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Le Signe rouge des braves (Un épisode durant la guerre de Sécession)

Le Signe rouge des braves (Un épisode durant la guerre de Sécession)

Titel: Le Signe rouge des braves (Un épisode durant la guerre de Sécession) Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Stephen Crane
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d’hommes.
    Un moment il vit une petite pièce d’artillerie conduite avec fracas le long de la ligne d’horizon. Les minuscules silhouettes des cavaliers fouettaient leurs minuscules chevaux.
    Depuis une colline élevée leur parvint le bruit de coups de feu et de hourras. Un écran de fumée s’éleva doucement entre les branches des arbres.
    Les batteries de canons s’exprimaient avec un tonnant effort oratoire. Ça et là des étendards flottaient. Celui rayé de bandes rouges dominait. Ils jetaient des taches de couleurs chaudes sur les lignes sombres des troupes.
    À la vue de l’emblème, l’adolescent ressentit à nouveau de l’enthousiasme. L’étendard était comme un bel oiseau étrangement indifférent sous la tempête.
    En écoutant le vacarme qui lui parvenait du côté de la colline, et cette autre profonde pulsation orageuse qui arrivait de loin par la gauche, ainsi que la clameur plus faible qui semblait venir de toute part, l’adolescent comprenait que l’on se battait encore ici et là. Alors, il crut que toute la bataille se déroulait sous son nez.
    Comme il regardait autour de lui, l’adolescent parut un instant étonné à la vue du ciel bleu et pur, de la lumière qui brillait à travers les arbres et sur les champs. Il était surprenant de voir la nature poursuivre tranquillement son chemin doré au milieu de tant de mal.

CHAPITRE SIXIÈME
     
    L’adolescent s’éveilla avec lenteur. Graduellement il reprenait position de façon à pouvoir se regarder. Un moment il scruta sa personne d’un air stupéfait, comme s’il ne s’était jamais vu avant. Alors il prit sa casquette posée au sol, et gigota dans sa veste pour être plus à l’aise ; puis se mettant à genoux il relaça ses bottes. Ensuite il s’essuya pensivement les traits qui dégageaient une forte odeur.
    Ainsi, c’était enfin fini ! Le test suprême était passé. Les formidables et infernales difficultés de la guerre ont été vaincues.
    L’adolescent était dans un contentement de soi qui touchait à l’extase. Il éprouvait les sensations les plus délicieuses de sa vie. Debout, comme hors de lui-même, il contemplait la scène qui venait de se dérouler. Il sentait que l’homme qui s’était battu ainsi ne pouvait qu’être magnifique.
    Il se sentait un type bien. Il se voyait même porteur de ces idéaux qu’il croyait si loin de lui. Il sourit avec une profonde gratitude.
    Il irradiait la tendresse et la bonne volonté envers ses camarades.
    – « Hou ! ça a chauffé hein ? » dit-il d’un ton affable à un homme qui s’essuyait le visage ruisselant avec la manche de sa veste.
    – « Tu parles ! » dit l’autre, en souriant d’un air amical. « Je n’ai jamais vu pareille chaleur ». Il s’allongea sur le sol les membres voluptueusement étendus. « Ah oui ! Et j’espère qu’il n’y aura plus de combats au moins jusqu’à la semaine prochaine. »
    On se serrait la main en échangeant des amabilités sincères avec les hommes dont les traits étaient familiers ; mais avec qui maintenant l’adolescent sentait se nouer les liens du cœur. Il vint à l’aide d’un camarade blessé au tibia, et qui jurait, pour lui panser sa blessure.
    Mais subitement des cris étonnés éclatèrent le long des rangs du régiment des novices : « Les voilà qui arrivent encore ! Les voilà qui arrivent encore ! » L’homme qui se prélassait au sol se remit debout en lâchant : « Seigneur ! »
    L’adolescent jeta des regards rapides sur les champs. Il distinguait des formes qui s’élargissaient en masses depuis les bois distants. Il revit l’étendard penché qui courait sus devant.
    Les obus qui pour un temps avaient cessé d’inquiéter le régiment, vinrent tournoyer encore ; ils éclataient sur les champs et au pied des arbres en farouches éclosions qui jaillissaient comme des fleurs guerrières.
    Les hommes gémissaient. La joie disparue de leurs regards. Leurs visages souillés exprimaient maintenant un profond dépit. Leurs corps raidis bougeaient avec lenteur, et ils fixaient la frénétique approche de l’ennemi d’un air sombre. Esclaves qui peinaient à mort dans le temple du dieu Mars, ils commençaient à ressentir de la révolte contre les rudes tâches qu’il leur imposait.
    Ils se plaignaient et s’inquiétaient : « Oh ! ç’en est trop ! Pourquoi n’envoie ton pas des renforts ? »
    – « On va jamais t’nir cette deuxième volée. Je

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