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Le Voleur de vent

Le Voleur de vent

Titel: Le Voleur de vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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barbaresques au mouillage. Cette
attaque lui fut attribuée, des pêcheurs ayant distingué la proue d’un dragon
vert mais loin de susciter un désir de poursuite chez les pirates, ceux-ci
restèrent terrés, ne croyant point que Nissac puisse entreprendre seul action
aussi téméraire et estimant tout au contraire qu’il cherchait à les attirer
dans quelque piège dont ils louèrent leur intelligence de les avoir ainsi
détournés.
    De cette manière, le comte de Nissac eut la
tranquillité qu’il cherchait quand l’équipage se trouvait ivre de fierté d’avoir
ainsi canonné Alger dont le nom faisait trembler les armateurs et nombre de
marins.
    Bien que ce ne fût point le but de ce voyage, l’amiral
de Nissac arraisonna encore un navire léger. Il n’eut point du tout à combattre.
S’approchant, il effectua cercle serré autour du navire qui battait pavillon
noir et fit feu de toutes ses pièces : trente-six canons réglementaires, seize
couleuvrines sur le pont principal, douze demi-couleuvrines sur le pont
supérieur, à quoi s’ajoutait toute l’artillerie de supplément. Mais, chose fort
curieuse, les boulets tombaient tous, et avec précision, à une toise de la
coque si bien que le capitaine adverse, qui n’était point sot, comprit qu’il s’agissait
là de sérieuse semonce.
    Aussitôt, il se rendit.
    Étrange capitaine, qui n’était point pirate
mais commerçait avec eux et se protégeait à l’aide du pavillon noir. Ainsi
venait-il d’acheter aux barbaresques cargaison volée pour la revendre en Espagne.
    Nissac l’interrogea :
    — Ainsi, monsieur, vous naviguez sous le
drapeau noir ?… Vous serez donc pendu à la grand-vergue.
    L’homme, un Espagnol de petite taille, protesta :
    — Mais point du tout, señor Amiral. Yè
souis espanol et plous près de nos côtes, yé navigue sous el pavillonne d’el
Rey de España.
    Nissac affecta d’être peiné.
    — C’est plus grave encore, monsieur. Vous
serez donc pendu, décroché et rependu pour piraterie et avoir trompé la marine
royale sur vos pavillons. Au reste, c’est bien là mœurs de barbaresques.
    — Mais yé souis espanol, señor Amiral.
    — Nous allons vers la guerre avec l’Espagne.
En avançant la besogne, et vous pendant sur l’instant, je vous fais gagner du
temps. Marquez-m’en reconnaissance.
    L’homme ne se démontait point, ce qui amusait
Nissac, Isabelle et tout l’équipage. Il se frappa le crâne du poing.
    — Ma, pourquoi ai-ze dit qué yé souis
oune Espagnol ?… Yé les déteste, les Espanols. Mais c’est oune habitoude. En
vérité, yé suis inglese. Si !
    Nissac se tourna vers le second :
    — Tiens, un nouvel Anglais tel ce
capitaine William Pelhman que nous venons de noyer comme un rat. Notez l’étrangeté
de la chose, monsieur des Ormeaux.
    Celui-ci hocha gravement la tête.
    — La période n’est point faste pour l’Angleterre :
un noyé et un pendu !
    Le capitaine espagnol, qui se croyait perdu, pleura
et Nissac, qui n’aimait point voir pleurer un homme, cessa aussitôt le jeu.
    — C’est bon, capitaine, vous aurez la vie
sauve si de grâce vous cessez de vous lamenter. Votre bateau, que mon devoir
devrait me faire obligation de couler incontinent, sera épargné. Mais la
cargaison est saisie au profit du roi de France et de sa Marine.
    Nissac, qui était subtil, nota le regard rusé
de l’Espagnol heureux de sauver sa vie par petite comédie des larmes mais il ne
lui déplaisait point d’être joué pourvu que ce fût avec talent.
    Peu après, on transporta sur Le Dragon Vert porcelaine chinoise, poivre, noix de muscade, clous de girofle, coriandre, cannelle,
gingembre, toutes choses provenant sans doute d’un malheureux navire anglais ou
hollandais… mais qui, remises au cuisinier et à ses aides, améliora les repas
de l’équipage.
    Le Dragon Vert passa Gibraltar par une nuit sans lune et sans éveiller l’attention des
Espagnols.

60
    Comme il est bien connu depuis les temps les
plus anciens que l’héliotrope se tourne toujours vers le soleil, le regard de
la baronne allait irrésistiblement vers la dunette où se tenait, lointain car
perdu en ses pensées, l’amiral de Nissac. Et Isabelle de Guinzan de penser :
« Tant plus je le regarde, et plus je l’aime ! »
    Devinant le comte en grande solitude, même
lorsqu’on l’entourait, elle se sentait émue et la simple vision de cet homme la
bouleversait.
    Dès qu’il apparaissait sur le pont,

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