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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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et cela pourrait vous être utile à l’avenir…
    Le procès-verbal dûment signé, on se sépara. Gilles repartit dans la voiture de Paul-Jones en dépit des yeux déçus d’Anne. Mais pouvait-il décemment demeurer sous le toit du mari de sa maîtresse et qui abritait, au surplus, l’homme qu’il avait peut-être tué ? En outre, Mme de Balbi se devait à ses hôtes. En songeant qu’elle allait finir sa nuit dans les austères occupations d’une infirmière bénévole, Gilles ne put s’empêcher de sourire. De toute évidence ce n’était pas cela qu’elle avait imaginé. Lui-même non plus d’ailleurs. Il avait espéré que ce duel stupide prendrait fin sur une égratinure pour l’un ou l’autre et qu’en tout état de cause le vaincu serait reparti sur ses pieds.
    Le trajet entre le Luxembourg et la rue du Bac où logeait Tournemine était court. Les deux hommes l’accomplirent en silence et ce fut seulement quand sa voiture s’arrêta devant la maison du jeune homme que l’Américain se décida à ouvrir la bouche.
    — Voulez-vous un bon conseil, Vaughan ? Faites vos bagages et partez avec moi.
    — J’apprécie votre sollicitude, amiral, mais je ne vois vraiment pas pourquoi je devrais m’enfuir. Car c’est cela, n’est-ce pas, que suggère votre proposition ? Est-ce que, par hasard, vous prendriez au sérieux les menaces de ce Cavalcanti ?
    — Peut-être. Voyez-vous, mon ami, je connais le monde et les hommes mieux que vous. On ne peut vous le reprocher car vous êtes encore très jeune. Moi, je suis largement votre aîné et, en outre, j’ai beaucoup navigué déjà. Je ne vous reparlerai pas de ce qui s’est passé ce soir, chez Mme de Kernoa. J’en ai été profondément choqué mais, à mieux vous examiner durant tout ce qui a suivi, j’en suis venu à penser que vous aviez peut-être une raison valable puisque vous semblez connaître son passé…
    — Je le connais, en effet. Et puisque vous voulez bien vous intéresser à moi en dépit du scandale de tout à l’heure, je vous supplie de croire que je n’avais pas bu et que j’avais la meilleure des raisons… une raison qui, un moment, m’a soufflé l’envie de me laisser tuer par ce Caramanico…
    — Je suis heureux que cette envie vous soit passée et c’est pourquoi je vous mets, à présent, en garde. Si votre adversaire meurt… et même s’il ne meurt pas car je le crois tout de même gravement atteint, vous allez vous trouver confronté à deux problèmes : d’abord la situation difficile que vous allez créer à notre ministre Thomas Jefferson car les gens des Deux-Siciles vont se hâter de présenter cela comme une atteinte directe de l’Amérique à leur patrie…
    — Je ne vois pas où est le problème. M. Jefferson peut parfaitement me désavouer. Il s’agit d’une affaire privée.
    — Sans doute mais vous ne connaissez pas ces gens-là. Le second problème est plus grave encore : vous risquez tout simplement d’être assassiné un beau soir en rentrant chez vous.
    — Comment ? Assassiné ?
    — Mais oui. D’étranges lois non écrites existent en Sicile constituant, comme en Corse d’ailleurs, un code d’honneur tout à fait particulier. Les Siciliens forment des clans et quiconque attente à la vie ou à l’honneur d’un membre de ces clans, surtout s’il s’agit d’un chef, doit le payer de son sang. Ils sont d’autant plus dangereux qu’ils se cachent sous tous les masques possibles et que certains sont de véritables bandits ne reculant devant rien pour atteindre le but fixé. Ils ont aussi des hommes de main dont le fanatisme aveugle ne raisonne jamais. Ce sont des machines à tuer, un point c’est tout. Venez-vous avec moi ?
    Gilles sourit, hocha la tête.
    — C’est impossible… mais je vous remercie de l’intention, de l’aide, et de l’avis. Soyez sans crainte, je me garderai… Bon voyage, amiral ! Un jour, prochain peut-être, nous nous retrouverons outre-Atlantique. Dieu vous garde !
    Sur une brève mais chaude poignée de main, le chevalier sauta de la voiture et rentra chez lui puis, du seuil, regarda s’éloigner l’attelage dans la lumière grise du petit matin.
    1 .  Minuscules reposoirs votifs qui jalonnaient la route royale de Saint-Denis.
    2 .  Voir le Gerfaut des brumes , tome I.

CHAPITRE XII
    À LA CROISÉE DES CHEMINS
    En rentrant chez lui Gilles, pensant qu’il avait besoin de retrouver des idées claires pour faire face aux

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