Le templier déchu
main d’Alexandre dans la sienne.
Il s’agitait doucement, grognait et tournait la tête de gauche à droite, sans doute assailli par la douleur à mesure qu’il reprenait conscience.
Quelques moments passèrent dans un silence tendu. Et soudain, Alexandre entrouvrit un œil, puis le deuxième.
— Beth ? dit-il d’une voix éraillée.
— Oui, mon amour, je suis là, chuchota-t-elle.
Les larmes aux yeux, elle se pencha pour déposer un baiser sur sa joue. Il cilla et, après quelques secondes, sa belle bouche sensuelle se retroussa dans un soupçon de sourire qui provoqua un tel bonheur, un tel soulagement chez Elizabeth qu’elle se serait effondrée si elle n’avait été agenouillée.
— En voyant votre visage d’ange, j’ai bien cru que j’étais arrivé au paradis, coassa-t-il.
Elle réussit à contenir le sanglot qui lui gonflait la poitrine.
— Taisez-vous, canaille... et gardez-vous à l’avenir de me causer autant de souci, souffla-t-elle. Je vous avais demandé de ne pas revenir, mais il a fallu que vous n’en fassiez qu’à votre tête. N’espérez pas échapper à une punition méritée.
— J’attends ce moment avec impatience, assura-t-il en lui offrant un pauvre sourire.
Elle lui sourit à son tour, la vue brouillée par les larmes.
— Vous avez tort, rétorqua-t-elle. Quoi qu’il en soit, et grâce à Dieu, le pire semble être passé.
— Grâce à Dieu, en effet, acquiesça Damien qui posa la main sur le bras d’Alexandre dans un geste d’affection fraternelle. Tu nous as fait vivre de bien mauvais moments, je le confesse.
— Ne crois pas te débarrasser de moi aussi aisément, petit frère ! plaisanta Alexandre, mais la douleur altérait sa voix.
— Te rappelles-tu ce qui s’est passé ? intervint Richard.
— À peu près, oui. Je me souviens d’avoir pensé que cela faisait un mal de chien... et que j’aurais bien pu me passer de cette cautérisation que vous m’avez infligée ensuite.
Elizabeth saisit le gobelet qu’Annabelle venait de lui apporter et, le tenant d’une main ferme, l’approcha des lèvres d’Alexandre.
— Pouvez-vous redresser un peu la tête ?
Il acquiesça et elle l’aida à avaler quelques gorgées. Il grimaça, mais un peu de couleur revint à ses joues.
— Quelle est cette infâme potion ? demanda-t-il enfin en laissant retomber la tête sur sa couche.
— Un mélange de vin, de marjolaine, de fenouil et de jus d’ortie, expliqua-t-elle, secrètement soulagée qu’il ait assez de force pour se plaindre. Je vous en ai donné le plus possible au cours de la nuit. Cela atténue la douleur et aide à la guérison.
— Que je sois pendu si le remède n’est pas pire que le mal ! grommela-t-il.
— Écoute cette noble dame, Alexandre, et obéis-lui, lui conseilla Jean en réprimant un sourire. Il est évident qu’elle tient plus à ta maudite personne que tu n’y tiens toi-même.
Alexandre émit un son inintelligible. Manifestement gêné d’être ainsi au centre de l’attention générale, il tenta de se soulever sur les coudes. De nouveau, la douleur lui arracha une grimace.
— Doucement ! fit Richard. Attends une seconde, nous allons te donner un coup de main.
Les trois Templiers l’aidèrent à se redresser et glissèrent une couverture roulée derrière lui avant de lui appuyer le dos au mur.
— Je me sens mieux comme ça, avoua Alexandre une fois installé.
Puis, l’air irrité, il agita la main.
— Que faites-vous tous là à me dévisager ? Retournez donc à vos occupations et...
Il s’interrompit, comme s’il venait de recouvrer brutalement la mémoire, puis s’exclama :
— Mon Dieu, c’est vrai. Le siège ! Allons, aidez-moi, ajouta-t-il en s’efforçant de se lever.
— Restez tranquille ! lui enjoignit Elizabeth, qui s’était précipitée pour le retenir en même temps que Damien. Vous n’irez nulle part avant un bon moment, croyez-moi.
— Le siège est terminé, lui apprit Damien. Il a pris fin hier. Le comte d’Exford est mort au combat et son armée a été obligée de battre en retraite.
Alexandre ouvrit des yeux ronds.
— Si vite ? Comment est-ce possible ?
— C’est grâce â notre terrifiante réputation, bien sûr, répondit Richard, en feignant de prendre un air suffisant.
— Et à notre habileté indéniable ! renchérit Jean.
— C’est grâce à la somme de vos talents guerriers, intervint Elizabeth plus sérieusement. J’ai une dette envers
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