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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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paroles. J’ajoute cependant que ma femme, de son lignage paternel, n’était pas de Latour mais de Saint-Mélaine. Au surplus, Madame a un moyen bien simple de se faire confirmer mes paroles : qu’elle fasse appeler la pseudo-Julie de Latour. Comme elle me croit mort elle aussi l’effet de surprise lui apprendra la vérité.
    — La faire appeler ? Mais, Monsieur, elle n’est plus ici depuis environ quatre mois puisque c’est, je crois, au lundi du second dimanche de Carême que la reine l’a envoyée chercher.
    — La… reine ? fit Gilles abasourdi. Madame, madame… Je supplie Votre Altesse royale de rappeler ses souvenirs. Est-elle bien sûre que la demande venait de la reine ?
    — Me prenez-vous pour une écervelée, monsieur ? Si je dis la reine c’est qu’il s’agit bien d’elle. Au surplus, j’avais reçu de ma nièce prière de ne rendre cette jeune femme à personne d’autre qu’à elle et, dans cet esprit, je l’avais déjà refusée à ma nièce de Provence qui, cependant, était venue en personne m’en faire la demande.
    — Et… la reine est venue elle-même ?
    — Ne soyez pas stupide ! Elle m’a envoyé l’une de ses proches, la comtesse Diane de Polignac avec une lettre de sa main. Je pense que vous n’avez rien à redire à cela ? Ce n’est donc pas à moi mais bien à la reine ma nièce qu’il faut aller redemander votre épouse, chevalier.
    Une cloche au son étouffé se mit à sonner quelque part dans les profondeurs du couvent et comme son visiteur, écrasé par cette nouvelle, ne faisait pas mine de bouger, la princesse se leva.
    — C’est aujourd’hui fête de sainte Clotilde, reine de France, mais demain nous célébrerons la Pentecôte. Nous avons vigile et jeûne et notre journée sera rude. Veuillez donc, monsieur, vous retirer et nous laisser à nos prières. Certaines seront dites à votre intention, car vous me semblez en avoir le plus grand besoin. Je vous donne le bonjour.
    Tout en parlant, elle agitait une petite sonnette placée près de sa main pour appeler la tourière. Lourdement, Gilles mit un genou en terre.
    — Que Votre Altesse me donne plutôt sa bénédiction, très révérende mère, afin qu’elle me garde de l’Enfer dans lequel je vais plonger en quittant cette sainte maison.
    Émue par la douleur qui vibrait dans la voix du jeune homme, Madame Louise leva la main.
    — Dieu vous garde ! murmura-t-elle.
    Mais, déjà, il s’était relevé, saluait profondément et s’élançait dans la galerie. Surprise par cette brusque sortie, la sœur tourière dut courir pour le rejoindre et le ramener jusqu’à la cour.
    Immobile au milieu de son cabinet, Madame Louise écouta décroître les pas rapides de son étrange visiteur puis, se tournant vers le grand Christ de la muraille, alla s’agenouiller un instant sur le prie-Dieu sans coussin disposé devant.
    — Daignez protéger ce malheureux garçon, Seigneur, car il a grand besoin de votre divine assistance. J’ai vu la mort au fond de ses yeux…
     
     
    À travers la plaine Saint-Denis où se montaient déjà les baraques de la fameuse foire du Lendit qui s’ouvrirait une semaine plus tard, le cheval de Gilles volait comme si la fureur qui habitait son cavalier lui était entrée dans le sang. Aveugle et sourd à ce qui n’était pas sa souffrance, ivre de colère, le jeune homme fonçait dans la nuit, hurlant sans même s’en rendre compte comme le supplicié sur la roue et semant la terreur chez les rares passants qui, persuadés d’avoir rencontré le Chasseur maudit en route vers l’abîme infernal, coururent s’agenouiller aux plus proches Montjoies 1 pour implorer la miséricorde divine…
    Enlevant son cheval, il franchit d’un saut magistral la barrière d’octroi, renversant deux gardes-françaises qui roulèrent dans la poussière et disparut dans l’obscurité dense projetée par les grands murs de Saint-Lazare. Mais, déjà, il ne criait plus. La violence de sa course et les gifles du vent frais qui venait de se lever lui faisaient du bien. Peu à peu, il réussit à se calmer, à se reprendre en main et même, arrivé à la petite chapelle Notre-Dame-de-Lorette, il s’arrêta, mit pied à terre. Il y avait là une fontaine dans l’eau de laquelle il alla plonger son visage brûlant.
    Quand il en sortit, après trois ou quatre immersions, il était redevenu lui-même c’est-à-dire capable de regarder en face l’écroulement de son plus beau rêve

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