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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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joie. Et s’il avait dévié (333) lors de la bataille, les concubines de Naudon changeraient de protecteur.
    – J’aurais eu, saligot, moult plaisir à t’occire.
    – Moi aucun, Guillonnet.
    – Appelle-moi messire !
    –  C’est trop me demander !
    Tristan contenait son mépris. Il avait pu s’asseoir malgré ses fers et les feux accrus de ses plaies ; il n’apercevait, lorsque Salbris cessait de se pencher vers lui, que les obscures cavités d’un grand nez au-dessus d’une gorgière ternie, grumeleuse de bave séchée.
    – Notre vengeance sera terrible !
    Ouïr cela après une défaite pareille ! Tristan soupira. Il avait cru, avant Poitiers, que la France pouvait triompher de n’importe quelle hydre placée sur le chemin de son honneur… Que les méchantes gens expiaient leurs crimes… C’était ce qu’avait dû méditer Guillonnet. On avait prétendu, parmi tous les gens d’armes, que l’avènement des bombardes allait tuer la guerre ou la déshonorer… Soit, c’était possible, bien que peu vérifié par les faits. Mais à Brignais ? L’essentiel de la victoire revenait à une surprise nocturne. À l’astuce et à l’esprit de décision d’une part ; à la négligence de l’autre.
    – Vous ne vous étiez précautionnés contre rien !… Ni des feintes ni des cautelles dont pourtant les routiers sont prodigues. En étalant son armée dans les Barolles, puis en bordure des Aiguiers, Bourbon a pensé effrayer l’adversaire !… Il ne l’a que réjoui. Il croyait aussi, je présume, les routiers piteusement armés… C’est vrai qu’ils le sont. Qu’est-ce qu’une fronde ? Une fustib alle 113  ?… Ce sont des jouets qui font un mal terrible !… Si vous ne vous étiez pas laissé surprendre, cette nuit, rien ne prouve que vous auriez vaincu !
    – Tu es bien de chez eux pour me parler ainsi !
    – Je les ai vus se préparer à vous recevoir, ce qu’ils eurent point à faire puisque leurs chefs choisirent de vous assaillir.
    Un rire. Guillonnet de Salbris s’égayait de tels propos.
    Nous finirons par les vaincre. Demain, dans une semaine ou un mois.
    – Avec quoi ? Quels hommes ?
    –  Le roi en trouvera !… Nous sommes les plus forts ! Dieu nous aidera !
    Cette défaite n’avait point ébranlé la hautaineté de ce marmouset : il avait guerroyé, ce jour d’hui : il vivait : sa présomption, dans cette évidence, trouvait et trouverait force nourriture. Il se pouvait même que ses propos, dans deux ou trois semaines, fussent, à quelques nuances près, ceux d’un vainqueur.
    – Lève-toi… Ne compte pas sur moi pour te tendre la main !… Je vois que le cheval est attelé… Nous allons partir… Lyon nous attend… Vous attend… Holà, vous autres !
    Une quinzaine d’hommes d’armes, qui s’étaient abrités derrière une haie, se levèrent. Ils avaient repris là, dans l’herbe, leur souffle, leurs forces et leur fierté Tous étaient vêtus de mailles sous un surcot déchiré, souvent maculé de sang. Des barbutes et des chapels de Montauban les coiffaient ; la plupart étaient ceints d’une épée ; les autres s’appuyaient sur la hampe de leur goyarde ou de leur guisarme.
    – Allez quérir les prisonniers et les chevaux !
    Les captifs et les roncins, une demi-douzaine, étaient surveillés dans un creux de terrain par cinq soudoyers : des gens du ban qui, s’ils n’avaient souffert des excès des routiers, les avaient redoutés et les redouteraient, maintenant, davantage. Cependant, par lassitude extrême, sans doute, et nullement par bénignité de cœur, ils n’avaient exercé aucunes représailles sur Angilbert le Brugeois, Thomas de Nadaillac et cinq malandrins inconnus de Tristan, dont l’appartenance à l’une ou l’autre des compagnies de Brignais ne faisait aucun doute.
    – J’ai grand plaisir à te voir là, Castelreng, dit un barbu qui avait perdu le tiers de son avant-bras dextre dans la bataille et dont Angilbert, sans doute, avait gar rotté le moignon avec sa ceinture de chanvre. J’avais cru que tu n’étais pas des nôtres !
    – Et il t’a prouvé qu’il en était ? demanda aussitôt Salbris.
    – Bien sûr !
    Ces mots constituaient une condamnation.
    Lentement, Angilbert s’approcha de Tristan. Pâle sous sa couenne, il feignait une componction qui l’abusait personne. Ses mains liées tenaient son crucifix. Il ne tinterait plus en heurtant son poignard.
    – Un clerc ! ricana

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