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Les Amours qui ont fait la France

Les Amours qui ont fait la France

Titel: Les Amours qui ont fait la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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sans Peur quitta la salle sans être inquiété.
    Chacun hésitait, naturellement, à faire éclater le scandale…
    Rentré chez lui, le duc de Bourgogne donna des instructions à ses hommes de main pour qu’ils pussent s’échapper, et passa la nuit à rédiger un manifeste destiné à justifier sa conduite. Enfin, il quitta Paris à l’aube du 26 novembre 1407, accompagné de six cavaliers auxquels il ordonna de couper le pont Sainte-Maxence pour retarder la marche de ceux qui le poursuivraient.
    Pendant qu’il galopait, la reine apprit en frémissant ce qui s’était passé au Conseil. Elle méprisa Jean pour sa faiblesse, mais lui sut gré de sa discrétion. Il n’avait pas prononcé, en effet, un seul mot susceptible de laisser soupçonner la complicité d’Isabeau. Aussi, tout en manifestant ostensiblement une grande colère contre le duc de Bourgogne, qu’elle traitait de « lâche fratricide », fit-elle en sorte que les cavaliers chargés de l’arrêter ne partent pas tout de suite…
    Jean sans Peur ne fut donc pas rejoint.
    Le scandale tant redouté n’en éclata pas moins, car la nouvelle s’était propagée, et tout Paris sut bientôt que le duc d’Orléans avait été assassiné sur l’ordre de son cousin.
    Il se fit alors dans l’esprit du peuple un revirement curieux : on oublia les vices, les exactions et le luxe insolent de la victime pour ne se souvenir que de ses rares qualités, et l’on plaignit la duchesse d’Orléans qui demandait justice au nom de ses enfants.
    Prudent, Jean sans Peur demeura quelque temps dans les Flandres, tandis qu’Isabeau, qui connaissait la versatilité du peuple, faisait faire ce que nous appellerions aujourd’hui une « campagne de propagande » en sa faveur. Six mois plus tard, elle l’informait qu’il pouvait revenir à Paris.
    Il se mit en route avec mille hommes d’armes. Les Parisiens, qui avaient été sensibles aux arguments des agents d’Isabeau, ne lui en voulaient plus du tout. Ils l’accueillirent même avec des acclamations ni enthousiastes que la duchesse d’Orléans, fort mécontente, quitta la cour et retourna en son château de Blois.
    Les oncles du roi, ne comprenant rien à ce revirement, se révoltèrent contre la présence de Jean sans Peur dans la capitale. Ils insistèrent pour que Charles VI ordonnât son arrestation ou son expulsion ; mais le pauvre malade, qui subissait alors quotidiennement l’influence insidieuse d’Isabeau, repoussa leurs conseils. Quelques jours plus tard, il autorisa même le duc de Bourgogne à justifier sa conduite en audience publique.
    Le peuple de Paris put alors entendre le meurtrier du duc d’Orléans outrager la mémoire de sa victime et conclure en affirmant que le crime qu’il avait commis était une action louable et un service rendu à l’État.
    Naturellement, la duchesse d’Orléans et son fils Charles protestèrent, menaçant le duc de Bourgogne de lever une armée pour le chasser de Paris, si le roi ne jugeait pas bon de le faire lui-même.
    À partir de ce jour, le royaume se trouva déchiré : il y eut, d’un côté, ceux qui approuvaient le duc de Bourgogne et, de l’autre, ceux qui soutenaient la duchesse d’Orléans.
    Ainsi, la France se divisait au moment précis où le roi d’Angleterre s’apprêtait, après une trêve de trente-cinq ans, à reprendre les hostilités…
     
    En un instant, tout le pays fut sous les armes. Les partisans du duc de Bourgogne prirent pour insigne la croix de Saint-André brodée sur une écharpe rouge, les autres, que commandaient le duc de Berry et le duc de Bourbon, se distinguèrent par une écharpe blanche dont un de leurs bras était enveloppé.
    Le roi, dans un éclair de bon sens, vit le danger et ordonna aux princes ligués de désarmer.
    Le duc de Berry répondit « qu’il resterait sous les armes tant que le duc de Bourgogne aurait des soldats ». Quant à celui-ci, qui était maître de la personne du roi et de la capitale, il défia à la fois son souverain et le chef du parti d’Orléans en levant de nouvelles troupes qu’il fit approcher de Paris…
    Après quelques mois de tractations confuses, une tentative de réconciliation entre les princes ennemis parut réussir quand le frère du duc d’Orléans épousa la fille du duc de Bourgogne et que la reine, qui se tenait à Melun (loin des combats éventuels), organisa des fêtes pour célébrer l’événement.
    Un dîner particulier réunit Isabeau, Jean

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