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Les Aventures de Nigel

Les Aventures de Nigel

Titel: Les Aventures de Nigel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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de ne pas aimer beaucoup à se laisser manier.
    – Taisez-vous, jeune homme, dit maître Georges d’un ton d’autorité ; ne vous moquez jamais de l’étranger ni du pauvre. Le bœuf noir ne vous a pas encore marché sur le pied {20} . Vous ne savez encore ni dans quel pays vous pouvez faire voyage, ni quels habits vous pourrez porter avant de mourir.
    Vincent baissa la tête et ne répliqua rien ; mais l’inconnu ne fut pas content de ce qu’on venait de dire en sa faveur.
    – Que je sois étranger, monsieur, dit-il, c’est ce qui est certain, quoiqu’il me semble qu’en cette qualité on m’ait traité un peu familièrement dans votre ville. Mais si je suis pauvre, il me semble que personne n’a le droit de me le reprocher, jusqu’à ce que je demande de l’argent à quelqu’un.
    – C’est le cher pays, trait pour trait, dit tout bas maître Georges à David Ramsay ; orgueil et pauvreté.
    Mais David avait pris ses tablettes et sa plume d’argent ; et profondément enfoncé dans des calculs qui embrassaient toute la science des nombres depuis l’unité jusqu’aux millions, aux billions et aux trillions, il ne répondit pas à l’observation de son ami, parce qu’il ne l’avait pas entendue. Maître Georges, le voyant plongé dans ses méditations savantes, adressa la parole à l’Écossais.
    – Je m’imagine donc, Jockey, que si quelqu’un vous offrait un noble, vous le lui jetteriez à la tête ?
    – Non, si je pouvais lui rendre honnêtement service pour le gagner. Je suis disposé à me rendre utile autant que je le pourrai, quoique je sorte d’une maison honorable, et que je puisse me dire, en une certaine manière, assez à mon aise…
    – Oui-dà ! Et quelle maison réclame l’honneur de votre origine ?
    – La cotte d’armes en est usée, comme dit la comédie, souffla tout bas Jenkin à son compagnon.
    – Allons, Jockey, allons ; parlez donc, continua maître Georges qui remarquait que l’Écossais, suivant l’usage de ses compatriotes, toutes les fois qu’on lui faisait une question directe et précise, prenait quelques instans pour y répondre.
    – Je ne me nomme pas plus Jockey que vous ne vous nommez John, monsieur, dit l’étranger comme s’il eût trouvé mauvais qu’on lui donnât un nom par lequel on désignait alors généralement un Écossais, comme on le fait aujourd’hui par celui de Sawney. Mon nom, si vous voulez le savoir, est Richie Moniplies, et je sors de l’ancienne maison de Castle Collop, bien connue au West-Port d’Édimbourg.
    – Et qu’appelez-vous le West-Port ?
    – S’il plaît à Votre Honneur, dit Richie, qui, ayant assez retrouvé ses sens pour remarquer l’extérieur respectable de maître Georges, commença à lui parler avec plus de civilité qu’il ne l’avait fait d’abord ; le West-Port est une porte de notre ville, comme les arcades de briques de Whitehall forment ici l’entrée du palais du roi ; seulement le West-Port est construit en pierres, et il est décoré de plus d’ornemens d’architecture.
    – En vérité, l’ami, savez-vous bien que les portes de Whitehall ont été exécutées d’après les dessins du célèbre Holbein ? Je soupçonne que votre accident vous a dérangé le cerveau, mon bon homme. Vous me direz sans doute ensuite que vous avez à Édimbourg une rivière navigable aussi belle que la Tamise, avec tous les bâtimens qui la couvrent ?
    – La Tamise ! s’écria Richie avec un air de mépris inexprimable ; que Dieu fasse grâce au jugement de Votre Honneur ! nous avons à Édimbourg les eaux du Leith et le North-Loch.
    – Et le Pow-Burn, et le Quarry-Holes, et le Gusedub, dit maître Georges en parlant bon écossais avec un accent aussi naturel que fortement prononcé. Ce sont des vauriens comme vous qui détruisent ici par leurs mensonges la réputation de notre pays.
    – Que Dieu me pardonne, monsieur, dit Richie, fort surpris de voir l’Anglais supposé changé en véritable Écossais ; je prenais Votre Honneur pour un Anglais ; mais je pense qu’il n’y a pas grand mal à chercher à soutenir l’honneur de son pays dans une contrée étrangère où chacun ne songe qu’à le décrier.
    – Et croyez-vous faire honneur à votre pays en démontrant qu’un de ses enfans est un impudent menteur ? Mais allons, n’en prenez pas de chagrin. Vous avez trouvé un compatriote, et vous trouverez en lui un ami si vous le méritez, et surtout si vous me

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