Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec: Le roman du film
réussirait et il avait stocké des quantités de viande conséquentes. Il arbore maintenant un sourire épanoui, ce qui lui fait tout de même une drôle de tête.
— Tu as faim, c’est ça, hein ? dit-il, réjoui. Vas-y, mange mon bébé !
Et il balance une nouvelle côte de bœuf au jeune ptérodactyle, quand soudain, la sonnette de la porte d’entrée retentit.
Espérandieu écarquille les yeux. Qui peut bien venir chez lui à cette heure ? Il n’attend personne…
C’est l’inspecteur qui est sur le palier, un peu essoufflé par les quatre étages.
La porte d’Espérandieu s’entrouvre et le vieux Professeur passe timidement la tête. Il a l’air un peu nerveux. Faut dire que Caponi, même s’il esquisse un sourire aimable, a exactement l’allure du flic qu’il est, et qu’il est suivi de son adjoint Bertrand et d’autres flics en tenue. Il faut également tenir compte du fait qu’Espérandieu n’aime pas du tout être dérangé, en général, et en particulier quand il a enfin réussi à faire venir son « bébé », et que la bête est en train de manger dans le salon.
— C’est pour quoi ? demande Espérandieu, gentil mais un peu tremblotant.
— Inspecteur Caponi. J’ai quelques questions à vous poser sur les Pedrodactyles.
— Ptérodactyles, corrige Bertrand, provoquant un soupir de lassitude chez son chef.
— Oui, continue Caponi, et on m’a dit que vous étiez un spécialiste en la matière…
— Euh… En effet, mais c’est-à-dire que là… j’allais passer à table !
— Ah ! Je ne pouvais pas mieux tomber alors ! s’exclame Caponi.
Le Professeur ouvre la porte et laisse entrer le futur commissaire et ses hommes, avec un bruit de godillots incongru dans l’atmosphère feutrée de cet appartement débordant d’objets étranges et de meubles anciens, de vitrines et de livres rares.
Là, on craint le pire pour Espérandieu, car le Ptérodactyle qui terrorise Paris est plus que probablement toujours dans l’appartement en train de finir son déjeuner.
Mais, surprise, on ne voit plus que la moitié du salon, car Espérandieu a tiré un double rideau en velours épais, qui sépare la pièce en deux. Et plus trace du monstre.
Caponi remarque les étranges objets anciens disposés en cercle sur le sol. Ce n’est pas qu’il soit un très bon flic, contrairement à l’idée qu’il se fait de lui-même, mais il aurait été difficile de ne pas les voir, et Espérandieu n’a pas eu le temps de ranger. Caponi est un peu intrigué.
— Dites donc, dit-il, il fait bien sombre chez vous ?
— Je… je suis sensible à la lumière, bredouille le Professeur, puis il ajoute, Je vous en prie, asseyez-vous.
Caponi pose son chapeau sur la table et s’assied. Bertrand lui tend un café et un torchon.
— Ah, merci Bertrand. Vous permettez ? dit-il à Espérandieu, je n’ai rien avalé depuis hier.
— Faites, répond le vieux savant.
— Merci.
— Bon… Comment puis-je vous aider ? demande le Professeur, de plus en plus inquiet et impatient de voir toute cette flicaille sortir de chez lui.
Caponi ouvre le torchon à carreaux que Bertrand lui a donné.
— Tout d’abord en nous parlant un peu de l’animal, ses habitudes, où il dort, ce qu’il mange ?
— Euh… fait Espérandieu. On ne connaît pas bien ses habitudes, vous savez. On sait qu’il est plutôt carnivore…
— Ah ? Je le comprends, l’animal ! s’exclame Caponi, reprenant du poil de la bête dès qu’on évoque l’idée d’une bonne bouffe. Rien de meilleur qu’une bonne côte de bœuf, bien saignante !
Mais quand Caponi regarde ce que contient le petit torchon que lui a donné Bertrand, il grimace, effondré : il n’y a que des œufs durs.
— Désolé, chef, dit Bertrand, il n’y avait rien d’autre.
— Continuez, Professeur, dit le policier en soupirant de dépit. Je vous écoute.
Aucun des flics ne le remarque, mais ça bouge un peu derrière l’épais rideau de velours. Espérandieu est de plus en plus mal à l’aise.
— Eh bien… D’une envergure d’environ six mètres à l’âge adulte, il peut voler pendant plusieurs heures… À la recherche de sa nourriture, qu’il… rapportera au nid familial…
Caponi écoute comme à l’école, se préparant à éplucher son premier œuf dur. Il s’arrête subitement.
— Ah bon ? Vous pensez qu’ils sont plusieurs ? demande-t-il, d’un air inquiet.
— Non ! Non !
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