Les 4 vies de Steve Jobs
assauts cathodiques du frêle Elvis Presley et du rock’n’roll, et encore moins les soubresauts de la future contre-culture. Les hommes vont gagner la pitance, leurs épouses maintiennent la maison propre comme un sou neuf, les enfants sont bien élevés, le dimanche, on nettoie la voiture et on entretient une pelouse coupée au carré. Nul n’oserait s’écarter de ce qui est de bon ton. Le qu’en-dira-t-on sert de mètre étalon en matière de comportement social. La population ne semble pas s’en plaindre et, d’ailleurs, bien des cinéastes à la Spielbergou Lucasdépeindront cette atmosphère paisible des années cinquante avec nostalgie.
En attendant, Joanne Carole Schieblen’a que 23 ans et elle porte un bébé conçu hors du mariage, ce que la norme réprouve. Mieux encore, le père n’est aucunement un Américain de bonne famille, ce qui à tout prendre aurait amenuisé la faute. Il est d’origine syrienne !
C’est à l’Université du Wisconsin que le méfait a été commis. L’étudiante Joanne est tombée amoureuse de son professeur de sciences politiques Abdulfattah Jandali. Monsieur Schieblepère s’oppose à leur mariage et menace de la déshériter si elle désobéit. Lui avouer qu’elle est enceinte est au-dessus de ses forces. Pour cacher sa grossesse, Schieble va accoucher en Californie et se met en quête de parents adoptifs.
Le 24 février, elle donne naissance à cet enfant qu’elle a conçu par accident. C’est un garçon. Seulement voilà… Le foyer d’adoption escompté, une famille d’avocats, fait la fine bouche. Ils espéraient une fille et ne peuvent se résoudre à changer leurs plans. Désolés, ils ne souhaitent pas élever un garçon.
Joanne se rabat sur le deuxième couple de la liste d’attente : le quinquagénaire Paul Jobset son épouse Clara.
En plein milieu de la nuit, Paul Jobsreçoit un appel :
« Nous avons un bébé, c’est un petit garçon. Est-ce que vous le voulez ?
– Bien sûr ! », répondent les Jobs.
Paul et Clara Jobssont prêts à adopter l’enfant illégitime. Mais c’est au tour de Joanne de faire la difficile. Les Jobs font partie de la classe moyenne, ils sont loin d’avoir le standing d’une famille d’avocats. Steve Jobs l’a raconté lui-même par la suite : « Quand ma mère biologique a découvert que ma mère adoptive n’avait jamais eu le moindre diplôme universitaire, et que mon père n’avait jamais terminé ses études secondaires, elle a refusé de signer les documents définitifs d’adoption. Elle ne s’y est résolue que quelques mois plus tard, quand mes parents lui ont promis que j’irais à l’université. »
Le destin va prendre une drôle de tournure pour Joanne Carole Schieble. Aux alentours de Noël, elle épouse le Syrien Jandalià Green Bay, dans le Wisconsin. En juin 1957, tandis que Steve Jobsgrandit en Californie, les Jandali auront un deuxième enfant, une fille nommée Mona. Leur union ne durera toutefois que sept années. En attendant, Stephen Paul Jobs a une sœur mais il ne le sait pas encore.
De condition modeste, les Jobsrésident dans un pavillon de banlieue sans panache particulier. Tandis que Clara est comptable, Paul Jobs officie comme opérateur de machine dans une entreprise qui fabrique des lasers. Lorsque Stephen a 5 ans, sa mère est contrainte de faire du baby-sitting pour lui payer des leçons de natation 2 . Les Jobs vont plus tard adopter un deuxième enfant, une fille qu’ils nomment Patty.
En 1960, la famille déménage de San Francisco à Mountain View, au cœur de ce qui va devenir la Silicon Valley. L’enfant de 5 ans découvre avec stupeur une région qu’il perçoit comme un paradis : la vallée est parsemée de vergers, d’abricotiers, de pruniers. L’air est si pur qu’il peut distinguer les maisons comme les collines, loin, très loin.
Le petit Steve est fasciné par la dextérité de son père adoptif qui « avait du génie dans les mains », comme il le dira plus tard. Il peut demeurer des heures à l’observer découper du bois puis le clouer sur l’établi de son garage. Un jour, alors que son rejeton a 6 ans, Paul Jobsdécoupe une partie de cet établi et la donne à Steve : « Voilà, c’est ton établi maintenant ! »
Il lui donne au passage quelques-uns de ses petits outils, et lui montre comment utiliser un marteau, une scie.
« Il a passé beaucoup de temps à m’enseigner comment construire des choses, comment
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