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Le Troisième Reich, T1

Le Troisième Reich, T1

Titel: Le Troisième Reich, T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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s'expliquer
entièrement par la malchance. Ils avaient eu l'occasion de s'emparer de
l'Allemagne en novembre 1918 et d'établir un régime fondé sur ce qu'ils avaient
toujours prôné : la social-démocratie. Mais il leur manquait l'esprit de
décision. Aujourd'hui, à l'aube de la troisième décennie du siècle, c'était un
parti las, défaitiste, dominé par des hommes âgés, pleins de bonnes intentions,
mais pour la plupart médiocres. Ils étaient tous fidèles à la République, mais
en définitive trop brouillons, trop timides pour prendre les grands risques qui
seuls auraient pu la sauver, comme ils l'avaient bien montré par leur
incapacité à agir quand Papen dépêcha un peloton de soldats pour détruire le
gouvernement constitutionnel de Prusse.
    Entre la Gauche et la Droite, il manquait à l'Allemagne une
classe moyenne politiquement puissante, qui dans d'autres pays — en France, en
Angleterre, aux États-Unis — s'était révélée l'épine dorsale de la démocratie.
Dans la première année de la République, les partis bourgeois, les démocrates,
le Parti du Peuple, le Centre, avaient accueilli un total de 12 millions de
voix, seulement 2 millions de moins que les deux groupes socialistes. Mais,
après cela, leurs forces avaient décliné à mesure que leurs supporters
rejoignaient Hitler et les nationalistes. En 1919, les démocrates avaient 74
membres au Reichstag; en 1932, ils n'avaient plus que 2 sièges.
    Le Parti du Peuple passa de 62 sièges en 1920 à 11 en 1932. Seul
le centre catholique garda ses électeurs jusqu'au bout. Dès les premières
élections républicaines de 1919, le Centre avait 71 députés au Reichstag, en
1932, il en avait 70. Mais plus encore que les sociaux-démocrates, le Parti du
Centre depuis Bismarck avait été essentiellement opportuniste, soutenant tout
gouvernement qui faisait des concessions aux intérêts qu'il défendait. Et, bien
que le parti semblât fidèle à la République, et disposé à en défendre les
principes démocratiques, ses chefs, on l'a vu, négociaient avec les nazis pour
donner à Hitler la Chancellerie avant d'être dépassés par Papen et les
nationalistes.
    Si la République allemande était dépourvue d'une classe
politique aux vues modérées, elle n'avait pas non plus la stabilité
qu'apportait dans d'autres pays un parti conservateur authentique. Les
nationalistes allemands à leur summum, en 1924, avaient recueilli 6 millions de
voix et obtenu 103 sièges au Reichstag, où ils constituaient le second parti
par ordre d'importance. Mais alors, comme presque toujours durant le régime de
Weimar, ils refusèrent de prendre une position responsable, soit dans le
gouvernement, soit dans l'opposition, ne faisant exception que pour participer
à deux cabinets éphémères dans les années 20. Ce que voulait la Droite
allemande, dont les voix allaient essentiellement aux nationalistes, c'était
mettre un terme à la République et revenir à une Allemagne impériale, où tous
leurs anciens privilèges leur seraient rendus.
    En fait, la République avait traité la Droite, qu'il s'agisse
d'individus ou de classes, avec la plus totale générosité et, quand on songeait
au but poursuivi par la Droite, avec une exceptionnelle tolérance. La
République, on l'a vu, avait permis à l'armée de maintenir un État dans l'État,
aux hommes d'affaires et aux banquiers de réaliser d'énormes bénéfices, aux
junkers de conserver leurs propriétés déficitaires grâce à des prêts
gouvernementaux qui n'étaient jamais remboursés et rarement utilisés pour
l'amélioration des terres. Pourtant, cette générosité n'avait acquis à la
République ni leur reconnaissance ni leur fidélité. Avec une étroitesse
d'esprit et un aveuglement qui, avec le recul du temps, semblent inconcevables
à l'auteur de ces lignes, les électeurs de Droite n'avaient cessé de saper les
fondations de la République jusqu'au moment où, alliés à Hitler, ils l'avaient
renversée.
    Les classes conservatrices crurent avoir trouvé chez cet ancien
vagabond autrichien un homme qui, tout en restant leur prisonnier, les aiderait
à atteindre leur but. La destruction de la République n'était que la première
étape. Ce qu'ils voulaient alors, c'était une Allemagne autoritaire qui, à
l'intérieur, mettrait un terme à cette « absurdité » démocratique, ainsi qu'au
pouvoir des syndicats, et qui, à l'extérieur, annulerait le verdict de 1918,
ferait tomber les chaînes

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