L'énigme de l'exode
débarrassés de leur vieux papier peint déchiqueté et magnifiquement repeints en bleu roi, étaient ornés de lithographies représentant les grands monuments de l’Égypte. La corniche, les plinthes et le plafond étaient d’un blanc éclatant. Penderie encastrée en acajou, chaise et miroir en pied assortis... Après avoir vu la chambre, Knox se rendit compte que le séjour avait également été redécoré, de façon certes moins extravagante. Il avait simplement été trop désorienté pour le remarquer.
Il ouvrit la penderie. Bon sang ! Des vestes et des chemises fraîchement repassées, pendues sur des cintres en bois ; des étagères remplies de vêtements soigneusement pliés. Knox passa la main sur une pile de tee-shirts et repéra l’angle d’une pochette violette. Les battements de son cœur s’accélérèrent brusquement. C’était pour cacher cette pochette qu’Augustin était retourné dans sa chambre, Knox en avait l’intime conviction. Il savait qu’il ne devait pas regarder à l’intérieur, mais qu’il allait tout de même le faire. Il prit la pochette et l’ouvrit. Elle contenait des photos. Il les sortit et les regarda une à une avec une incrédulité grandissante. L’estomac noué, il se demanda ce que cela signifiait. Mais c’était évident, et il n’y pouvait rien. Du moins pas pour l’instant. Il remit les photos là où il les avait trouvées.
Il lui fallait une chemise propre. Il en prit une et s’empressa de sortir en refermant la porte derrière lui. Puis il s’assit dans le séjour et se mit à ruminer le constat dérangeant qu’il venait de faire : peut-être ne pouvait-il plus vraiment faire confiance à son meilleur ami.
II
Lorsqu’il arriva à son bureau, Farouq y trouva Salem, les yeux rougis par une nuit sans sommeil devant la chambre d’hôpital de Knox.
— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-il.
— Il s’est échappé, chef, bredouilla Salem.
— Échappé ? Comment ça, échappé ?
— Il est sorti de sa chambre. Il a sauté par la fenêtre et il s’est engouffré dans un taxi.
— Et vous l’avez laissé faire ?
Salem baissa les yeux, comme s’il était au bord des larmes.
— Comment aurais-je pu savoir qu’il allait sauter par une fenêtre ?
Avec colère, Farouq lui fit signe de s’en aller. Mais en réalité, il était plutôt excité, car son instinct ne l’avait pas trompé. La fuite de Knox lui donnait raison. Les personnes victimes d’un accident de voiture ne s’échappaient pas de leur hôpital, fût-il égyptien. Encore moins en sautant par une fenêtre. Seul un homme ayant du sang sur les mains pouvait réagir de cette façon.
Farouq s’assit sur sa chaise de bureau, qui craqua sous son poids, et passa en revue les informations dont il disposait : un chantier de fouilles ; une visite surprise du CSA ; une autre visite de nuit ; une jeep écrasée contre un fossé ; un homme décédé, et pas n’importe lequel. Il réfléchit, se concentra. Une découverte importante avait-elle été faite sur le site de Peterson ? Cela eût expliqué beaucoup de choses, car Farouq avait la nette impression que Peterson jouait un rôle tout aussi louche que Knox dans cette affaire.
Il se leva et attrapa ses clés de voiture. Il fallait qu’il aille voir ce site. Mais il hésita. Il ne savait pas quoi chercher. De plus, s’il avait vraiment quelque chose à cacher, Peterson se réfugierait derrière un jargon de spécialiste. Et Farouq détestait le jargon, qui lui donnait toujours l’impression d’être un ignare.
Il regarda sa montre. De toute façon, il devait d’abord se rendre au CSA pour signaler l’accident et essayer d’en savoir plus sur Tawfiq et Knox, notamment sur les raisons qui les avaient amenés à se rendre à Borg el Arab. Avec un peu de chance, ils dépêcheraient un archéologue pour l’accompagner sur le chantier de fouilles.
III
Au volant du camion, Nasser suivait la nouvelle route qui menait à la tombe royale d’Akhénaton. Les hautes falaises de grès de l’Oued Royal n’impressionnaient guère Khaled Osman. Celui-ci avait escorté des dizaines de touristes jusqu’ici ces derniers mois, mais il ne s’était jamais senti aussi nerveux. Peut-être était-ce parce que cette fois, il avait affaire à une équipe de tournage. Il avait appris à ses dépens que la télévision pouvait causer beaucoup de tort.
Le camion arriva devant la génératrice. Celle-ci avait coûté un demi-million de
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