Les chasseurs de mammouths
peaux. Les rapporter demandait déjà beaucoup d’efforts,
ce qui justifiait le tri rigoureux. Ils n’emportaient que les meilleures peaux.
Ils sélectionnaient la viande avec encore plus de soin, ne conservaient que la
viande bien grasse, et abandonnaient le reste.
Ce n’était pas du gâchis. Les Mamutoï portaient les charges à
dos d’homme, et le transport des bas morceaux leur coûterait davantage de
calories qu’ils n’en gagneraient à manger de la viande maigre. Grâce à une
sélection judicieuse, la viande nourrirait de nombreuses bouches et ils ne
seraient plus obligés de chasser avant longtemps. Ceux qui vivaient de la
chasse ne tuaient jamais inutilement. Ils étaient proches de la Grande Terre
Mère, savaient ce qu’ils Lui devaient et ne gaspillaient pas Ses ressources.
Pendant que les chasseurs dépeçaient les mammouths, le temps
resta dégagé et l’écart de température entre le jour et la nuit s’accentua.
Bien qu’ils fussent près du glacier, le soleil chauffait suffisamment quand il
perçait pour sécher la viande la moins grasse et l’alléger pour le transport.
Mais les nuits appartenaient aux glaces. Le jour de leur départ, le vent
changea et le ciel se couvrit de nuages épars à l’ouest. La température chuta d’un
coup.
Lorsque les chevaux d’Ayla furent chargés pour le retour, les
Mamutoï les apprécièrent enfin à leur juste valeur. Les travois furent l’objet
d’un intérêt particulier. Nombreux étaient ceux qui s’étaient étonnés de l’insistance
d’Ayla à emporter les longues perches. Ce n’était pourtant pas des sagaies !
A présent, ils comprenaient et manifestaient leur approbation avec force
gestes. L’un des Mamutoï s’amusa même à tirer un travois à moitié chargé.
Impatients de rentrer, les chasseurs se levèrent de bonne heure,
mais la matinée était déjà bien entamée quand ils se mirent en route. Vers le
début de l’après-midi, ils avaient gravi une colline en empruntant un chemin de
sable et de graviers jonché de rocs que le glacier avait déposés dans une de
ses avancées antérieures. Ils se reposèrent au sommet d’où Ayla contempla le
glacier dépouillé de son linceul de brume. Elle ne pouvait en détacher son
regard.
Scintillant au soleil, une barrière de glace aussi haute qu’une
montagne s’étendait à perte de vue, délimitant une frontière infranchissable. C’était
véritablement la fin de la terre.
Ses bords inégaux recelaient des accidents de terrain mineurs,
et une escalade aurait révélé des pendages et des crêtes, des séracs et des
crevasses, importants à l’échelle humaine. Mais à l’échelle du gigantesque
glacier, la surface était uniformément plate. Le vaste glacier inexorable
recouvrait un quart de la planète de sa carapace scintillante. Lorsque la
troupe des chasseurs s’ébranla, Ayla ne cessait de se retourner pour admirer le
glacier que des nuages et une brume montante commençaient d’habiller d’un voile
mystérieux.
Malgré leur chargement, les chasseurs avançaient plus vite qu’à
l’aller. L’hiver modifiait assez la topographie pour qu’un nouvel itinéraire
eût besoin d’être exploré chaque année, mais la voie du retour leur était
connue maintenant. La chasse avait été réussie et l’atmosphère était à la joie
et à la bonne humeur. On se hâtait de rentrer à la Réunion d’Été et personne ne
semblait plier sous le poids de son fardeau, excepté Ayla. Le pressentiment qui
l’avait taraudée à l’aller se faisait maintenant plus pressant, mais elle évita
de mentionner ses craintes.
Le sculpteur avait du mal à réfréner son enthousiasme. Seul l’intérêt
constant que Vincavec continuait de porter à Ayla l’inquiétait, et il en
éprouvait confusément une vague appréhension. Mais Ayla restait sa Promise et
ils rapportaient la viande pour la Cérémonie de l’Union. Même Jondalar semblait
s’être accoutumé à l’idée de leur Union, et par une sorte d’accord tacite,
Ranec devinait que le géant avait pris son parti contre Vincavec. Le sculpteur
appréciait les nobles qualités du Zelandonii et une espèce d’amitié s’ébauchait
entre les deux hommes. Néanmoins, Ranec voyait une menace potentielle dans la
présence de Jondalar qui pouvait encore faire obstacle à son bonheur. Ranec
avait hâte que le Zelandonii les quitte.
Ayla n’attendait pas la Cérémonie de l’Union avec autant de
plaisir et se reprochait son
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