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Les chemins de la bête

Les chemins de la bête

Titel: Les chemins de la bête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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commise, tous depuis l’origine de
cette chaîne, ainsi que l’avait nommée la mendiante chypriote. Les deux thèmes
astraux qui figuraient dans le carnet du chevalier du Temple étaient erronés.
L’équatoire qui avait permis de les interpréter était une aberration déduite
d’une théorie astronomique obsolète.
    Le moine mathématicien d’un monastère italien, le monastère
de Vallombroso [101] ,
avait découvert la vérité pour la remiser bien vite, de peur des conséquences.
Il était mort peu après de façon mystérieuse, se fracassant le crâne contre un
pilier de cave, et son carnet de travail n’avait jamais été retrouvé. Jusqu’au
jour où Humeau le voleur avait dressé un petit inventaire des ouvrages de la
bibliothèque privée du pape qu’il pouvait fournir à ses commanditaires. Leone
s’était porté acquéreur, renchérissant contre un autre acheteur inconnu.
Gachelin Humeau avait joué les belles, tentant, se dérobant, et surtout faisant
monter les enchères. Mon Dieu, qui devait-il favoriser ? atermoyait-il. Il
voulait faire plaisir à tous, mais les affaires étaient les affaires. En un
seul geste, si rapide que le vendeur scélérat avait à peine eu le temps de
cligner des paupières, Leone avait tiré sa dague, saisi l’autre au cou et
appuyé la lame aiguë contre sa gorge en énonçant d’un ton calme :
    — À combien évalues-tu ta vie ? Vite, un prix, que
tu ajouteras à la somme que je viens de t’offrir. La proposition des autres
enchérisseurs est-elle toujours supérieure ?
    Il ne s’agissait pas de menaces en l’air, et Humeau l’avait
senti. Il lui avait cédé l’ouvrage subtilisé de mauvaise grâce, contre une
somme exorbitante, toutefois.
    Réserve ta pitié à ceux qui en sont capables, avait prévenu
la fillette.
    La lecture du traité avait stupéfait Leone. Il existait
d’autres planètes, plus lointaines, que l’on ne pouvait apercevoir mais dont
des calculs avaient révélé la réalité. Il s’agissait de deux étoiles géantes [102] , baptisées GE1 et GE2 par leur
découvreur, et d’un astéroïde sans doute moins gros que la Lune mais d’énorme
densité [103] ,
qu’il avait nommé As. S’ajoutait à cette révélation, une autre stupeur :
la Terre n’était pas immobile, plantée au milieu du firmament. Elle tournait
autour du Soleil.
    De laborieux et complexes calculs avaient ensuite occupé le
chevalier durant des semaines. Il lui fallait repartir de la position des
planètes dans les signes et dans les maisons du zodiaque pour retrouver les
dates de naissance des deux êtres, ou de survenue des deux événements dont les
cartes de ciel étaient si voisines. Ses déductions étaient encore partielles,
puisqu’il lui manquait des données sur la révolution de GE2. Pourtant, il avait
franchi une nouvelle étape dans leur élucidation et déduit une première date :
premier décan du Capricorne, 25 décembre. Le jour de la Noël. Le jour de
naissance d’Agnès de Souarcy.
    La rune Ing, celle de l’erreur, était dépassée. Leone
attendait le signe qui lui permettrait de compléter ces thèmes astraux, et
surtout de comprendre leur cruciale importance. Il attendait également que se
révèlent ses « si puissants et si secrets ennemis ». Il les sentait,
tapis dans l’ombre, prêts à frapper. Leur terrible riposte avait déjà
commencé : Benoît XI était tombé sous leurs coups, Leone n’en doutait pas.
    Il se dirigea vers l’un des meubles de bibliothèque et le
poussa d’un élan brusque. La haute étagère glissa sur ses rails invisibles,
découvrant une dalle plus large et plus claire que les autres. Une sorte de
coffre avait été creusé en dessous. Le manuscrit de Vallombroso patientait,
soigneusement enveloppé dans un lin badigeonné de cire d’abeille qui le
protégeait de l’humidité et des insectes. Dessous gisait l’autre volume, le
deuxième, qu’il n’avait parcouru qu’une fois, une salive de nausée lui
remontant dans la gorge. Il ne l’avait acheté à Humeau que pour le détruire, et
puis, quelque chose l’en avait dissuadé. Un ouvrage de nécromancie, rédigé par
un certain Justus. D’odieuses recettes s’y succédaient. Leur but n’était pas
d’établir de simples conversations avec l’au-delà, mais de harceler les morts,
de les soumettre en esclavage afin qu’ils vous servent. Un frisson de dégoût
hérissait Leone à chaque fois que son regard se posait sur la couverture

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