminots les observaient, debout, les mains dans les poches de leur salopette. Bryant est allé s’asseoir sur un banc à la gare avec Miss Thorne et je me suis installé dans un fauteuil en chintz dans le salon de l’hôtel pour lire les journaux.
    Un grand type blond en pantalon et veste à fines rayures couleur craie est sorti de sa chambre et a verrouillé la porte. Les manches de sa chemise blanche étaient retroussées et il avait sur la tête un épi qu’il avait tenté d’aplatir avec de l’eau. Il devait peser dans les quatre-vingt-dix kilos. Il a demandé à Mr Thorne le registre et a noté tous les noms dans un calepin. Il m’a montré du doigt.
    « Et lui, qui c’est ? »
    Thorne a répondu qu’il n’en savait rien. Le marshal s’est campé au milieu du tapis du salon, les mains dans les poches.
    « Comment tu t’appelles ? » m’a-t-il apostrophé.
    Je lisais un article à propos d’un garçon de ferme de Tulsa qui était capable de balancer des balles plongeantes au base-ball.
    « Charlie McLaughlin, ai-je salué. Bonne journée ?»
    Il a dédaigné ma question.
    « D’où tu es ?
    — Libéral,

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