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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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demeurait obscur :
    Pourquoi Roland n’avait-il pas englobé l’évêque dans cette vaste
conspiration qui était comme la fournaise ardente où il élaborait
quelque œuvre d’effroyable vengeance ?

Chapitre 14 SOUS LE PONT DES SOUPIRS
    Roland sortit de l’église sans remarquer l’agent que Guido
Gennaro avait aposté. Il est probable, d’ailleurs, que même s’il
l’eût remarqué il ne s’en fût pas autrement inquiété. Il était dans
une de ces dispositions d’esprit où les événements graves
deviennent des événements médiocres, et où toute la pensée d’un
homme s’absorbe sur un fait unique.
    Le fait, le grand fait, l’unique événement dans l’âme de Roland,
c’était l’étrange et puissante émotion en présence du danger que
courait Léonore.
    Nous dirons même que le danger passait au second plan dans la
préoccupation de Roland. Ce qui l’étonnait, ce qui lui semblait
d’une exceptionnelle gravité, c’est qu’il éprouvât tant d’émotion.
C’était, au fond, l’indéniable preuve que son amour pour Léonore
était demeuré le même que jadis, quand elle était sa fiancée, quand
on les appelait les Fiancés de Venise, quand il accourait au jardin
d’Olivolo et, plus tard, quand du fond de sa prison le nom de
Léonore montait comme une prière désespérée. Il ne l’aimait pas
davantage. Il ne l’aimait pas moins. Il l’aimait, voilà tout.
    Il comprit qu’après tant de malheurs et de souffrances,
il
ne vivait encore que parce que Léonore vivait encore.
    Elle morte, il mourrait.
    Elle vivante, il vivait.
    Il pouvait la charger de son mépris et de sa haine, ou de
sentiments qu’il croyait être du mépris et de la haine. Le fait
suprême qui l’épouvantait presque, c’est qu’il avait confondu sa
vie avec celle de Léonore.
    Dès lors, dans cette journée, tout le reste devint secondaire.
Il n’y avait plus, il ne pouvait plus y avoir qu’une
question :
    Sauver Léonore.
    Cette journée fut une des plus affreuses qu’il eût encore
connues, si l’on en excepte celle où il apprit la trahison de
Léonore – ou du moins ce qu’il appelait sa trahison.
    Comment la passa-t-il ?
    Sans doute, il erra assez longuement dans Venise, conduit
simplement par la pensée qui veillait en lui. Il est certain qu’à
un moment de la journée, il fut aperçu près du palais Altieri, et
l’agent que Guido Gennaro avait mis à sa surveillance le vit
s’arrêter, vers cinq heures du soir, près du palais Grimani.
    Nous le retrouvons, nous, à la nuit tombante, non loin du pont
des Soupirs. Avec son esprit analytique et sa faculté de déduction,
Roland avait fini par se dire que là devait être le centre de son
opération, que là devait certainement se préparer et s’accomplir le
drame.
    Il avait placé un loup noir sur son visage, et attendait, posté
à l’avant d’une petite gondole. Il avait ainsi, à sa droite, la
ligne des quais du Grand Canal, avec la place Saint-Marc.
    À sa gauche, au tournant du palais ducal, il voyait le pont des
Soupirs.
    *
    * *
    Tout à coup, il vit venir à lui, du fond du canal, une barque de
faible dimension que manœuvrait un homme seul. Et la vue de cet
homme le fit tressaillir. Il le reconnut à l’instant même. C’était
Grimani.
    La barque fila devant lui et alla s’embusquer un peu en avant du
pont. Il y avait là une masse d’ombres accumulées par les masses de
la prison, du palais et du pont des Soupirs.
    La barque de Grimani se rangea contre les flancs de la
prison.
    Ainsi placée, elle devenait invisible de toutes parts.
    Mais Roland la voyait, lui ! Ses yeux flamboyants s’étaient
attachés à l’homme et il ne le perdait plus de vue.
    Quelques minutes s’écoulèrent.
    À ce moment, Roland entendit un clapotis de rames.
    Il se retourna vivement dans la direction de la place
Saint-Marc, et aperçut une gondole qui, elle aussi, mais sans hâte,
avec une sorte de nonchalance, venait vers le pont des Soupirs.
    Cette fois, Roland n’eut pas un tressaillement.
    Seulement, un peu de sang monta à ses yeux, et son visage qui
était livide l’instant d’avant se colora d’une légère rougeur.
    Puis, ses mains furent agitées d’un léger tremblement, et tout à
coup, il redevint très pâle. La gondole s’avançait lentement, son
barcarol à l’avant, silencieux et indolent.
    Non sous la tente, mais à l’arrière, Léonore était assise.
    La tête enveloppée d’une écharpe noire, les épaules

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