Les 186 marches
différentes chambres à gaz de Mauthausen, signalons que des gazages dans les blocks d’habitation rendus étanches à cet effet, eurent lieu, à plusieurs reprises, à Gusen.
Au moins huit cents déportés de ce kommando furent ainsi exterminés.
Avec intelligence, précision, P. -S. Choumoff démonte dans la dernière partie de sa monographie le mécanisme des « camouflages » sur les registres des morts, sur les listes de présence ou de transferts. Il est évident que nous ne possédons pas le nombre exact des « gazés » de Mauthausen, mais d’après les différentes pièces d’archives consultées, les recoupements, les témoignages aussi, P. -S. Choumoff dresse le bilan « le plus proche possible de la réalité » :
Pour la chambre à gaz fixe du camp de Mauthausen : 4 000 ; chambre à gaz mobile (camion Saurer) : 1 560 ; Harteim : 28 000 à 30000 dont 4608 à 8 000 immatriculés à Gusen ou Mauthausen ; enfin gazages occasionnels de Gusen : 800. Total : 34000.34000 dont, au minimum, 11 000 immatriculés à Mauthausen ou Gusen.
Trente-quatre mille gazés.
Qui a dit que la chambre à gaz de Mauthausen était un mythe ?
LA LOI DU SILENCE
U n Stubendienst avait commis une erreur en établissant une liste de malades, d’où un chiffre faux lors d’un appel. Un autre Stubendienst, un Polonais, l’a violemment frappé, d’abord avec le poing puis avec un escabeau. La scène a duré assez longtemps. Sur le cou de l’homme tombé à terre, il a alors placé un bâton et, avec un autre Stubendienst ils se sont amusés, chacun à un bout, à exécuter une sorte de mouvement de balançoire jusqu’à ce que mort s’ensuive. Cela devant l’œil amusé du chef de block et devant environ cent cinquante malades. Mais la victime était un Allemand. Un Allemand tué par un Polonais ! Vive émotion chez les « proéminents » allemands du camp qui menèrent une enquête. Je me trouvais dans la salle, quand on a interrogé les malades. Personne n’avait rien vu. Moi-même j’ai été questionné à part. J’ai, bien entendu, répondu que je n’étais pas là au moment du crime… sans quoi je ne serais pas encore vivant. Mais j’ai bien compris l’utilité du silence.
C’était un dimanche soir, un Tzigane jouait de la guitare. Le S. S. s’est assis à côté de lui, lui a demandé de l’accompagner et s’est mis à chanter au milieu des prisonniers dont certains, hélas ! ont applaudi. Ce S. S. venait de tuer de malheureux détenus et allait en exécuter d’autres. J’avais lu » avant la guerre, que Néron chantait au cirque, mais cela n’avait pas revêtu h mes yeux une signification particulière. Ce soir-là, j’ai compris l’horreur que la phrase des auteurs latins sous-entendait.
LE VER DANS LE FRUIT OU « L’AUTRE SOLUTION »
– Avec Walter Schellenberg, on ne sait jamais…
Mensonge ? Vérité ? Et pourtant ce beau jeune homme sage, un peu triste, est sincère lorsqu’il signe son engagement dans la S. S. pour obtenir une bourse :
– Peu importent les S. S. Ce qui compte c’est qu’ils financent ma dernière année d’études.
Walter Schellenberg a abandonné la médecine, à mi-chemin, pour choisir le droit. Etrange destin que l’on pourrait rapprocher de celui d’Albert Speer, avec cette seule différence fondamentale : la « parfaite » intelligence de Speer n’est que mathématique, une mécanique à l’abri du rêve, dévorée par un travail quotidien excessif qui rejette toute analyse « après coup » alors que l’intelligence de Schellenberg ne se laisse pas affadir par l’habituel, le routinier ; en perpétuel jaillissement, canalisée par la raison et la réflexion, elle est avant tout littéraire et politique ; à la frontière de la psychanalyse elle sait reconnaître le détail essentiel qui conditionne le tout, influencer les actes et les attitudes, jouer aussi avec deux « parties » d’avance. Peut-être, de plus, Schellenberg était-il poète ? En tout cas, entre ses mains, les Speer ne pèsent pas lourd. Et ils n’ont pas le code pour s’en apercevoir. Si Hitler avait choisi Schellenberg et non Speer comme projection de sa personnalité rentrée, le cours de la Seconde Guerre mondiale, au moins dans ses derniers chapitres, aurait été profondément modifié. Mais Hitler ne connaissait, à vrai dire, que très peu Schellenberg, et lorsqu’il sentit l’étonnante rareté du
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