Les chasseurs de mammouths
enfin.
— Oui. Dans Clan, chef a plus grand statut, ensuite chasseur
élu, ensuite autres chasseurs. Mog-ur a grand prestige aussi mais est
différent. Il est... homme de monde des esprits.
— Et les femmes ?
— Femmes ont statut de compagnons, mais femme guérisseuse a
statut à elle.
Les commentaires d’Ayla surprenaient Jondalar. Elle lui en avait
beaucoup appris sur les Têtes Plates, mais il avait encore peine à imaginer qu’ils
fussent capables de saisir un concept aussi complexe que celui de la
hiérarchie.
— C’est bien ce que je pensais, fit doucement Mamut, avant
de poursuivre ses explications. Nous révérons la Mère, qui crée et qui nourrit
toute vie. Les êtres humains, les animaux, les plantes, l’eau, les arbres, les
rochers, la terre. Elle leur a donné naissance. Elle les a tous créés. Quand
nous invoquons l’esprit du mammouth, celui du cerf, celui du bison, pour
demander l’autorisation de les chasser, nous savons que c’est l’Esprit de la
Mère qui leur a donné la vie. C’est Son Esprit qui fait naître un autre
mammouth, un autre cerf, un autre bison pour remplacer ceux qu’Elle nous a
donnés pour nourriture.
— Nous disons que c’est le Don de Vie de la Mère, intervint
Jondalar, intrigué.
Il cherchait avec intérêt jusqu’à quel point les coutumes des
Mamutoï ressemblaient à celles des Zelandonii.
— Mut, la Mère, continua le vieil homme sage, a choisi les
femmes pour nous montrer comment Elle a pris en Elle l’esprit de vie, afin de
créer et de mettre au monde de nouvelles vies qui remplacent celles qu’Elle
rappelle à Elle. Les enfants apprennent cela en grandissant, à partir de légendes,
de contes et de chants, mais tu as dépassé ce stade, Ayla. Il nous plait d’entendre
des histoires, même quand nous devenons vieux, mais toi, tu dois comprendre le
courant qui les anime, ce qu’elles cachent, afin de saisir les raisons qui ont
fondé bon nombre de nos coutumes. Chez nous, le statut repose sur la mère de
quelqu’un, et le Prix de la Femme est notre manière de prouver la valeur.
Ayla, fascinée, hocha la tête. Jondalar avait bien essayé de lui
expliquer ce qu’était la Mère, mais, avec Mamut, tout semblait plus,
raisonnable, beaucoup plus facile à comprendre.
— Quand les hommes et les femmes décident de former une
Union, l’homme et son Camp offrent des cadeaux nombreux à la mère de la femme
et à son Camp. La mère ou la Femme Qui Ordonne décide du prix – elle
fixe un nombre de cadeaux – pour la fille. Il arrive qu’une femme
fixe son propre prix, mais celui-ci dépend de bien autre chose que sa volonté
personnelle. Aucune femme ne souhaite se voir sous-évaluée, mais le prix ne
doit pas être trop élevé : l’homme de son choix ou son Camp pourraient
alors ne pas avoir les moyens de le payer ou ne pas souhaiter le faire.
— Pourquoi payer pour avoir une femme ? demanda
Jondalar. Cela ne fait-il pas d’elle une sorte de marchandise, comme le sel, le
silex ou l’ambre ?
— La valeur d’une femme est bien supérieure. Le Prix de la
Femme est ce que paie un homme pour avoir le privilège de vivre avec une femme.
Un bon Prix de la Femme profite à tout le monde. Il confère à la femme un
statut important, il dit à tout le monde en quelle estime elle est tenue par l’homme
qui la désire et par son propre Camp. Il fait honneur au Camp de l’homme, en
faisant savoir que ce Camp est riche et peut se permettre de payer le prix. Il
honore aussi le Camp de la femme, témoigne de l’estime et du respect en
lesquels on le tient, lui offre une compensation pour la perte de cette femme,
si elle part, comme le font certaines, pour vivre dans un nouveau Camp ou dans
celui de l’homme. Mais, plus important encore, le Camp prouve sa richesse s’il
paie un bon Prix de la Femme lorsqu’un de ses membres veut une femme.
« Les enfants bénéficient dès leur naissance du statut de
leur mère il est donc bon pour eux que le Prix de la Femme soit élevé. Bien que
le Prix de la Femme soit payé en cadeaux, dont certains permettront au couple
de commencer sa vie commune, la véritable valeur est le statut, la
considération accordée à la femme par son propre Camp et par tous les autres,
la valeur qu’elle apporte à son compagnon et à ses enfants.
Ayla restait encore quelque peu perplexe, mais Jondalar hochait
la tête : il commençait à comprendre. Les détails n’étaient pas tout à
fait les
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