Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
Vom Netzwerk:
thème contre l’ennemi intérieur, avait professé quelques jours plus tôt, à la barre de l’Assemblée nationale, en demandant la création d’une cour martiale pour juger les contre-révolutionnaires. Il avait démenti les soupçons de Claude, en combattant avec violence l’idée de donner un gouverneur au Dauphin, « ce qui revient à supposer la continuation de la monarchie ; et manifestement le peuple, après avoir couché par terre la tyrannie, ne veut la voir se relever sous aucune forme ». Donc, Robespierre ne songeait pas, ou plus, à briguer ce poste de gouverneur, et pas davantage à une solution orléaniste.
    En l’accompagnant avec Dubon vers la maison Duplay, Claude lui posa carrément la question de la république, dont nul ne prononçait le nom. « Ah ! fit Maximilien, ta république ! Tu tiens au mot, décidément. Peu importe ! Du moment qu’il y a un pouvoir législatif formé par la représentation nationale, et un exécutif confié par cette représentation à des ministres, on se trouve en démocratie : voilà ce qui compte. Nous y sommes de fait, en république, ou plutôt nous y serons dans quelques jours, quand cette Assemblée croupion, empoisonnée de monarchisme et d’aristocratie, aura été remplacée par la Convention nommée au suffrage universel et que nous aurons des représentants vertueux. »
    À vrai dire, le suffrage n’était pas complètement démocratique : tous les Français – sauf les domestiques – voteraient, mais seulement dans les assemblées primaires, pour désigner parmi eux les électeurs qui, à leur tour, nommeraient les députés. Robespierre, reprenant son principe de 91, aurait voulu que ces députés ne pussent être choisis parmi les membres des deux précédentes assemblées. Cette fois personne ne le suivait, au grand soulagement de Claude qui comptait bien siéger à la Convention. Dès le 11, il avait écrit à son père, aux Jacobins de Limoges, à Dumas, à Guillaume Dulimbert surtout. Et il envisageait de se rendre sur place pour se présenter aux suffrages de ses concitoyens. L’évêque Gay-Vernon lui avait dit toutefois que c’était parfaitement inutile : nul ne lui disputerait la place. On avait, à Limoges, bien accueilli la révolution du 10 – que Claude lui-même avait expliquée aux Limousins par un article dans la gazette de Publicola Pédon : le Journal du Département, remplaçant la ci-devant Feuille Hebdomadaire – mais on n’y ambitionnait guère, semblait-il, d’aller risquer à Paris les humeurs du peuple, les complots royalistes, l’arrivée fort possible des armées autrichienne et prussienne. Avec Gay-Vernon, deux seulement des représentants limousins : Faye et Bordas, accepteraient de voir renouveler leur mandat. « Et comme Limoges doit envoyer sept députés, vous constatez, mon cher Claude, – dit le prélat constitutionnel – que vos chances sont vastes ! »
    Le 17, ce fut Dubon qui conduisit une délégation communale à la barre du Manège. Il y déclara d’un ton ferme : « Comme magistrat du peuple, je viens vous prévenir que ce soir, à minuit, le tocsin sonnera et le rappel battra dans les faubourgs. Le peuple est las d’attendre, craignez qu’il ne se fasse justice par ses propres moyens. Décrétez qu’aujourd’hui même chaque section nommera un citoyen pour former le tribunal criminel extraordinaire. Au demeurant, ajouta Dubon, nous ne quitterons pas cette enceinte jusqu’à ce que votre décret soit porté. »
    L’Assemblée réagit d’abord avec colère. Choudieu, pourtant bon jacobin, Thuriot, pourtant ami de Danton, s’insurgèrent contre les agissements dictatoriaux de la Commune et adressèrent de violents reproches à l’orateur. Il y eut un instant de tumulte. Le président rétablit l’ordre, la discussion s’engagea. Enfin, tard dans la relevée, le décret fut rendu. La nuit même, les sections élirent les juges et les commissaires nationaux, tous choisis parmi les anciens magistrats, avocats ou procureurs. Plusieurs appartenaient aux tribunaux d’arrondissement encore en exercice. L’un des directeurs du jury d’accusation : Dobsen, présidait jusqu’à ce moment le 6 e  tribunal criminel de Paris. Robespierre, élu, se récusa.
    Le lendemain, Pétion et le conseil de la Commune conduisirent le tribunal extraordinaire à son siège, au Palais. Par la galerie Mercière, celle des Prisonniers, puis le corridor des Peintres, le cortège, suivi

Weitere Kostenlose Bücher