Les chasseurs de mammouths
dit soudain Ayla. Uba est sa mère. C’est
elle qui l’a élevé, qui a pris soin de lui et elle a dû soigner les bobos qu’il
s’est faits lorsqu’il a commencé à chasser. Comment pourrais-je lui enlever
Durc maintenant ? S’il n’est plus là, qui prendra soin d’elle quand elle
sera vieille ? Même quand il était un bébé, ce sont les autres femmes du
Clan qui se sont occupées de lui car je n’avais plus de lait.
De toute façon, je ne peux pas retourner là-bas pour aller le
chercher. J’ai été maudite. Aux yeux du Clan, je suis morte ! Si Durc me
voit, je vais lui faire peur. Et tout le monde réagira comme lui. Et même si je
n’avais pas été maudite, serait-il heureux de me voir ? Se souviendrait-il
même de moi ?
Il était encore très jeune quand je suis partie. Actuellement,
il doit se trouver au Rassemblement du Clan et il a certainement rencontré Ura.
Même s’il est encore un peu jeune pour ça, il doit commencer à penser au moment
où elle deviendra sa compagne. Il doit penser à son futur foyer – comme
moi. Même si j’arrivais à le convaincre que je ne suis pas un esprit, il
faudrait que j’emmène aussi Ura. Et ici, elle serait affreusement malheureuse.
Cela va déjà lui être difficile de quitter son propre clan pour venir vivre
dans celui de Durc, mais si elle est soudain obligée de vivre dans un monde
complètement différent du sien, ce sera terrible pour elle. Surtout qu’elle n’y
rencontrera que haine et incompréhension.
Et si je revenais dans la vallée ? Et que j’y ramène Durc
et Ura ? Mais Durc a besoin de vivre avec des gens... et moi aussi. Je ne
veux plus vivre seule. Pourquoi accepterait-il de vivre tout seul dans la vallée
avec moi ?
J’ai pensé à moi et non à lui. Ce ne serait pas une bonne chose
pour lui de vivre ici. Il ne serait pas heureux. Je me réjouissais qu’il vienne
vivre avec moi, mais je ne suis plus sa mère. Sa mère, c’est Uba. A ses yeux,
sa vraie mère est morte et peut-être est-ce mieux ainsi. Son monde, c’est le
Clan, et que ça me plaise ou non, le mien, c’est ici. Je ne peux pas revenir
dans le Clan et Durc ne peut pas venir vivre ici. Il n’y a pas un seul endroit
dans ce monde où mon fils et moi puissions vivre ensemble et être heureux.
Le lendemain matin, Ayla se réveilla aux aurores. Elle s’était
endormie très tard et s’était réveillée plusieurs fois pendant la nuit après
avoir rêvé que la terre tremblait et que des cavernes s’effondraient. Elle se
sentait mal à l’aise et déprimée. Elle aida Nezzie à mettre l’eau à chauffer
pour la soupe du matin et à moudre des céréales et elle en profita pour parler
avec elle.
— Je suis vraiment désolée d’être la source de tous ces
ennuis, lui dit-elle. A cause de moi, le Camp du Lion va être maintenant tenu à
l’écart.
— Ce n’est pas de ta faute, Ayla. Il fallait faire un choix
et nous l’avons fait. Tu as pris la défense de Rydag et il fait, lui aussi,
partie du Camp du Lion, à nos yeux en tout cas.
— A cause de ce problème, je me suis soudain rendu compte
de quelque chose, expliqua Ayla. Depuis que j’ai quitté le Clan, j’ai toujours
pensé que j’y retournerais pour chercher mon fils. Mais maintenant, je sais que
ça n’est pas possible. Je ne peux pas le ramener ici, ni retourner là-bas. J’ai
l’impression de l’avoir perdu à nouveau, et cette fois-ci à jamais. J’aimerais
pouvoir le pleurer, mais j’en suis incapable.
Nezzie était allée chercher des baies qu’ils avaient ramassées
la veille et elle était en train de les éplucher. Elle s’arrêta de travailler
pour regarder Ayla.
— Tout le monde connaît des déboires dans la vie et tout le
monde perd ceux qu’il aime. Toi, tu as été séparée des tiens alors que tu étais
toute jeune. Et pour toi, ça a été une véritable tragédie. Mais tu ne pouvais
rien y faire. Si tu t’étais reproché quoi que ce soit, cela aurait été encore
pire. Wymez se reproche continuellement la mort de la femme qu’il aimait. Je
pense que Jondalar se reproche celle de son frère. Toi, tu as perdu ton fils. C’est
toujours très dur pour une mère de perdre un enfant, mais il te reste au moins
un espoir. Tu peux te dire qu’il est certainement toujours en vie. Rydag a
perdu sa mère... Et moi, un jour, je vais le perdre.
Après le repas du matin, Ayla quitta la tente. Elle s’aperçut
aussitôt que la plupart des membres du Camp du
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