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Le Troisième Reich, T1

Le Troisième Reich, T1

Titel: Le Troisième Reich, T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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discuter
quoi que ce soit. Je n'y changerai pas un iota. Ou bien vous le signerez tel
qu'il est et vous en remplirez les conditions dans un délai de trois jours, ou
bien j'ordonnerai à mes troupes d'entrer en Autriche.
    Schuschnigg capitula. Il dit à Hitler qu'il acceptait de signer.
Mais il lui rappela qu'aux termes de la constitution autrichienne, seul le
président de la République possédait le pouvoir légal pour accepter et exécuter
un tel accord. Par conséquent, il consentait bien à demander au président de
l'accepter, mais il ne pouvait se porter garant de cet assentiment.
    « Il le faut pourtant! cria Hitler.
    — Cela m'est tout à fait impossible, monsieur le chancelier »,
répondit Schuschnigg (10).
    A ce moment, a raconté plus tard Schuschnigg, Hitler parut
perdre son sang-froid. Il courut à la porte, l'ouvrit et cria : « Général
Keitel! » Puis, se retournant vers moi, il dit : « Je vous ferai appeler plus
tard (11). »
    Ce n'était que du bluff, mais le chancelier autrichien, harassé,
à qui toute la journée on avait pris soin de rappeler la présence des généraux,
l'ignorait peut-être. Papen rapporte que Keitel lui raconta par la suite
qu'Hitler l'accueillit avec un large sourire quand il se précipita pour lui
demander ses instructions : « Je n'ai pas d'instructions à vous donner, ricana Hitler,
je voulais seulement que vous soyez auprès de moi. »
    Mais Schuschnigg et le docteur Schmidt qui attendaient dans
l'antichambre du cabinet du Führer étaient très impressionnés. Schuschnigg
murmura qu'il ne serait pas surpris si dans cinq minutes on venait les arrêter.
Une demi-heure plus tard il était à nouveau introduit auprès d'Hitler.
    J'ai décidé de changer d'avis — pour la première fois de ma
vie, dit Hitler. Mais je vous en préviens, c'est votre dernière chance. Je vous
donne trois jours de plus pour exécuter l'accord (12).
    Telles étaient donc les concessions consenties par le dictateur
allemand et, bien que les termes du texte final fussent quelque peu adoucis, il
ne s'agissait, Schuschnigg l'a affirmé plus tard, que de changements
insignifiants. Il signa. C'était l'arrêt de mort de l'Autriche.
    La conduite des hommes quand ils sont soumis à la violence
diffère selon leur caractère, et elle est souvent déroutante. Que Schuschnigg,
rompu aux vicissitudes de la politique, malgré sa jeunesse relative, et qui
avait vu son prédécesseur assassiné par les nazis, fût un homme courageux, on
n'en saurait guère douter. Pourtant sa capitulation devant Hitler le 11 février
1938, sous la terrible menace d'une attaque armée, a laissé subsister quelques
doutes dans l'esprit de ses compatriotes, dans celui aussi des observateurs et
des historiens de cette fatale période.
    La capitulation était-elle nécessaire? N'y avait-il pas d'autre
issue? Certes, il faudrait être bien téméraire pour affirmer que la
Grande-Bretagne et la France, si l'on s'en réfère à leur conduite ultérieure en
présence de nouvelles agressions hitlériennes, seraient venues au secours de
l'Autriche, au cas où Hitler l'aurait dès cet instant envahie. Mais à ce moment
Hitler n'avait pas encore franchi les frontières de l'Allemagne, il n'avait pas
encore préparé son peuple et le monde à accepter sans révolte un acte
d'agression aussi éhontée. L'armée allemande elle-même était à peine prête, au
cas où la Grande-Bretagne et la France seraient intervenues.
    Quelques semaines plus tard, l'Autriche, à la suite de «
l'accord » de Berchtesgaden, serait gagnée par la propagande des nazis locaux,
et les machinations allemandes auraient si bien réussi que Hitler pourrait
s'emparer du pays sans que les risques d'intervention fussent beaucoup plus
grands que le 11 février. Schuschnigg lui-même a reconnu que l'acceptation des
conditions posées par Hitler « entraînait la suppression définitive de
l'indépendance du gouvernement autrichien ».
    Peut-être demeurait-il comme hébété à la suite de l'épreuve
qu'il venait de subir. Après avoir signé, le couteau sous la gorge, le document
qui anéantissait l'indépendance de son pays, il eut avec Hitler une étrange
conversation, qu'il a lui-même rapportée dans son livre : « Le chancelier,
demanda-t-il, croit-il que les graves problèmes qui se posent dans le monde
d'aujourd'hui pourraient être réglés de façon pacifique? » Le Führer répondit d'un air suffisant : « Oui, si mes avis étaient suivis. »

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