Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
Vom Netzwerk:
yeux et tendit la main, pouce fermé. Volontairement, durant de longues minutes, il fit durer l’attente du public et le supplice de Ciconia, mettant sa délibération en suspens.
    — Épargne-le, demanda Soemias en voyant la mine enragée des patres, aux premiers rangs.
    Ceux-ci agitaient maintenant leurs mouchoirs et continuaient de s’époumoner en criant :
    — Mitte ! Mitte !
    Varius haussa les épaules avec dédain.
    — Je n’aime pas beaucoup les gladiateurs faibles et suppliants, répliqua-t-il à sa mère.
    — Ce n’est pas un gladiateur, Varius. C’est un sénateur. Et son obésité l’a rendu à moitié infirme.
    La compassion n’était généralement pas le fort de la belle Soemias. Aussi Varius en fut-il surpris. Cette marque de pitié inattendue était-elle inspirée par une sensiblerie idiote ou par la crainte d’une réaction sénatoriale ?
    — Aujourd’hui, c’est un gladiateur, répondit l’adolescent. Et il ne s’est pas convenablement battu. Mon plaisir s’en est trouvé diminué.
    Et sur ces mots, prononcés avec un détachement effroyable, tandis que l’assistance continuait à crier, il baissa très lentement son pouce.
    Le signal de la mise à mort de Ciconia était donné. Lorsque le rétiaire, après avoir délivré le sénateur du filet, l’égorgea d’un geste rapide, Varius ressentit une satisfaction intense, presque physique. Le plaisir qu’il éprouva à voir Rusticus donner la mort fut aussi grand que s’il avait lui-même abattu le poignard. Il eut enfin son instant de fébrilité magique, son frémissement orgasmique.
    — En voilà un qui ne toussera plus lorsque je prendrai la parole, dit-il en se rasseyant.
    Une fois le cadavre de Ciconia évacué de l’arène et traîné jusqu’à la porta Libitina (124) , le sol fut, de nouveau, nettoyé pour le prochain combat. Soemias, que l’ennui et la chaleur alanguissaient, fit mine de s’assoupir un instant.
    — Ce n’est pas le moment de fermer les yeux ! la prévint son fils en la secouant. Tu vas rater la suite !
    — Encore un sénateur déguisé en mirmillon ?
    — Pas du tout…
    Il cligna des yeux et fit une moue enfantine. Même avec sa mère, il ne pouvait s’empêcher de minauder et de cabotiner, de jouer de son visage de joli mime, toujours trop riche d’expressions.
    Puis il porta son regard vers le dernier étage de l’amphithéâtre, plus précisément vers la terrasse supérieure de l’édifice. Il fit alors un signe étrange, en remuant plusieurs fois la main. À leur tour, les yeux de Soemias se levèrent vers les hauteurs des murailles, à la recherche d’une explication. Elle y perçut alors une légère agitation, vit quelques hommes qui s’activaient en portant de gros sacs et qui renvoyaient les mêmes signaux à d’autres individus, postés, eux, dans les couloirs circulaires.
    Un hurlement strident, sans doute celui d’une femme, retentit soudain dans la cavea. Puis, à quelques secondes d’intervalle, un deuxième cri, puis un troisième, encore plus aigus, encore plus inquiétants, firent tourner toutes les têtes. C’est à ce moment seulement que Soemias vit qu’on avait ouvert les sacs de toile et qu’on déversait leur contenu sur l’assistance.
    Une pluie de serpents tombait sur la foule, jetés du quatrième niveau, tandis que des centaines d’autres reptiles étaient lâchés par des esclaves dans les travées.
    — Regarde-les décamper ! s’exclama Varius en tapant des mains. Voilà du spectacle !
    Ce fut bientôt une mêlée effroyable. Les gens, pris d’une panique irraisonnée et incontrôlable, sans même savoir, pour certains, à quoi ils voulaient échapper, se ruèrent vers les couloirs qui se trouvèrent vite encombrés. Ils se mirent à fuir leur place en se marchant les uns sur les autres, tentèrent d’accéder par tous les moyens aux vomitoria (125) , enjambèrent les balustrades en hurlant de terreur.
    Dans la loge impériale, Varius s’était mis debout pour mieux jouir de cette vision d’horreur et sautait comme un cabri. À présent, des milliers de spectateurs, dans un monstrueux mouvement d’affolement collectif, se poussaient, se bousculaient, s’écrasaient sans ménagement.
    Les esclaves et les pérégrins, qui étaient entrés sans jetons et qui s’entassaient sur la terrasse, ainsi que les spectateurs des gradins supérieurs, essayaient de redescendre vers les issues de sortie mais une partie de la foule, qui

Weitere Kostenlose Bücher