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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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concentrées les vies de tous les autres,
c’était Roland Candiano.
    La courtisane pleura.
    Elle comprit alors que depuis qu’elle était venue à Venise pour
Roland, elle n’avait cessé de l’aimer. Tout le reste n’était que
comédie jouée avec plus ou moins de sincérité.
    Elle avait aimé, elle aimerait toujours cet homme.
    Elle eût donné sa vie pour voir Roland, pour lui crier encore
son amour et, en même temps, elle tressaillait de terreur au
moindre bruit.
    La vision de Léonore à la fenêtre du palais Altieri avait achevé
de l’épouvanter, comme si cette rencontre eût été préparée en signe
de fatal et suprême avertissement.
    Voilà à quoi songeait Imperia retirée au fond de son palais,
tandis que Roland et Scalabrino la croyaient morte.
    Alors, une conclusion logique s’imposa à elle.
    Elle était venue à Venise pour Roland.
    Roland la méprisait, la haïssait, Roland la tuerait sûrement.
Peut-être était-ce lui qui avait armé le bras de Scalabrino…
    Il ne lui restait plus qu’à fuir.
    Sans plus attendre, elle fit venir son intendant et eut avec lui
un entretien de deux heures, au bout desquelles il se retira en
disant :
    « Tous vos ordres seront exécutés, signora, et je vous
apporterai moi-même le produit de la vente du palais, des meubles,
des tableaux…
    – Excepté celui que je vous ai indiqué.
    – Le portrait en question ; je n’oublie pas, signora.
Il ne me reste plus qu’à apprendre en quel lieu de l’Italie je
devrai vous rejoindre.
    – À Rome », dit Imperia.
    L’intendant disparu, la courtisane rassembla ce qu’elle avait de
bijoux précieux, prit une somme en or, s’habilla comme pour un long
voyage, et, sans emmener aucune de ses femmes qui avaient l’ordre
de la rejoindre à Rome, sortit à la nuit tombante de ce palais où
pendant près de huit années elle avait ébloui Venise de son luxe et
de sa beauté.
    La gondole qui l’attendait devant le palais lui fit traverser la
grande lagune.
    En terre ferme, elle retrouva son intendant qui lui amenait un
solide carrosse de voyage.
    Imperia traversa l’Italie à toute vitesse, semant l’or pour
aller plus vite. Un matin enfin, elle s’arrêta devant un de ses
palais de Rome.
    « Maintenant, dit-elle, je suis sauvée !… »
    Elle parcourut avec une joie folle, une joie de délivrance et de
vie nouvelle, ces salles du palais désert que deux serviteurs
avaient gardé et entretenu pendant son absence. Déjà elle donnait
des ordres pour la réparation, la restauration de ses salons, déjà
elle pensait à quelque somptueuse fête par laquelle elle eût
annoncé son retour à la société romaine, comme la fête qu’elle
venait de donner en son palais du Grand Canal devenait un adieu à
la société vénitienne.
    Avec sa prodigieuse activité, dès le jour même, elle avait
organisé un train de maison ; le palais qui avait dormi huit
ans se réveillait ; des domestiques, des femmes de chambre
s’affairaient dans les vastes pièces.
    Et le soir, lorsque la courtisane ferma les yeux dans ce grand
lit qui était célèbre à Rome pour sa magnificence, elle murmura
avec la lassitude calme et délicieuse du repos reconquis :
    « Ah ! Venise et ses sombres canaux ! Venise et
ses ruelles tortueuses où les sbires vous guettent ! Venise et
ses poignards et son épouvante, et tout ce qui m’accablait le cœur
et me voilait le cerveau d’un nuage de terreur et d’horreur !
Adieu à toute cette tristesse ! Vive Rome et le soleil de
Rome, vivent mes bons Romains qui déjà, apprenant mon retour, ont
envoyé me saluer… Là-bas je n’étais que la superbe courtisane, ici
je suis la reine. »
    Et elle s’endormit en faisant des rêves de vie nouvelle.
    Morte la pauvre Bianca, dans cette âme.
    Mort Bembo ! Mort Sandrigo ! Mort Roland
Candiano ! Oui ! morts, tous, depuis Jean Davila
assassiné au pied du grand portrait, jusqu’à Sandrigo tué dans ses
bras !
    Le retour d’Imperia produisit dans Rome le grand frisson qu’elle
avait espéré et qui était plus que de la curiosité.
    La fête rêvée par la courtisane eut lieu quatre jours après son
arrivée. Elle fut ce qu’étaient toutes les fêtes d’Imperia :
magique par bon goût, rutilante par les lumières et les fleurs,
exorbitante par le faste.
    Sur la fin de la soirée, Imperia, radieuse, rajeunie, ivre de
joie et d’orgueil d’avoir reconquis Rome d’un seul coup, recevait
les adieux des seigneurs romains

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