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L'Empire des Plantagenet

L'Empire des Plantagenet

Titel: L'Empire des Plantagenet Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Martin Aurell
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locales, de Taillebourg, théâtre de son premier exploit poliorcétique, à Châlus, où un carreau lancé par l’arbalète d’un des assiégés lui coûte la vie. Pour compenser cette indocilité des seigneurs locaux, les Plantagenêt s’appuient sur les communes urbaines, qu’ils comblent de privilèges. La situation en Anjou, certes berceau de la dynastie, ne diffère guère. La Bretagne, pour laquelle le roi d’Angleterre n’a jamais pris le titre ducal, laissé à un proche parent, connaît de similaires rébellions, surtout dans sa partie septentrionale. En définitive, il convient de reconnaître qu’un fossé politique sépare toutes ces principautés remuantes du royaume d’Angleterre et du duché de Normandie que les Plantagenêt tiennent remarquablement en main.
    Des études prosopographiques récentes corroborent ce constat. Elles portent sur l’entourage permanent du roi qui reçoit les plus importantes responsabilités à la tête des principautés périphériques. Au sein de ce groupe des plus proches conseillers du monarque, Anglais et Normands représentent une majorité écrasante. Bien que l’identité de ces deux groupes « nationaux », dont les seigneuries s’étendent de part et d’autre de la Manche, soit parfois difficile à préciser, on constate que les premiers l’emportent au fil du temps sur les seconds. Cette insularité des intimes du roi s’accroît avec Richard Cœur de Lion. C’est un renversement remarquable, alors que, depuis 1066, le pouvoir était entre les mains de Normands. Mais, en 1204, l’aristocratie du duché est d’autant plus prête à rejoindre le camp de Philippe Auguste qu’elle se sent dépossédée d’une puissance dont ses ancêtres ont joui pendant plus d’un siècle. Ajoutons que les Angevins, Aquitains ou Bretons n’apparaissent guère dans ce premier cercle des amis d’Henri II ou de Richard Cœur de Lion. Quelques figures cependant sous Jean sans Terre, dont Pierre des Roches, originaire d’Anjou, est l’un des principaux ministres : on les appelle de façon péjorative les « Poitevins », et les insulaires dénigrent leur programme belliqueux de reconquête de la Normandie et des principautés ligériennes, qui augmente de façon douloureuse les ponctions fiscales. Ces continentaux n’auront d’autre choix que de s’angliser, notamment au lendemain des défaites de 1224. Dès lors, l’homogénéité de la cour d’Henri III devient patente sur le plan géographique.
    Sur le plan sociologique, l’entourage royal semble plus métissé. D’abord, le groupe des tenants en chef, les plus grands feudataires d’Angleterre et de Normandie, possédant à eux seuls plus de la moitié des seigneuries de ces territoires, occupe une place de choix auprès du monarque : Robert de Beaumont, comte de Leicester, grand justicier du royaume, est sans doute le baron le plus puissant de l’île, et sa fortune est comparable à celle de Guillaume de Mandeville, comte d’Essex et d’Aumale, pour ne citer que deux des ministres les plus en vue d’Henri II. Ensuite, une petite noblesse de service, par tradition loyale à la monarchie, fournit également de nombreux conseillers du roi, à l’image de Richard de Lucé. Enfin, quelques officiers ont gravi, depuis la roture, l’échelle des pouvoirs grâce à leurs études ; cette promotion par le savoir est fortement décriée par la noblesse en place. Ces ascensions sociales sont néanmoins rares auprès des rois angevins, dont la suite est principalement composée de membres de la vieille noblesse. Cet élitisme contraste avec l’entourage de Louis VII et de Philippe Auguste, où la petite chevalerie et le patriciat urbain sont bien plus représentés. À la longue, cette différence sociale explique peut-être le contrôle de la monarchie anglaise par l’aristocratie et les pouvoirs accordés au Parlement entre les mains de la noblesse. Ce système se trouve aux antipodes de l’autorité sans entraves de la royauté française.
    L’entourage anglo-normand du roi ne représente pas seulement un groupe de conseillers politiques, mais le noyau même de son armée. Ce groupe restreint de guerriers aristocratiques est souvent composé par les tenants en chef, qui ont cédé des fiefs à de nombreux chevaliers avec lesquels ils se rendent à l’ost royal. Guillaume de Tancarville sert ainsi Henri II avec une centaine de combattants, parmi lesquels on trouve le jeune Guillaume le

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