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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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suppliés à genoux… Rien n’y a fait ! Oui, j’ai tout essayé pour le sauver, mais ils étaient trop nombreux… Que pouvais-je faire ? Les prétoriens n’ont pas la réputation d’être très magnanimes… !
    Il s’interrompit, reprit d’une voix anormalement aiguë :
    — Il y a longtemps déjà que j’aurais dû venger la mort de mes amis !
    À cette constatation saisissante, il s’invectiva tout bas pour sa négligence : « Pourquoi, se murmura-t-il, pourquoi n’as-tu pas agi avant, Varius ? Tu aurais dû penser à cela plus tôt. » Il hocha la tête d’un air de reproche, se remplit une nouvelle coupe et but encore une gorgée, pour faciliter ses réflexions.
    — Sais-tu ce que disent les juifs ? poursuivit-il en ricanant. Que le châtiment doit être égal à l’offense : œil pour œil, dent pour dent… vie pour vie.
    Ses mots restèrent un moment suspendus en l’air.
    — Je vais rendre à Alexianus le coup infâme qu’il m’a porté, déclara-t-il en titubant vers Soemias, et je vais le lui rendre au centuple !
    Puis, souriant à la figure étonnée qu’il avait devant lui, il déclara à sa mère :
    — Ne t’inquiète pas mamma, je viens de combiner un plan… J’ai décidé, moi aussi, de faire un peu de ménage autour de mon cher cousin !
    — Explique-toi, le pria sa mère.
    Varius loucha sur elle d’un air finaud :
    — À part ta chienne de sœur et la vieille chèvre, reprit-il, quelles sont, à ton avis, les personnes les plus proches et les plus appréciées de mon cousin ?
    — Ses précepteurs, répondit Soemias sans réfléchir.
    — Exact, confirma l’empereur, ses précepteurs…
    Il souleva sa coupe, l’observa en fredonnant.
    — Ses précepteurs… répéta-t-il. Eh bien, ils vont mourir. Je l’ai décidé !
    En prononçant cette dernière phrase, un sentiment de puissance vint raviver sa gaieté, comme un coup de fouet, et il pouffa longuement. L’ébriété semblait lui avoir fait perdre tout discernement et toute lucidité.
    — Qu’en dis-tu ? lança-t-il à Soemias, en guettant son assentiment.
    — Je ne sais pas, fit-elle, songeuse. Qui acceptera de les tuer ? Certainement pas ta garde, tu sais que les prétoriens sont tous acquis à Mammaea.
    — Parce qu’elle les paye bien, répliqua Varius. Nous n’avons qu’à leur offrir davantage.
    Soemias secoua la tête, peu convaincue.
    — Quant à l’illustre assemblée du Sénat, annonça l’empereur en se servant une troisième coupe, sache qu’elle n’existera bientôt plus !
    — Varius, je ne vois guère comment tu pourrais te débarrasser de six cents sénateurs…
    — J’ai mon idée.
    — C’est impossible…
    — Rien n’est impossible, gloussa Varius. Rien n’est impensable ! Est-ce parce qu’on n’a jamais songé à faire une chose qu’elle est pour autant irréalisable ? J’ai osé ce que personne avant moi n’avait jamais osé : n’ai-je pas violé cent fois leurs lois, profané leurs temples, outragé leurs prêtresses, défié leurs dieux ? Qui s’était permis cela avant moi ?
    Soemias continuait à s’interroger. Pouvait-on rayer, par un coup de force, une institution qui plongeait tant de racines dans la vie romaine ? Le peuple, les chevaliers, les citoyens de l’Empire, le monde entier, accoutumés à l’existence de cette prestigieuse assemblée depuis près de mille ans, comprendraient-ils un tel geste ? Aucun empereur, fut-il le plus puissant, le plus hostile aux clarissimes, n’avait jamais osé imaginer prendre une telle mesure !
    — Supprimer le Sénat ? fit Soemias en se raclant la gorge. Non, c’est une idée folle, Varius ! Folle et vouée à l’échec !
    — Je ne suis pas fou ! hurla l’adolescent en frappant du poing sur le guéridon en bronze de la chambre. Je suis l’Auguste ! Je peux faire ce que je veux ! Je peux tout ! Je peux supprimer le Sénat, supprimer l’armée, et même faire raser cette ville maudite et anéantir tous ses habitants !
    Il vacilla, se rattrapa de justesse au bord du meuble.
    — Oui, je peux abattre Rome… dit-il dans un souffle. Et après quoi, ajouta-t-il en levant des yeux d’halluciné, après quoi, j’en rebâtirai une autre ! N’est-ce pas une idée lumineuse ? Je reconstruirai une nouvelle Rome… !
    À cette pensée, qui le portait au paroxysme de la jubilation, il se remit à s’esclaffer. Et, levant davantage la coupe d’argent vers sa bouche, il

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