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Le seigneur des Steppes

Le seigneur des Steppes

Titel: Le seigneur des Steppes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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regard de défi. Djötchi
se déshabilla, s’avança dans l’eau et plongea sous la surface. Gengis le vit
frissonner mais le garçon musclé se tourna vers son frère et attendit. Il
semblait avoir oublié la présence de son père et la leçon que celui-ci voulait
leur apprendre.
    Avec un grognement de dédain, Chatagai se dévêtit à son tour.
Ögödei, âgé de six ans, était beaucoup plus petit, mais lui aussi commença à se
déshabiller et Gengis vit leur mère se lever pour l’appeler.
    — Laisse-le venir, Börte.
    Il surveillerait de près son troisième fils pour qu’il ne
risque pas de se noyer mais ne lui donnerait pas le réconfort de le dire à voix
haute. Börte grimaça quand Ögödei entra dans l’eau, un pas derrière Chatagai. Il
ne restait que Tolui, qui se tenait misérablement sur la berge. Avec réticence,
il entreprit lui aussi de défaire son deel. Ravi de son courage, Gengis
eut un rire et lui lança, avant que Börte pût intervenir :
    — Pas toi, Tolui. L’année prochaine, peut-être, mais
pas cette fois. Reste là et écoute.
    Avec un soulagement manifeste, le jeune garçon renoua la
ceinture de son deel et Gengis lui adressa un clin d’œil qui lui redonna
le sourire.
    Djötchi avait choisi un endroit proche de la berge où l’eau
était calme. Seule sa tête émergeait et pendant le bref échange entre Gengis et
Tolui, il était parvenu à contrôler sa respiration. Il serrait les mâchoires
pour empêcher ses dents de claquer et regardait son père de ses grands yeux
sombres. Comme un millier de fois auparavant, Gengis se demanda si le garçon
était bien de lui. Sans une certitude, son affection pour lui ne pouvait se
développer. Djötchi devenait grand et fort, mais Gengis avait du mal à aimer un
visage aux yeux aussi sombres, alors que les siens étaient jaunes comme ceux d’un
loup. Il croyait y reconnaître les traits du violeur tatar dont il avait mangé
le cœur pour se venger.
    Chatagai, lui, était clairement son fils. Les yeux pâles de
froid, il s’immergea dans l’eau et Gengis dut maîtriser ses sentiments pour ne
pas gâcher la leçon.
    — Dans une eau aussi glacée, dit-il, un enfant ou même
un adulte peut rapidement perdre conscience. Le corps commence à mourir par les
mains et les pieds. Ils deviennent insensibles, inutiles. Les pensées se
ralentissent et si vous restez trop longtemps, vous n’aurez plus la force ni la
volonté de sortir.
    Il s’interrompit, les observa. Djötchi avait les lèvres
bleues mais ne protestait toujours pas. Chatagai agitait les membres pour
lutter contre le froid. Ögödei, le plus proche, tentait de calquer sa conduite
sur celle de ses frères aînés. L’effort était trop grand pour lui et Gengis l’entendit
claquer des dents. Il ne pouvait les garder dans l’eau beaucoup plus longtemps
et il songea à renvoyer Ögödei sur la berge. Non, Yesugei ne l’avait pas fait, alors
que le petit Temüge avait manqué s’évanouir vers la fin et s’était presque noyé.
    — Ne montrez rien de ce que vous sentez, leur
intima-t-il. Montrez-moi le masque froid que vous présenterez aux ennemis qui
vous raillent. Dites-vous qu’eux aussi ont peur. Si vous vous êtes demandé, un
jour, « Suis-je le seul couard dans un monde de guerriers ? », sachez
qu’ils se posent la même question, jusqu’au dernier. Forts de cela, vous
pourrez cacher votre peur et leur faire baisser les yeux.
    Les trois garçons s’efforcèrent d’effacer de leur visage
toute trace de frayeur et de souffrance ; sur la rive, le petit Tolui les
imita avec gravité.
    — Respirez doucement par le nez pour ralentir votre
cœur. Votre chair est faible mais vous n’avez pas à écouter ses appels à l’aide.
J’ai vu un homme se transpercer le bras d’une dague sans faire couler une
goutte de sang. Laissez cette force venir à vous et respirez. Ne me montrez
rien, soyez vides.
    Djötchi comprit immédiatement et sa respiration devint lente
et longue, à l’imitation parfaite de celle de son père. Sans lui accorder d’attention,
Gengis regardait Chatagai s’efforcer de se maîtriser. Il y parvint enfin, un
peu avant le moment où, Gengis le savait, ils risquaient de perdre connaissance
dans l’eau s’il ne mettait pas fin à l’exercice.
    — Votre corps est comme ces animaux dont vous avez la
charge, leur dit-il. Il réclame de la nourriture et de l’eau, de la chaleur, un
soulagement à ses souffrances. Trouvez le masque

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