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Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions

Titel: Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Boyer
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voyais clairement, et j’en étais sûr, que ce qu’on peut détruire est inférieur à ce qui ne peut l’être. Je mettais sans hésiter ce qui est invulnérable au-dessus de ce qui ne l’est pas. Et ce qui ne souffre aucun changement était meilleur que ce qui peut changer.
    Ma conscience s’opposait violemment à tous mes fantasmes. Et d’un
coup, je m’efforçais de chasser ce tourbillon d’immondices loin de mon
esprit. À peine détournée, la masse revenait en un clin d’œil, s’engouffrait
dans mon regard et m’obnubilait. J’étais forcé de penser, si ce n’est à la
forme d’un corps humain, à quelque corps situé dans l’espace ourépandu à travers le monde ou hors du monde, diffus à l’infini. Un être
indestructible, invulnérable et immuable que je mettais au-dessus de tout
être destructible, vulnérable et changeant. Parce que tout ce que je privais de cette spatialité me semblait être rien. Absolument rien. Pas simplement un vide comme celui qui se forme en faisant disparaître un corps
laissant derrière lui un espace vacant de tout corps, qu’il soit de terre,
d’eau, d’air ou cosmique. Un lieu vide comme une sorte de vaste rien.
    2.
    J’avais la conscience trouble. J’étais sans vision de moi-même. Tout
ce qui ne pouvait dans l’espace se déployer, se répandre ou se condenser, se gonfler, prendre ou être capable de prendre une forme, n’était
pour moi que du rien. Oui, les images de ma conscience ressemblaient
aux formes que mes yeux avaient l’habitude de rencontrer. Et je ne
voyais pas que cet effort de création de ces images était quelque chose
d’autre qu’elles. Quelque chose de puissant sans quoi elle n’aurait pu
les créer. Et même toi, vie de ma vie, je te représentais grandeur à travers les espaces infinis, pénétrant toute la masse du monde, et en
dehors, de tous les côtés, à travers les immensités sans limites. Tu étais
dans la terre, tu étais dans le ciel, tu étais dans toutes les choses. Tu étais
leur limite mais toi tu n’en avais nulle part.
    La lumière du soleil ne rencontre aucun d’obstacle dans la masse de
l’air, l’air qui est au-dessus de la terre. Elle traverse par pénétration sans
rien rompre ni déchirer, et en remplissant tout. Et j’imaginais que toi
aussi, tu passais non seulement dans le corps du ciel, des airs et de la
mer mais aussi de la terre. Et que tu pénétrais toutes les parties, les plus
grandes comme les plus petites, pour qu’elles captent ta présence. Ton
inspiration secrète dirige dedans et dehors tout ce que tu as créé.
    C’était ce que je soupçonnais, incapable d’imaginer autre chose.
J’avais tort. Dans ce cas, en effet, une partie plus importante de la terre
aurait une partie de toi plus importante ; et une plus petite d’elle, une
plus petite de toi. Et si toutes les choses étaient pleines de toi, le corps
d’un éléphant contiendrait plus de toi que celui d’un passereau – étant
plus grand et occupant une plus grande place. Tu serais dispersé en
fragments à travers le monde, d’importantes parts de toi dans les grosfragments, de petites parts dans les petits. Or ce n’est pas ça du tout.
Mais tu n’avais pas encore éclairé ma nuit.
    3.
    Seigneur, contre ces trompeurs trompés et ces bavards muets – puisqu’ils ne faisaient pas entendre ta parole – ce que Nébridius avait
l’habitude de proposer depuis longtemps déjà, dès Carthage, m’aurait
suffi. Tous, en l’entendant, avions été ébranlés.
    Qu’aurait pu faire contre toi je ne sais quelle force obscure dans le
camp ennemi si tu avais refusé de combattre ? Car si la réponse est
qu’elle aurait pu te faire du mal, tu aurais supporté les coups et la destruction. Et si on dit au contraire qu’elle n’aurait rien pu te faire, on
n’apporte plus aucune raison de combattre. Et dans ce combat, une
certaine partie de toi, un de tes membres ou une expression de ta
substance se serait mêlé aux puissances ennemies, des natures que tu
n’aurais pas créées. Elles t’auraient détruit, transformé en pire, te faisant passer du bonheur au malheur. Tu aurais même eu besoin d’aide
pour t’en arracher et t’en purifier. Et l’âme esclave serait venue au
secours de ta parole libre. La souillure au secours du pur, la destruction
au secours de l’intégrité. Mais ta parole, issue de la même et unique
substance, n’échapperait pas à la destruction. Ainsi s’ils disent que toi,
quoi que

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