Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions
dans le ciel et sur la terre
son nom est important
son nom est extraordinaire
Tes paroles s’étaient fixées dans mes entrailles. Tu étais partout
autour de moi. J’étais sûr de ta vie éternelle. Même si je ne l’avais vue
qu’au travers d’un miroir, de façon énigmatique. Plus de doute, pourtant : il existait une substance incorruptible d’où procédait toute sub-stance. Je ne cherchais pas à être plus certain de toi mais à être plus
constant avec toi. Mais tout, dans ma vie temporelle, était flottement.
Il fallait nettoyer le cœur du vieux levain. La voie du plaisir, c’est le
sauveur lui-même. Mais passer par ses étranglements m’inquiétait
encore.
Tu m’as alors suggéré, ce qui m’a paru une bonne idée, d’approcher
Simplicianus. C’était, à mes yeux, ton bon serviteur. Plein de la
lumière de tes faveurs. Et puis j’avais entendu que, dès sa jeunesse, il
t’avait entièrement dévoué sa vie. Maintenant un vieil homme, il
devait être très expert, très savant, me semblait-il, pour avoir suivi
pendant tout ce temps ta voie avec un tel zèle. Il me le prouva. Je voulais, en m’entretenant avec lui de mes passions houleuses, qu’il me
révèle le moyen pour quelqu’un d’aussi malade que moi de marcher
dans ta voie.
2.
Oui, je voyais que l’église était pleine mais chacun avançait à son
rythme. Je n’aimais pas ce que je faisais dans le monde. C’était devenu
écrasant pour moi. Le feu du désir n’était plus le même. Autrefois, je
comptais sur les honneurs et l’argent pour m’aider à supporter une si
lourde servitude. Mais cela ne me plaisait plus comparé à ta douceur et
à la beauté de ta maison que j’aimais.
J’étais encore très attaché à une femme. Ton messager ne m’a pas
interdit cette liaison, même s’il m’encourageait à quelque chose de
meilleur, en voulant que tous les hommes soient comme lui. Et moi,
trop fragile encore, j’avais préféré une condition plus molle. Dans le
seul but, par ailleurs, de m’enfoncer dans la lassitude apathique de
soucis débilitants. Or je ne voulais pas me plier à d’autres obligations,
liées à la vie conjugale. Qui m’enchaîneraient une fois que je m’y
serais soumis. J’avais entendu de la bouche de la vérité que des
eunuques s’étaient eux-mêmes châtrés pour atteindre le royaume des
cieux.
Comprenne qui pourra, dit la vérité.
Oui vides, absolument vides, tous les hommes habités par l’ignorance de Dieu, ceux qui, à partir des choses visibles, n’ont pas su reconnaître celui qui est 1 .
J’avais dépassé ce vide. Je l’avais transcendé. Prenant à témoin la
création universelle, je t’ai découvert : notre créateur, ainsi que ta
parole, Dieu près de toi, Dieu unique avec toi, par qui tu as tout créé.
Et d’autres sans religion, connaissant Dieu, n’ont pas en tant que
Dieu célébré son éclat ni ne l’ont remercié.
Voilà où j’étais tombé. Ta main droite m’a soutenu. Tu m’as sorti de
là et permis que je reprenne des forces. Parce que tu as dit à l’homme :
l’amour fidèle est sagesse.
Ne cherche pas à paraître sage, car se disant sages, ils sont devenus fous.
J’avais découvert la perle rare. Pour l’acheter, je devais vendre tout ce
que j’avais.
J’hésitais encore.
3.
Me voici donc chez Simplicianus 2 . Parrain d’Ambroise, l’évêque
d’alors, qui l’aimait comme un père. Je lui raconte mes égarements. Et
quand je lui indique que j’ai lu certains livres des Platoniciens, traduits
naguère en latin par Victorinus 3 , un rhéteur romain – mort chrétien,
m’avait-on dit. Il me félicite de ne pas être tombé sur les écrits d’autres
philosophes, remplis de mensonges et de déceptions conformes aux
éléments de ce monde. Dans ceux-là, au moins, s’insinuait de toutes les
manières possibles l’idée de Dieu et de sa parole.
Et pour m’exhorter à la simplicité du Christ, cachée aux savants et
révélée aux tout petits, il évoque le souvenir de Victorinus lui-même. Ill’avait très bien connu à Rome. Et je ne tairai pas ici son récit. C’est
témoigner en ta faveur de ta grande bonté. Ce vieil homme, d’une
grande culture, et expert des arts libéraux, avait lu et discuté de nombreux philosophes. Et instruit tant de nobles sénateurs que l’éclat
exceptionnel de son enseignement lui avait valu et obtenu un honneur
sans égal aux yeux des citoyens de ce monde : une statue sur
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