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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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se
distinguait fort bien car remontant déjà, en son origine, à plusieurs mois.
    Chacun prodiguait ses conseils et avis, bien
qu’il fût à présent un peu tard pour annuler la cérémonie ou changer de jeune
fille, mais marins du Dragon Vert ne s’encombraient point de semblables
considérations.
    Paray des Ormeaux, Fey des Étangs et
Sousseyrac, qu’on appelait en le bord « les trois inséparables barons »
au motif qu’ils ne se quittaient que pour les affaires de service et
connivaient souvente fois ensemble, écoutaient certains marins, butinant leur
plaisir en entendant choses toutes plus idiotes les unes que les autres.
    Le baron Sousseyrac proposa :
    — Allons écouter les superstitieux.
    — Non, c’est davantage que je n’en puis
supporter !… grimaça Paray des Ormeaux.
    On se tourna donc vers Fey des Étangs car se
trouver trois amis, nombre impair, permet toujours de prendre décision.
    Le jeune baron, qui avait passé nuit épuisante
avec deux sœurs qui ne se voulurent point départager quant à savoir celle qui
serait sa maîtresse, si bien qu’elles le furent toutes deux ensemble, songea
que c’était là occasion d’une diversion à sa fatigue.
    — Pourquoi non ?… Il est rassurant
de voir et écouter hommes dont on a la certitude qu’ils sont plus stupides que
vous. En outre, ils croient ce qu’ils racontent, ce qui ajoute au plaisir de
les entendre.
    Des Ormeaux, le second, dut en convenir :
    — C’est qu’ils n’inventent rien. J’ai ouï
ailleurs et en d’autres temps semblables niaiseries et en ai même lue en des
livres.
    — Mais aujourd’hui, dit Sousseyrac, ils
parleront du mariage et nous n’avons point eu encore privilège de les entendre
sur pareil sujet.
    Cette fois unanime, le trio d’officiers s’approcha
de deux marins se tenant un peu à l’écart. Noirauds tous deux, et semblablement
de petite taille, ils regardaient les mariés et parlaient à mi-voix, d’un ton
uni qui pourtant se révélait fatigant à la longue.
    Ne semblant point dérangés par l’arrivée des
officiers, ou s’en accommodant, ils poursuivirent leur conversation, l’un d’eux
secouant la tête.
    — C’est là fausseté !
    À quoi son compagnon répondit :
    — Il faut choisir avec soin la femme qu’on
épouse, et y réfléchir même avant que de la voir ou de faire ce maudit choix. Pour
savoir si l’affaire est bonne, il faut, la veille de la Saint-André, s’arrêter
devant la porte d’une étable où une truie allaite ses petits. Il est nécessaire
de frapper à la porte au douzième coup de minuit. Si la truie grogne la
première, il est sage d’épouser une veuve. Si c’est les petits, on marie une
vierge. Voilà, c’est ainsi qu’il faut prendre femme.
    L’autre réfléchit un instant, puis :
    — La méthode n’est point certaine !…
Ce qui est plus éprouvé, c’est qu’il ne faut pas se marier un mercredi, sinon
le mari sera cocu. Et en le jour du mariage, ne point avoir bu de vin, ou les
enfants à naître seraient muets. Si un cierge s’éteint avant la fin de la messe,
un des mariés meurt dans l’année et celui des deux dont la main est la plus
froide, celui-là trépassera avant l’autre. Ah, mais c’est que la chose est
prouvée !
    Celui qui lui faisait face ne sembla point
convaincu.
    — J’ai en effet ouï dire ces choses, qui
semblent le fait de gens n’ayant point toute leur tête. Une autre méthode est
plus certaine, et vérifiée de longtemps. Ainsi, quand les parents s’en vont
faire la demande, il n’est que deux choses possibles en l’avenir.
    — Bon ou mauvais mariage !… approuva
l’autre.
    Son interlocuteur hocha la tête et reprit :
    — Le mariage sera mauvais si, sur le
chemin de la maison de la mariée, les parents du marié croisent femme échevelée,
lézard, moine, stropiat, lièvre, aveugle ou serpent. Plus grave encore : si
le lièvre éternue, il faut rentrer chez soi en courant !… Et le mariage
sera en bonne réussite si l’on entend coup de tonnerre ou croise un pigeon, une
cigale ou une chèvre.
    Feignant de trouver grand intérêt à cette
conversation, monsieur de Sousseyrac intervint :
    — Tout cela est fort beau mais qu’arrive-t-il
si sur le chemin de la maison de la mariée, parents du marié croisent mouton à
deux têtes ou bouc à sept pattes ?
    Les deux noirauds se regardèrent. Leurs yeux
brillaient, et on les sentait tout soudainement en grand bonheur proche

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