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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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guère porté sur la danse et les sacrifices. Il aime mieux la rhétorique et la philosophie.
    Maesa observait discrètement ses deux filles, se posant la même question depuis des années : comment avait-elle pu engendrer deux enfants tellement différentes ?
    Car différentes, elles l’étaient. Non seulement par leur physionomie et leur allure, mais également par leur caractère. Aussi dissemblables et opposées que peuvent l’être le feu et l’eau.
    Bien qu’elle fût plus jeune que Soemias de quelques années, Mammaea paraissait la plus âgée des deux. C’était une femme de taille moyenne, dénuée de charme et de féminité. Sa peau était terne et brune, ses lèvres serrées, son menton court et résolu, son nez large et un peu fort. Elle tenait de sa mère son visage assez ingrat, ses traits épais, mais qui exprimaient la même volonté intransigeante.
    — Te voilà joliment vêtu, lança encore Soemias à son neveu, l’air moqueur. Tu ressembles à un vrai petit Romain !
    Le jeune garçon, en effet, portait la toge prétexte (19) bordée d’une bande pourpre.
    — Alexianus est un Romain, corrigea Mammaea en entourant son fils d’un bras protecteur.
    — Non ! c’est un Syrien à qui l’on a donné la citoyenneté romaine, rectifia Soemias. Le sang des rois-prêtres d’Émèse coule aussi dans ses veines, que tu le veuilles ou non.
    — Cesse de parler de mon fils comme s’il était absent, la pria Mammaea en se raidissant dans sa stola. Et cesse de te railler de lui continuellement ! Est-ce que je me moque, moi, de Varius, parce qu’il se pare et se trémousse comme une fille ?
    — Varius ne se trémousse pas comme une fille ! rétorqua Soemias, vexée à son tour. Et s’il aime les bijoux, ce n’est pas un défaut ! En tout cas, il ne cherche pas à singer les Romains en se vêtant, comme ton gamin, de leur horrible toge !
    Mammaea se leva, raide et sombre.
    — Je te demanderai, à l’avenir, de ne plus m’adresser la parole, pria-t-elle avec hauteur.
    — Avec plaisir, ricana sa sœur.
    Il était étrange de voir deux femmes, issues du même ventre, aussi dissemblables.
    D’un côté, la sulfureuse et flamboyante Soemias, ses cheveux fauves et sa peau couleur d’ambre, sa douceur nonchalante, sa lascivité provocante, son caractère immature et versatile, son goût du lucre et du luxe.
    De l’autre côté, la sombre et discrète Mammaea, vertueuse à l’excès, physiquement ordinaire, sans éclat, sans relief, avec sa figure grave, son regard posé, et son esprit plus subtil, plus tourmenté aussi.
    Cette différence, dont chacune des deux femmes avait pleinement conscience, semblait avoir dressé une barrière infranchissable entre elles. Elles ne se parlaient que très rarement, s’épiaient, se jaugeaient, se détestaient en silence.
    On pouvait sentir, dans chacun des regards qu’elles se lançaient, dans chacun des mots qu’elles s’adressaient, la sourde et âpre rivalité qui les dressait l’une contre l’autre depuis l’enfance.
    La même rivalité qui, en d’autres temps, avait séparé Domna et Maesa.
    « Tout les oppose, songea leur mère. Et tout les prépare, un jour, à s’affronter… Et qui sait, ce jour-là, se demanda la vieille femme, laquelle des deux l’emportera, de la brûlante Soemias ou de la sage Mammaea ? » On avait déjà vu les ondes les plus calmes se lever en lames furieuses et éteindre les flammes les plus ardentes…
    Maesa agita une main autoritaire et imposa le silence aux membres de son clan. Le jour où ses filles se déchireraient comme des hyènes impitoyables n’était pas encore venu. Pour l’instant, l’austère Syrienne avait bien l’intention de garder sa royale progéniture sous sa coupe et de veiller à ce qu’aucune dissension ne vienne ruiner ses projets.
    — Mammaea, dit-elle en s’adressant à sa fille cadette, as-tu convoqué les peintres comme je te l’avais demandé ?
    — Oui, mater.
    — Je veux que tu surveilles de près leur travail. Le portrait qu’ils vont faire de Caracalla lorsqu’il était enfant doit ressembler au visage de Varius. Mêmes ondulations des cheveux, même regard. Je veux que l’on y retrouve la courbe du nez, la ligne du front, la mâchoire de Varius.
    — J’y veillerai, mater.
    — Soemias, fit-elle en se retournant cette fois vers l’aînée, je veux que tu parles à ton fils.
    — Et que dois-je lui dire ?
    — Que nous allons bientôt

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