Les 186 marches
livre, encore en janvier 1942, aux perspectives de la « paix hitlérienne ».
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Le choix de la plupart des camps de concentration sera déterminé par la proximité d’une carrière et d’une ville à « rénover »… Et chacun sait, dans l’entourage du Führer, qu’une seule cité compte réellement pour lui : Linz.
– Il portait un respect sans réserves à l’évêque de Linz qui avait, à force d’énergie et contre de nombreuses résistances, réussi à faire agrandir la cathédrale de la ville pour lui donner des proportions inhabituelles ; Hitler racontait que cet évêque, parce qu’il voulait surpasser même la cathédrale Saint-Etienne de Vienne, avait eu maille à partir avec le gouvernement autrichien qui ne voulait pas voir Vienne dépassée. Habituellement, suivaient des considérations sur l’intolérance du gouvernement central autrichien qui avait réprimé toutes les tentatives d’autonomie culturelle de villes comme Graz, Linz ou Innsbruck. Il ne prenait apparemment pas conscience qu’il imposait à des pays entiers cette même uniformisation forcée. Or, maintenant que c’était lui qui décidait, il aiderait, affirmait-il, sa ville à faire valoir ses droits. Son programme pour transformer Linz et en faire une métropole comportait la construction d’une série d’immeubles d’apparat sur les deux rives du Danube, un pont suspendu devant relier celles-ci entre elles. Son projet devait culminer dans la construction de la maison du N. S. D. A. P., le Gauhaus, un énorme bâtiment avec une salle de réunion gigantesque et un campanile. C’est dans cette tour qu’il voulait avoir, dans une crypte, sa sépulture. Les autres points forts de cette restructuration architecturale des deux rives devaient être un hôtel de ville, un grand hôtel de luxe, un grand théâtre, un commandement général, un stade, une galerie de tableaux, une bibliothèque, un musée des armes, un bâtiment d’exposition et enfin deux monuments, le premier pour célébrer la libération de 1938, et le deuxième à la gloire d’Anton Bruckner. M’étaient réservés les projets de la galerie de tableaux et du stade qui, lui, dominerait la ville du haut d’une colline. Non loin de là, également, sur la hauteur, devait s’élever la résidence où Hitler se retirerait dans sa vieillesse.
– Hitler rêvait du panorama qu’à Budapest les siècles avaient modelé sur les deux rives du Danube. Son ambition était de faire de Linz la Budapest allemande. Il prétendait en effet, à ce sujet-là, que Vienne était, de toute façon, mal orientée, tournant le dos au Danube comme elle le faisait. Les constructeurs n’avaient pas su, selon lui, intégrer le fleuve dans le plan de la ville. Le seul fait qu’à Linz, lui réussirait à le faire, pourrait permettre à cette ville de concurrencer un jour Vienne. Indubitablement il ne fallait pas prendre de telles déclarations tout à fait au sérieux ; c’était en fait son aversion pour Vienne qui, ressortant spontanément de temps à autre, l’y entraînait. Car, à d’autres occasions, il répétait assez quelle réussite représentait, à Vienne, l’utilisation des anciennes fortifications.
– Déjà, avant-guerre, Hitler déclarait de temps à autre qu’il voulait, après avoir atteint ses buts politiques, se retirer de la vie politique et venir vivre à Linz ses dernières années. Il ne jouerait plus alors aucun rôle dans les affaires de l’État et n’interviendrait pas dans le gouvernement de son successeur car, sans son effacement total, celui-ci ne pourrait jouir de l’autorité nécessaire. Mais les hommes se tourneraient vite vers ce dernier, quand ils s’apercevraient que c’était lui qui avait le pouvoir. Alors d’ailleurs on l’oublierait vite. Tout le monde l’abandonnerait. Non, sans se complaire à cette idée, il continuait, s’apitoyant sur lui-même : « Peut-être l’un de mes anciens collaborateurs me rendra-t-il visite de loin en loin. Mais je n’y compte pas. A part M ,, e Braun, je n’emmènerai personne. M ,, e Braun et mon chien. Je serai seul et solitaire. Qui pourrait aussi, de son propre gré, demeurer longtemps près de moi ? Personne ne fera plus attention à moi. Ils iront tous faire la cour à mon successeur. Peut-être feront-ils une apparition, une fois dans l’année, à l’occasion de mon anniversaire. » Naturellement les convives présents protestaient qu’ils lui
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