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Le sang des Dalton

Le sang des Dalton

Titel: Le sang des Dalton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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au Kansas, vous connaissez ?
    — J’étais le marshal de Woodsdale à l’époque où Libéral et Hugoton étaient en bisbille pour devenir le chef-lieu du comté de Stevens.
    — Effectivement, c’est tout près. »
    Il a consulté son calepin.
    « Comment ça se fait que tu sois pas dans le registre ?
    — Je suis juste venu lire les journaux. »
    J’ai replié celui que j’avais entre les mains et regagné la rue.
    J’ai aperçu Bryant qui était assis, seul, sur un tas de traverses de chemin de fer, tandis que derrière lui, des serre-freins marchaient sur le toit de wagons de marchandises et tournaient les volants de freinage. Je ne lui ai pas demandé pourquoi Miss Thorne n’était plus avec lui. Je l’ai seulement informé de la présence en ville du marshal adjoint Ed Short et lui ai recommandé de se trouver un autre point de chute. Il prit donc la direction de Mulhall, à l’est, où son frère Jim possédait une propriété, mais un type n’avait de cesse de passer et repasser devant la maison à longueur de journée, au pas sur son cheval, et Bryant en déduisit que ce devait être un détective, aussi repartit-il et élut-il domicile au camp de vachers de Buffalo Springs jusqu’à la fin juillet.
    Le sieur Short était un mercenaire engagé sur des fonds fédéraux par le marshal en chef William Grimes pour appliquer la loi dans le second district judiciaire. Short avait chaussé ses lunettes et parcouru les dossiers des hors-la-loi locaux que tenait à jour au tribunal de Guthrie un marshal adjoint dénommé Christian Madsen, et il avait reconnu en un cow-boy du Texas du nom de Blackface Charley Bryant l’un des bandits de Wharton décrits par le chauffeur et le mécanicien du Santa Fe-Texas Express. Short avait donc loué un bureau à Hennessey et pris une chambre à l’hôtel Rock Island, où un client de passage lui avait raconté que vivait la bonne amie de Bryant, et il allait régulièrement observer à la jumelle, juché sur son cheval, en bordure de terrain, le bâtiment blanc d’un étage appartenant à celle qui, d’après ses renseignements, était Daisy Bryant, la sœur de l’homme qu’il recherchait. Apparemment, il ne repéra jamais mon frère. Bob avait le chic pour ce genre de truc.
     
     
    À partir d’août, à l’abri, notre ordinaire s’était agrémenté de légumes sauvages et de veau égaré. Le soir, Doolin et moi allions pêcher des poissons-chats avec des cannes en bambou au bord de la rivière pendant que, autour d’un feu de camp, les autres faisaient tourner de main en main une cruche d’alcool et tapaient en rythme sur leurs genoux avec des cuillères pendant que Powers jouait du violon. Je n’ai effectué qu’une visite chez Julia, un samedi après-midi où nous n’avons rien fait, car c’était tout ce qui était dans mes moyens. Elle portait une robe jaune avec un col de dentelle ; nous nous sommes amusés à lancer des pelotes de laine sur les camées du piano. J’ai réussi à planter un couteau dans un arbre à trois mètres de distance et je me suis assis dans la terre aux pieds de Julia qui, perchée sur le siège de la balançoire, m’a mouillé les cheveux et m’a fait la raie au milieu. Elle m’a questionné à propos de Miss Moore, mais elle lui en voulait encore. Julia avait le sentiment qu’elle me dévoyait. J’avais dix-neuf ans ; elle en avait dix-huit.
    Bryant avait une mine affreuse. Il avait les yeux verdâtres, le teint jaunâtre et il n’arrivait pas à garder un repas dans l’estomac. Chaque fois que je le voyais, il avait un gant sur le visage, les mains sur l’entrejambe et se berçait de droite et de gauche sur sa couche. La maladie lui rongeait le cerveau : il lui arrivait de bouder sous un arbre, la bouche tordue comme s’il vociférait à l’adresse de railleurs dans son propre saloon privé ; soudain, il se relevait d’un bond, se précipitait au soleil en distribuant des coups de poing à toute volée, avant de retourner s’asseoir et de reproduire encore et encore l’échauffourée jusqu’à ce que Pierce ou Powers le secoue.
    Le 1 er août, il partit pour Mulhall, où résidait le médecin de son frère, avec une flasque de whisky corsé comme du Tabasco dans sa chemise, les jambes ficelées à sa selle. Mais il s’évanouit et faillit s’étouffer avec son vomi avant de parvenir à éperonner sa monture jusqu’à la véranda en bois de l’hôtel Rock Island à Hennessey, où il dut

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