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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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roi devina les pensées de la
baronne. Sans doute avait-elle pensé qu’il descendrait à cette bassesse
consistant à ne point récompenser ses mérites dès lors qu’elle lui avait refusé
son corps, et se trouvait-elle à présent en agréable surprise. Il aima le
regard qu’elle porta sur lui, car ce regard le grandissait à lui-même. Elle lui
refusait son amour mais lui donnait son estime, il n’avait donc point tout
perdu.
    Détendu, il lui sourit.
    — Ne me remerciez point, madame. Dites-moi
plutôt, car ma curiosité est grande, quelle sorte d’homme peut ravir votre cœur
si farouche.
    — Sire, vous serez le premier à l’apprendre
et cet homme lui-même n’en est point avisé. Au reste, le serait-il, il en
ferait sans doute peu de cas.
    — Ce serait chose bien injuste. Quel est
cet homme ?
    — Il est, Votre Majesté, telle une
légende dont on parle durant des siècles à ceci près qu’il est bien vivant.
    Une pointe de jalousie vint chatouiller Henri
quatrième car il eût aimé qu’on discourût ainsi de lui et pensait d’autre part
qu’il n’était autre légende en le royaume que lui-même.
    Qui d’autre ?
    Curieux et impatient, il insista :
    — Ah çà, son nom, madame.
    Souriante et brusquement rêveuse, comme
alanguie, Isabelle de Guinzan répondit :
    — Votre superbe amiral des mers du Levant,
Sire, Thomas de Pomonne, comte de Nissac.
    Henri quatrième donna grand coup de pied en un
des murs et lança :
    — Toujours lui !… Ah çà, il les lui
faut donc toutes ?…
    Mais, une fois encore, il ne souhaita surtout
pas entrer en le détail des choses bien que le regard de la baronne belle et
rebelle l’en priât avec force.
    Il raccompagna Isabelle de Guinzan et, une
fois seul, murmura rageusement :
    — Nissac !… Nissac !… Nissac !…
Nissac qui prend le cœur des femmes que je désire et n’ai point toujours la
chance de mettre en ma couche !
    Sous effet de nouvel accès de colère, il donna
coup de pied rageur en une chaise et médita d’améliorer sa vengeance.
    Avant que de savoir que l’amiral chavirait
ainsi le cœur des femmes, y compris sa propre maîtresse et celle qu’il
convoitait, et au seul souvenir amer de la mal aventure de Fontaine-Française, Henri
quatrième avait préparé avec soin affaire délicate où il fallait courage, ruse
et chance. Et Bassompierre lui-même, militaire de grand talent connu pour sa
clairvoyance et son grand courage, avait commenté la chose ainsi :
    — C’est fort cruel, Sire. Monsieur de
Nissac n’en reviendra pas, ni lui ni son vaillant équipage. Persister à vouloir
risquer l’amiral, ses officiers et ses hommes en si chaude affaire, c’est l’envoyer
à la mort en un combat perdu avant que d’être livré.
    Henri quatrième savait bien que le futur
maréchal n’avait point tort mais il ne pouvait supporter de vivre avec l’idée
que son prestige dépendait de la discrétion d’un homme qu’il connaissait si peu.
    Certes, il faisait montre d’injustice et en
avait la claire conscience mais, une fois encore, il eut la certitude que, Nissac
mort, sa vie serait plus tranquille et sa dynastie assurée.
    Henri quatrième fut cependant pris d’un tardif
scrupule. Il se rappelait en le port de Toulon l’arrivée de ce beau Dragon
Vert tirant captifs deux magnifiques galions plus lourds que lui. Il se
souvint du pavillon royal claquant au plus haut mât, de ces fleurs de lys sur
fond de ciel d’azur. Il se souvint du bon peuple en liesse…
    Qui, en le royaume, le servait avec tels
discrétion, courage et modestie ?
    Mais il se souvint, avec déplaisir cette fois,
que les femmes présentes sur le port se pâmaient, certaines feignant de s’évanouir
à la vue du commandant du Dragon Vert.
    Il revoyait parfaitement cette silhouette
haute et mince, le sabre au côté, le chapeau à plumes, l’immobilité de l’amiral…
    En la conscience du roi, la jalousie l’emporta
sur la reconnaissance et si ce fut finalement de bien peu, cela ne changeait
rien au résultat.
    Le roi avait préparé mission dont on ne
revient pas. Et si Nissac, ce diable d’homme, y survivait tout de même, autre
mission l’attendait, plus terrible encore.
    — Il en sera ainsi, car telle est ma
volonté de le savoir enfin mort !… lança le roi en le silence de la pièce,
s’apprêtant à recevoir son second visiteur.

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    Avec attitudes de comploteurs dont ils n’avaient
point conscience, les deux hommes, à demi

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