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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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sa nudité blanche, quasi espagnole, et que n’allégeait en rien le grand Christ émacié dont le tragique bois noir écartelait le mur derrière la princesse-nonne.
    Celle-ci, d’un signe de tête, répondit au salut du jeune homme et, tout de suite, demanda :
    — On me dit que la reine vous envoie, monsieur. Que me veut ma nièce à cette heure que l’on peut qualifier de tardive ou de matinale au choix ? Mais… si vous venez de Versailles, d’où vient que vous ne soyez point en tenue et que vous portiez la barbe ? Cela n’est pas d’usage chez les gardes du corps.
    Redressé de toute sa taille, Gilles prit une profonde respiration et se prépara pour le combat qu’il sentait venir. Il était plus facile d’imaginer, tout en galopant sur une grande route, l’entretien que l’on allait avoir avec une religieuse que de soutenir cet entretien quand l’abbesse en question était non seulement de sang royal mais encore auréolée au surplus d’une réputation déjà établie de sainteté. Ne disait-on pas que Louise de France avait choisi le renoncement afin d’expier, dans la prière et le sacrifice, les lourds péchés d’un père tendrement aimé ?
    — J’appartiens bien réellement à cette arme privilégiée, madame, mais je passe actuellement pour mort. C’est dire à Votre Altesse royale que je ne viens pas de Versailles et que, si j’ai osé m’annoncer comme venant de par la reine, mensonge dont je demande humblement pardon à Votre Altesse royale, c’est uniquement pour avoir l’honneur d’être reçu par elle. C’est aussi parce que Sa Majesté a quelque chose à voir dans l’affaire qui m’amène.
    La princesse ne marqua sa surprise qu’en relevant légèrement ses sourcils blonds au-dessus des yeux bleus, singulièrement perçants, qui scrutaient le visage immobile du jeune homme.
    — Vous ne manquez pas d’audace, monsieur. Savez-vous que je devrais vous faire jeter dehors sans entendre un mot de plus ?
    — Je savais ce que je risquais, madame… mais Votre Altesse n’en a rien fait jusqu’à présent et je la supplie de n’en rien faire car il y va du salut d’une âme… ou plutôt de deux âmes car la mienne s’y trouve aussi engagée.
    — Et fort mal engagée si j’en juge l’aplomb avec lequel vous maniez le mensonge. Eh bien, puisque je vous ai reçu autant vous entendre. J’avoue que vous avez réussi à piquer ma curiosité. N’avez-vous pas dit que vous passiez pour mort ? Qui résisterait à la nouveauté de converser avec un mort… mais quelle faute avez-vous donc commise, monsieur, qui ait nécessité votre disparition ?
    — Une grande faute, madame. J’ai le malheur de déplaire fort à Monseigneur le comte de Provence qui veut bien m’honorer de son inimitié. J’ajoute que, si je suis mort, je le suis sur ordre de Sa Majesté le roi !
    — Ah !
    Le menton dans la main, son autre main caressant doucement la grande croix d’or qui pendait sur son scapulaire de laine noire, Madame Louise semblait peser une à une les paroles de son visiteur.
    — Me dites-vous, cette fois, la vérité ? murmura-t-elle enfin.
    — Sur mon honneur de gentilhomme et ma foi de chrétien !
    — C’est bien ! Je ne vous demanderai donc pas le secret de cette mort étrange puisqu’il paraît être aussi celui du roi mon neveu. En revanche, j’attends de vous que vous m’appreniez enfin ce que vous venez faire ici…
    — Je viens supplier Votre Altesse royale de bien vouloir me rendre mon épouse, Judith de Tournemine de La Hunaudaye, entrée en cette maison par ordre de Monsieur sous le nom de Julie de Latour et sur laquelle Sa Majesté la reine a bien voulu étendre sa main souveraine et sa protection.
    Quittant la croix d’or, la main de la princesse vint frapper une liasse de papiers qui se trouvait sur la grande table de bois noir tandis que, sous la guimpe, son visage pâle rougissait brusquement.
    — Cette nuit est décidément la nuit des surprises, s’écria-t-elle sans parvenir à dissimuler une soudaine irritation, et j’entends ici des choses étranges. Vous dites que cette belle jeune femme si sombre, si secrète qu’elle n’a voulu se confier à personne ici, pas plus à moi qu’à notre confesseur, était mariée et mariée à vous ?
    — Nous nous sommes unis le 26 août de l’année dernière dans la chapelle de la Vierge à la cathédrale Saint-Louis de Versailles. Votre Altesse royale peut faire confirmer mes

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