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L'ennemi de Dieu

L'ennemi de Dieu

Titel: L'ennemi de Dieu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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d’autre ? C’était immonde, Derfel, proprement immonde ! »
    Il se remit à
sangloter, dit je ne sais quoi sur la honte, parla des morts qui avaient été
les témoins de la honte de sa femme et de son déshonneur. Incapable d’ajouter
un mot de plus, il se laissa aller à des sanglots désespérés. Je gardai le
silence. Il lui était apparemment égal que je fusse ou non avec lui, mais je
lui tins compagnie jusqu’à ce que l’heure vînt de conduire Dinas et Lavaine au
bord de l’eau afin que Nimue pût extraire l’âme de leur corps à petit feu.
    Dans la
grisaille de l’aube, Arthur était assis, vide et épuisé, dominant la mer. Les
cornes gisaient à ses pieds, son casque et la lame nue d’Excalibur posés sur le
banc à côté de lui. En séchant, le sang avait formé une épaisse croûte brune.
    « Il est
temps de partir, Seigneur, dis-je alors que l’aube donnait à la mer la couleur
d’une lame d’épée.
    — L’amour »,
fit-il d’un ton amer.
    Je crus qu’il
m’avait mal compris.
    « Il est
temps de partir, Seigneur.
    — Pour
quoi faire ?
    — Pour
honorer votre serment jusqu’au bout. »
    Il cracha,
puis resta assis en silence. On avait ramené les chevaux des bois et emballé le
Chaudron et les Trésors pour le voyage. Les lanciers nous observaient et
attendaient.
    « Est-il encore
un seul serment, me demanda-t-il avec aigreur, qui n’ait été bafoué ? Un
seul ?
    — Il faut
y aller, Seigneur ! »
    Comme il ne
bougeait ni ne parlait, je tournai les talons : « Ou alors, nous
partirons sans vous, fis-je brutalement.
    — Derfel !
appela Arthur d’une voix qui trahissait sa douleur.
    — Seigneur ? »
    Il avait les
yeux fixés sur son épée et semblait surpris de la voir encroûtée de sang :
« Ma femme et mon enfant sont dans une chambre, à l’étage. Veux-tu bien
aller me les chercher ? Ils peuvent faire la route sur le même cheval.
Puis nous pourrons partir. »
    Il faisait
tout son possible pour paraître normal, comme si c’était une aube nouvelle
pareille à toutes les autres.
    « Oui,
Seigneur », fis-je.
    Il se leva et
remit Excalibur, toute souillée de sang, au fourreau : « J’imagine
maintenant que nous devons refaire la Bretagne ? dit-il avec aigreur.
    — Oui,
Seigneur. Tel est notre devoir. »
    Il me fixa de
nouveau et je vis bien qu’il avait de nouveau envie de pleurer.
    « Tu sais
quoi, Derfel ?
    — Dites-moi,
Seigneur.
    — Ma vie
ne sera plus jamais la même, n’est-ce pas ?
    — Je ne
sais pas, Seigneur. Je ne sais vraiment pas. »
    Les larmes se
remirent à couler sur ses joues.
    « Je l’aimerai
jusqu’au jour de ma mort. Tous les jours de ma vie, je penserai à elle. Toutes
les nuits, avant de m’endormir, je la verrai, et à chaque aube je me
retournerai dans mon lit pour m’apercevoir qu’elle est partie. Chaque jour,
Derfel, chaque nuit, chaque aube jusqu’à l’heure de ma mort. »
    Il ramassa son
casque avec son panache taché de sang, abandonna les cornes d’ivoire et fit
quelques pas avec moi. J’allai chercher Guenièvre et son fils dans leur chambre
à coucher, puis nous partîmes.
    Gwenhwyvach
put alors disposer à sa guise du Palais marin. Elle y vécut seule en proie à
ses divagations, au milieu des lévriers et des somptueux trésors qui se
décomposaient tout autour d’elle. Postée à la fenêtre, elle attendait la venue
de Lancelot, car elle était sûre que son seigneur viendrait un jour partager sa
vie au bord de l’eau dans le palais de sa sœur. Mais son seigneur ne vint
jamais et tous les trésors furent volés. Le palais s’effondra et Gwenhwyvach
périt dans les décombres. C’est du moins le bruit qui courut. Ou peut-être
vit-elle encore là-bas, attendant sur la côte l’homme qui ne vient jamais.
    Nous partîmes.
Et sur les rives boueuses de la crique, les goélands déchiraient les abattis.
     
    *
     
    Dans une
longue robe noire couverte d’un manteau vert foncé, ses cheveux roux
soigneusement ramenés en arrière et noués par un ruban noir, Guenièvre montait
la jument d’Arthur, Llamrei. Elle montait en amazone, tenant le pommeau de sa
main droite, le bras gauche passé autour de la taille de son fils effrayé et
larmoyant, incapable de quitter des yeux son père qui marchait obstinément
derrière le cheval.
    « J’imagine
que je suis son père ? » lui lança Arthur avec mépris.
    Les yeux
rougis par les pleurs, Guenièvre se contenta de détourner

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