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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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Tournemine, que le roi m’a défrayé de tout ce que j’ai pu dépenser pour vous, que vous ne me devez rien… qu’un peu d’amitié si vous le jugez bon.
    — Cela va de soi, mais enfin…
    — Pas un mot de plus là-dessus, vous m’offenseriez ! Voyez-vous, mes dettes montent à un tel chiffre que votre offre généreuse s’y noierait… mais je vous sais gré infini de l’avoir faite. Je ne l’oublierai pas. Rassurez-vous d’ailleurs, se hâta-t-il d’ajouter en arrêtant le geste de protestation du chevalier, je viens d’en écrire à M. de Calonne et, en outre, mon ami le banquier Baudard de Saint James pense pouvoir venir à mon secours. Ainsi, installez-vous sans remords et forgez-vous des armes. Monsieur est un gibier coriace : la lutte sera longue, peut-être mortelle.
    Sans plus tarder, Gilles s’était mis à la recherche du logis souhaité. Il l’avait trouvé très vite, grâce à Tim qui habitait la pension de la veuve Saint-Hilaire rue du Bac, dans une dépendance de l’ancien hôtel du financier Samuel Bernard où un bel appartement, donnant sur jardin, et des écuries lui avaient été loués pour trois cents livres par semestre.
    Ceci fait, il s’était hâté de courir à Senlis afin d’en ramener Pongo dont l’absence lui pesait étrangement. Tout le long du chemin il s’était demandé ce que Préville avait bien pu en faire mais le résultat dépassa ses espérances quand il vit s’avancer vers lui et s’incliner silencieusement, bras croisés sur sa poitrine, un personnage enturbanné de blanc, vêtu d’une sorte de redingote de soie vert sombre brodée ton sur ton et arborant, à la manière des Sikhs musulmans, une arrogante moustache et une barbe épaisse roulée autour du visage dans un petit filet.
    — Vous m’avez laissé un Indien des Indes occidentales, expliqua Préville qui jouissait visiblement de sa surprise, je vous rends un Indien des Grandes Indes orientales. Personne ne s’étonnera de voir un navigateur américain habitué à bourlinguer aussi bien en Atlantique qu’en océan Indien, flanqué d’un serviteur récupéré quelque part sur les côtes de Malabar ou de Coromandel. Il est étonnant d’ailleurs de constater combien les vêtements de l’homme du Levant conviennent à celui de l’Occident…
    Préville avait raison. En s’installant rue du Bac, Gilles constata que la curiosité soulevée par Pongo était somme toute assez discrète. Dans ce quartier aristocratique où les serviteurs noirs ou café au lait étaient nombreux et déambulaient dans des costumes empruntés directement au répertoire de l’Opéra ou de la Comédie-Française, le lévite sombre et le turban blanc de l’Indien se révélaient plutôt discrets auprès de certains fantastiques accoutrements. Pongo s’était d’ailleurs introduit dans son nouveau personnage avec une autorité remarquable et, sans ses longues incisives que le sourire découvrait largement lorsqu’il était seul avec son maître, celui-ci aurait eu parfois quelque peine à le reconnaître.
    — Pongo très content, déclara-t-il dès leur réunion. Costume beaucoup plus joli et confortable que triste équipement européen, et ridicule perruque qui gratte…
    La maison fut vite montée. Promu au rang de maître d’hôtel à tout faire, Pongo s’empara de la cuisine, tolérant de justesse deux femmes du quartier pour le ménage, le travail de l’écurie et du jardin étant assuré par le personnel du fermier-général de Boulongne, propriétaire de l’hôtel Bernard et avec lequel John Vaughan avait conclu un arrangement. Mais une écurie ne se concevant qu’habitée par un ou plusieurs chevaux, Gilles s’en alla au marché aux chevaux acheter une monture pour Pongo et lui confia une première mission : aller droit à Versailles, nanti de deux lettres : l’une pour l’excellente Marguerite Marjon, l’autre destinée à Winkleried qui la trouverait à son retour de Fontainebleau, et en revenir avec Merlin, le bel alezan doré, dont la privation avait été presque aussi cruelle au chevalier que celle de sa liberté depuis son arrestation. Pour lui, Merlin était un ami fidèle, doué d’une personnalité bien à lui et, durant les quelques heures pendant lesquelles Pongo mena à bien son ambassade, Gilles arpenta fébrilement son vestibule avec des impatiences d’amant attendant une maîtresse adorée.
    La réunion fut émouvante. Le nouvel aspect de son maître ne trompa pas

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