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Le spectre de la nouvelle lune

Le spectre de la nouvelle lune

Titel: Le spectre de la nouvelle lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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cela, reprit-il à voix haute, nous conduit à l’étrange disparition de deux assistants que le comte Sturbius avait envoyés en Brenne.
    — Des viguiers en mission particulière, plaça le vicomte Farald pour souligner qu’ils étaient d’un rang inférieur au sien.
    — … nommés Berthet et Godart, si ma mémoire est bonne, précisa le frère Antoine.
    — Donc, rappela le Saxon, ils auraient disparu quarante-huit heures seulement après leur arrivée. D’abord, s’agit-il bien de disparition ? Ne peut-on craindre qu’ils n’aient été tués ? Vicomte Farald, n’as-tu rien découvert à leur sujet, aucun indice ? Car enfin, des enquêteurs ne se volatilisent pas !
    — L’affaire s’est produite, en effet, au troisième jour de leur séjour en Brenne. Après une entrevue avec moi-même, pour me tenir au courant de leur mission, précisa Farald, ils avaient gagné Méobecq et s’étaient installés à l’abbaye Saint-Pierre.
    — Pourquoi pas à la viguerie de Mézières ?
    — Je ne le sais pas. Cela devait découler des ordres qu’ils avaient reçus du comte Sturbius… Donc, le lendemain de leur arrivée à Méobecq, ils en partirent tôt le matin avec un guide, un bûcheron nommé Estève, traversèrent la forêt de Lancosme en s’arrêtant au passage pour inspecter la masure de Fabienne. Puis ils prirent la route menant directement à Mézières où ils arrivèrent à la mi-journée pour le dîner.
    — De qui tiens-tu ces détails ? demanda Erwin.
    — De cet Estève lui-même. Ils sont repartis de Mézières rapidement, sans leur guide, pour Paulnay, où on les a aperçus en milieu d’après-midi. Là, ils ont pris la route du nord, celle qui mène à Châtillon-sur-Indre. Ils ont été vus pour la dernière fois à une demi-lieue de Paulnay, un peu à l’écart de la route. A partir de là on perd leur trace.
    — Cela signifie qu’on sait de manière précise où ils ont disparu. Les recherches devraient s’en trouver facilitées, estima Doremus.
    — Pourrait-on croire qu’ils ont été enlevés pour être séquestrés ? demanda Timothée.
    — A moins, ajouta le frère Antoine, qu’ils n’aient été effectivement enlevés, mais pour être mis à mort plus loin.
    Le vicomte fit une moue qui signifiait ignorance et perplexité.
    — Et s’ils s’étaient approchés d’un secret brûlant… de trop près ? avança Doremus.
    Le missus regarda son assistant avec une lueur d’intérêt dans les yeux.
    — Peut-être, en effet… murmura-t-il.
    Comme le repas se terminait, le vicomte Farald, afin de renforcer la bonne opinion qu’il pensait avoir donnée de lui-même, évoqua, d’une manière flatteuse, les solutions qu’il avait apportées à d’autres affaires délicates survenues en Brenne. Erwin, de nouveau perdu dans ses pensées, ne lui accorda qu’une attention distraite. Il formula quelques appréciations vagues puis demanda au frère Antoine de donner lecture des décisions arrêtées à Bourges et qui avaient déjà été portées à la connaissance du comte Sturbius.
    — Voilà qui définit aussi, cela va sans dire, tes tâches et devoirs. Est-ce suffisamment clair ? demanda le Saxon.
    — Assurément, seigneur !
    — Bien ! Très bien ! Maintenant, tu peux autoriser ceux auxquels tu as permis d’être mes invités à venir se présenter à moi. Je n’ai que peu d’instants à leur accorder.
    Ce fut une bousculade, chacun s’efforçant de s’approcher du missus, d’attirer son attention, et même, moment sublime, d’échanger quelques mots avec lui. Comme ces invités avaient appris qu’il était en route pour la Brenne, ils se croyaient tenus de donner leur avis à ce sujet. A l’évidence, pour ces dignitaires et notables, ce n’était qu’un marécage peuplé de sauvages étranges, aux mœurs scandaleuses, voire sacrilèges, et dangereux à l’occasion. Ils pensaient, en formulant de telles opinions, être agréables au missionnaire de l’empereur Charles, roi des Francs et des Lombards.
    Erwin se rendit compte rapidement que, si la Brenne était proche de Châteauroux, la plupart de ses interlocuteurs n’y étaient jamais allés et en ignoraient à peu près tout. Leurs propos de complaisance ne lui apprenaient que leurs préjugés. Il se retira bientôt, suivi par ses assistants. Les domestiques purent enfin satisfaire la gourmandise avide des invités.
    Au matin, le missus dominicus et son escorte prirent la route de Mézières. Ils suivirent

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