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Le Temple Noir

Le Temple Noir

Titel: Le Temple Noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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port. Le Devin fut le premier à parler. Discrètement il montra une patrouille de gardes qui encadrait une cohorte de prisonniers.
    — Des hommes du Légat. C’est la troisième depuis que nous sommes là.
    Sur le quai, une barque à fond plat venait d’accoster. Un par un, les captifs montèrent à bord et s’entassèrent sur les bancs de bois. Au gouvernail, un sergent faisait l’appel. Les noms tombaient comme des pierres dans l’eau.
    — Messulam !
    — Efrati !
    — Gozlan !
    Évrard, alias Martin, se pencha vers le Devin. Dès le matin, il avait fait le tour des tavernes du port. Là où se retrouvaient marins maltais, négociants génois et des Syriaques attirés par l’appât du gain. Autour des tables graisseuses, entre les carafes de vin sucré, on ne parlait que de la rafle.
    — Ils ont cerné le quartier juif à l’aube, puis ils ont isolé chaque rue.
    — Tu sais où était cachée la fille de Maïmonès ?
    Évrard secoua la tête, ce qui fit tinter les coquilles de saint Jacques le Majeur accrochées à son chapeau.
    — Non, mais les soldats ont séparé les hommes, des femmes et des enfants. Chaque groupe a été conduit dans un navire différent.
    Du doigt, l’espion montra trois silhouettes brunes à l’entrée du port. Le Légat avait loué les navires aux Génois pour servir de prisons flottantes. Roncelin cligna de l’œil. La carène rebondie des bateaux tanguait doucement tandis que les voiles, descendues des mâts, s’entassaient sur le pont. Évrard désigna les coques qui brillaient au soleil.
    — C’est là qu’est la fille du rabbin.

    Palais du Légat
Prison
    Une odeur grasse flottait encore sous la voûte. Le Légat l’avait sentie une fois quand il avait assisté à un bûcher dans le comté de Toulouse. Autour de lui, les soldats, des soudards qui ne vivaient pourtant que pour le pillage et le viol, n’avaient pas supporté. L’odeur, lourde et âcre, leur avait retourné les tripes. Lui était resté impassible au milieu des hurlements de souffrance et du parfum enivrant de la mort. Depuis, il ne ratait jamais l’opportunité de jouir d’un pareil spectacle.
    Pendu au crochet, le cadavre du geôlier avait grise mine. On dit que les corps brûlent de deux manières. Soit le feu, vif et rapide, les carbonise comme un morceau de charbon, soit il les dévore avec l’ardeur d’un affamé. C’est ce dernier sort qu’avait connu Arnault. Son enveloppe mortelle n’enveloppait plus rien. Elle avait fondu et s’était répandue d’abord sur la table pour dégouliner ensuite sur le sol en flaque brunâtre. Le Renard contempla la tête du geôlier encore attachée au crochet. Les dents brillaient sous les lèvres absentes.
    — Des nouvelles de Caïpha ?
    — La rafle est un succès. Plus de deux cents arrestations. Aucune résistance.
    — Et le peuple ?
    La voix du conseiller se fit onctueuse. Face au Légat, il retrouvait d’instinct ses habitudes serviles.
    — Il est à vos côtés, Monseigneur. Il applaudit votre coup de force et réclame que vous soyez sans pitié avec ceux qui ont crucifié le Sauveur.
    — Vous avez séparé les hommes ?
    — Oui, nous en avons dénombré plus de soixante. Des médecins, des orfèvres et, bien sûr, des usuriers…
    — Des rabbins ?
    — Trois, Monseigneur.
    — Isolez-les puis confiez-les aux mains expertes des tourmenteurs. Je veux savoir pourquoi les Templiers s’intéressent autant à eux.
    Le conseiller s’inclina.
    — Il en sera fait selon vos ordres.
    — Et en attendant…
    Les yeux brillants, le Renard contempla les orbites creusées de suie du geôlier.
    — … Fais savoir au Grand Maître que je veux le voir.

    Port de Caïpha
    Martin le jacquin revint s’asseoir auprès de ses compagnons d’infortune. Le soleil était désormais tombé et le port n’était plus éclairé que par la lueur vacillante des flambeaux devant l’entrée des tavernes. Parfois, une porte claquait et une odeur de vinasse, mêlée à une bordée d’injures, fusait dans l’obscurité. Un vent glacé s’était levé qui balayait la rade.
    Évrard rabaissa son chapeau entre ses oreilles et se coula près du Devin roulé dans une cape moisie. À côté, Roncelin dormait.
    — Alors, tu as des nouvelles ?
    — Avec le froid qu’il fait les tavernes sont pleines. La plupart des marins sont à terre et leurs bateaux amarrés à l’abri. Y compris les trois navires du Légat qui mouillent au levant de

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