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Le spectre de la nouvelle lune

Le spectre de la nouvelle lune

Titel: Le spectre de la nouvelle lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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mentent peu, c’est qu’ils parlent peu. Et surtout…
    Farald attendit que les serviteurs aient apporté à nouveau des boissons, puis qu’ils se soient écartés.
    — Ah, combien d’entre eux, en vérité, s’adonnent à des pratiques infâmes, combien aussi se livrent à la débauche la plus effrénée, à des accouplements immondes ! Oui, combien ! reprit-il.
    — Sont-ils donc si nombreux pour de telles infamies ? s’enquit Timothée.
    — Vous pensez bien, seigneurs, qu’ils ne font pas cela au grand jour, mais de nuit et en secret. Dans ces marécages dont ils connaissent chaque chemin, il leur est facile de gagner des repaires où ils se cachent pour leurs agissements ignobles. Qui pourrait dire alors combien ils sont ?
    — Mais s’ils se cachent et n’agissent qu’en secret, ainsi que tu le dis, comment savoir ce qu’ils font ? demanda Doremus avec un air perplexe.
    — Nous ne sommes pas sans indications, quant aux préparatifs de ces rencontres, à leurs conséquences, dramatiques souvent, criminelles sans doute, quant aux débauches qui s’y déroulent… Concernant les participants…
    — Tout cela n’indique pas en quoi consistent ces cérémonies démoniaques et lubriques ?
    — Bavards et vantards ne manquent pas, même parmi eux, répondit Farald.
    — Ceux-ci ne peuvent-ils prendre pour réalité les fruits de leurs délires ou de leurs cauchemars ?
    — Que, dans le marécage, en certaines occasions, aient lieu des rassemblements suspects, cela est certain. Quant à ce qui s’y passe, trop de renseignements concordent pour qu’on puisse l’ignorer. Par exemple, ce signal est généralement donné par l’apparition sur certains « buttons » d’un spectre blanc. Cela est avéré : bien des gens, insoupçonnables, dignes de foi, l’ont aperçu au loin, certains soirs, avant que ne se produisent des déplacements significatifs. Tiens : il m’étonnerait fort, par exemple, qu’il ne se manifeste pas, dans quelques jours, à l’occasion de l’équinoxe, à la nouvelle lune.
    — Nous vérifierons, ponctua Erwin. Cependant nous devons, par priorité, enquêter au sujet de ces crimes et forfaits qui, eux, ne font aucun doute et pour lesquels il t’a été ordonné d’entreprendre des enquêtes.
    — Je n’y ai pas manqué, seigneur.
    — Prenons cela dans l’ordre : d’abord ces deux noyades suspectes, demanda le Saxon.
    — On a déjà dû t’indiquer qu’étant donné l’état dans lequel se trouvaient les corps, il était impossible d’établir de qui il s’agissait, ni quelles étaient les causes de la mort.
    — Ne subsistait-il pas des marques significatives, comme, par exemple, des lambeaux d’étoffe ?
    — Rien, en vérité, absolument rien ! Les moines de l’abbaye de Méobecq où les dépouilles avaient été transportées avant leur enterrement en ont été étonnés. Aussi…
    Le vicomte ménagea ses effets.
    — … ai-je estimé qu’une démarche s’imposait ! énonça-t-il. J’ai demandé au viguier de Mézières, à Guntran, de me signaler toutes les disparitions récentes survenues dans la Brenne.
    — Excellent ! nota le Saxon.
    — Il m’en a indiqué trois.
    — C’est trop d’une !
    — En effet, seigneur. Mais l’on peut penser que les noyées étaient du nombre.
    — Je t’écoute. Toi, frère Antoine, prends note ! ordonna Erwin.
    Le moine s’installa commodément avec son écritoire.
    — Première disparue, indiqua le vicomte, une nommée Paquette, femme d’une quarantaine d’années qui a perdu son mari récemment et qui continuait d’exploiter avec ses enfants, dont trois fils, comme colons, un manse sur un domaine appartenant à la famille Tanno. Celle-ci, venant de Ravière, s’est installée près de Migné il y a un quart de siècle.
    — Cette Paquette pouvait-elle être soupçonnée d’agissements condamnables ? demanda le moine.
    — L’enquête n’a rien prouvé, ce qui ne veut pas dire… Certes, elle s’absentait et se déplaçait souvent. Mais comme elle avait des parents aux quatre coins de la Brenne…
    — Cela ne surprenait personne ?
    — Non, pas à ma connaissance.
    — Seconde disparue ? interrogea Doremus.
    — Une commerçante de Mézières, nommée Agnès, de statut libre, épouse d’un certain Thomas, forgeron. Selon les renseignements recueillis par Guntran, elle aurait reçu – cela un mois avant qu’on ne trouve les corps des deux noyées – un message de sa mère, demeurant à Bourges, et qui

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