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Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
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Champagne, quand elles ne rencontraient nulle barrière pour les empêcher d’envahir tout notre sol, quand il fallait frapper sur elles un coup immédiat, la commune de Paris, seule, dans un sursaut furieux dont il faut déplorer les excès mais dont on ne peut méconnaître les résultats, la commune de Paris, dis-je, a galvanisé le patriotisme et sauvé la France. Et tandis que vous êtes là, citoyens, à nous quereller sur des choses passées, que fait-elle, cette commune contre laquelle vous jetez l’anathème ? Elle équipe et envoie chaque jour mille hommes de plus aux armées. Songe-t-elle à les conserver pour les employer contre la Convention nationale ? Elle les jette aux frontières. Députés des départements ! comment ne rougirions-nous pas de détourner un seul de nos compatriotes pour nous constituer une garde prétorienne, quand leur unique devoir est de défendre la patrie ! » Interrompu par les applaudissements des tribunes et d’une grande partie de la salle, Claude les calma de la main et reprit : « Dans les assemblées précédentes, la Révolution avait des ennemis. Dans la Convention, il n’existe pas un homme, j’en ai l’absolue certitude, qui ne désire de toutes ses forces assurer le triomphe de la liberté, de l’égalité, de la justice. Effacez donc de votre esprit, de votre cœur, des craintes vaines. Votez l’unité, l’indivisibilité de la République, et soyez sûrs que le peuple auquel vous l’avez donnée saura, par lui-même, la maintenir. »
    Claude se rassit sous les acclamations. Tandis que ses collègues de la Haute-Vienne, Faye, Bordas, Gay-Vernon, le félicitaient, le débat, loin de se clore, rebondissait. Marat depuis un moment réclamait la parole, mais Panis, visé par les « on » de Barbaroux, tenait à répondre. Ses entrevues avec les chefs marseillais, déclara-t-il, n’avaient eu d’autre but que de concerter le siège des Tuileries. Invoquant lui aussi le témoignage de Pétion, il ajouta : « Président, vous étiez à la mairie, quelques jours avant le 10 août. Je soutenais, vous vous en souvenez assurément, qu’il fallait purger le Château des conjurés dont il était rempli. Nous n’avons de salut que dans une sainte insurrection, disais-je. Vous ne vouliez pas le croire. Je me séparai de vous. D’autres membres de la municipalité et moi, nous formâmes un comité secret. Un jeune Marseillais brûlant de patriotisme vint nous réclamer des cartouches. C’était Rebecqui. Nous ne voulions point lui en donner sans votre permission. Nous n’osions vous la demander parce que vous ne croyiez pas au péril. Rebecqui se mit un pistolet sous la gorge et cria : Je me tue si vous ne me donnez pas les moyens de défendre ma patrie ! Ce jeune homme nous arracha des larmes. Nous signâmes. Tels furent tous nos rapports avec lui. Quant à Barbaroux, je l’ai mené chez Robespierre, il est vrai, je le lui ai désigné comme un homme sur l’incorruptibilité et le caractère duquel on pouvait faire fond absolument, mais, je l’atteste par serment, il n’a jamais été question de dictature. »
    Claude se rappelait fort bien le récit fait par Barbaroux chez les Roland, peu avant le 10 août, de sa visite à la maison Duplay. Si, il y avait eu à cette époque, dans l’esprit de Panis, de Sergent, l’idée de confier à Maximilien une espèce de pouvoir exceptionnel, pour rallier toutes les forces anti-aristocratiques et sortir du chaos. Tâche dont il eût été d’ailleurs totalement incapable. Idée confuse qui n’avait jamais reçu le moindre commencement d’exécution. Fonder là-dessus une accusation de dictature était absurde. Et puis, tout cela n’existait plus. On perdait son temps à disputer sur des choses qui avaient pris fin à l’établissement de la République et ne pourraient plus se reproduire. Panis, s’efforçant de justifier le Comité de surveillance, s’écriait avec raison : « Nous vous avons sauvés, et vous nous calomniez ! Qu’on se reporte aux circonstances terribles où nous nous trouvions, où Roland ne savait que pleurer et parler, avec Brissot, de fuir à Bordeaux, dans le Midi, où sais-je encore ! Quand Danton, quand Vergniaud juraient de ne point reculer d’un pas et de s’ensevelir, s’il le fallait, sous les ruines de Paris, était-il déraisonnable de tenir pour suspects un ministre, un député semeurs de panique, prêts à s’enfuir ? Nous avons lancé contre eux des

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