L’élixir du diable
d’autres chimistes envolés.
Je regardai de nouveau autour de moi et, à côté d’une des menottes, un reflet attira mon attention. Je me baissai. Un verre de contact.
Je le montrai à Villaverde et, comme il avait des gants, il le ramassa et le glissa dans un sac à indices.
Je réfléchis. Ceux qui avaient été détenus dans ce sous-sol n’avaient peut-être rien à voir avec Michelle, ni avec les chercheurs kidnappés, ni même avec la fusillade du rez-de-chaussée, et il s’agissait peut-être d’une autre affaire dans laquelle les motards étaient mouillés. La coïncidence me troublait, toutefois. La bande se serait occupée de tant de choses en même temps, tel un jongleur ayant plusieurs balles en l’air ? Ça me semblait improbable. Je me demandai si la tuerie d’en haut n’était pas liée à ceux qu’on avait nourris de hamburgers en bas et si, en ce cas, il n’y avait pas un rapport avec Michelle. Il restait trop d’inconnues dans l’équation. Pour la résoudre, il fallait trouver qui avait embauché les motards et cela me fit penser à un autre détail.
— Tu m’as dit que c’était la section mère du club, ici ? dis-je à Villaverde pendant que nous remontions l’escalier.
— Ouais, pourquoi ?
— Donc, il y a d’autres sections ?
— Quelques-unes.
Il fit défiler de nouveau le dossier de l’ATF sur l’écran de son portable.
— On y est… Le club a trois autres sections dispersées en Californie et, étrangement…
Il releva la tête.
— … une quatrième en Hollande. En Europe.
— Il faut joindre les plus proches, celles avec lesquelles ils avaient sans doute le plus de contacts. Leurs membres pourraient savoir pour qui ces types travaillaient.
Il plissa le front d’un air sceptique.
— D’accord, mais quand un club fait du business de ce genre, c’est compartimenté. Je doute que les autres sections soient au courant de ce que faisait celle-ci. Et si elles l’étaient, elles ne sont sûrement pas prêtes à nous en parler.
— Peut-être qu’après ce qui vient de se passer ici…
— C’est pas dans leur ADN, estima-t-il.
Je tournai la tête en direction du garage.
— Et les aspirants ? Même s’ils ne sont pas encore dans les secrets du club, l’un d’eux aurait pu surprendre une conversation et savoir quelque chose sur les types emprisonnés en bas…
— Absolument, approuva Villaverde. Ils sont déjà bien secoués, ça devrait nous aider à leur foutre suffisamment la trouille pour qu’ils parlent.
En regagnant la salle principale avec lui, je vis de nouveau les corps ensanglantés et cela me fit penser à la Mouche, Scrape. J’avais un mauvais pressentiment, le concernant.
— Il faut qu’on trouve rapidement Scrape, soulignai-je.
— Son dossier indique son dernier domicile connu, sa dernière copine en date, l’adresse de ses parents. On aura bientôt quelque chose.
Je songeai à sa blessure à l’épaule.
— Il a sûrement appelé ici pour prévenir ses potes de ce qui était arrivé au terminal. Ce qui veut dire que les psychopathes auteurs de cette hécatombe savent qu’il existe. Et peut-être même où il est susceptible de se rendre. Ils ont liquidé tous ces types, ils ont sans doute l’intention de le supprimer aussi. Il faut faire vite.
Je sentais un sentiment de frustration monter en moi. Nous devions absolument le retrouver. Il y avait de bonnes chances pour qu’il puisse nous apprendre ce qui se passait, et qui étaient les nouveaux venus dans la danse.
Il y eut alors un remue-ménage devant l’entrée du club-house.
— Non, m’dame, protestait un homme en élevant la voix. Vous pouvez pas…
— Me dites pas ce que je peux faire ou pas, le coupa une femme avec véhémence. C’est la boîte de mon mari et je veux le voir !
Deux policiers apparurent dans l’encadrement de la porte, essayant – sans succès – d’empêcher une femme de passer entre eux. Elle leur échappa et se rua dans la salle. La quarantaine, des formes rondes et des cheveux auburn veinés de mèches claires, elle portait un jean taille basse et une chemise en denim nouée au-dessus du nombril. Elle n’était pas vraiment jolie mais elle avait quelque chose, une sorte de charme brut difficile à ignorer.
Ses yeux se rivèrent immédiatement au motard charcuté. Elle se figea, laissa tomber son sac et leva les mains vers son visage.
— Wook ! s’écria-t-elle, les larmes aux yeux. Wook, oh, mon Dieu, non, Wookie chéri,
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