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Les chevaliers de la table ronde

Les chevaliers de la table ronde

Titel: Les chevaliers de la table ronde Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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moment où il s’assoupissait, il
entendit une voix : « Dors-tu, bel ami ? » Il tressaillit, ouvrit
les yeux et vit le feu qui flambait. La voix se fit entendre de nouveau :
« Entre donc, chevalier ! » Le Bel Inconnu avait oublié l’ordre
de la Pucelle aux Blanches Mains. Il se leva, revêtit son manteau et se dirigea
vers la chambre de la belle. Mais, alors, il s’aperçut qu’il marchait sur une
planche et que, par-dessous, roulaient des vagues grosses comme celles d’une
mer en furie. Il s’arrêta, ne voulant ni avancer ni reculer, tant il lui
semblait que la planche était étroite. Il voyait l’eau bouillonner et n’osait
pas rester debout. Il se baissa, prit la planche à deux mains et demeura pendu
dans le vide. Mais ses bras se fatiguèrent vite et il eut grand-peur de tomber.
« À l’aide ! cria-t-il, je vais me noyer ! »
    Les valets l’entendirent. Ils accoururent en portant des
torches et des chandelles. Ils trouvèrent le Bel Inconnu pendu au perchoir d’un
épervier. Quand il se vit en telle position, le Bel Inconnu en eut grande honte.
Tout ébahi et confus, il rentra dans sa chambre, tandis que les valets
retournaient se coucher. « Que s’est-il passé ? se demandait le Bel
Inconnu. J’ai été victime d’un enchantement, c’est certain. C’est la Pucelle
qui en est la cause, c’est elle qui m’a fait endurer ce mal. Pourquoi n’irais-je
pas lui parler pour apaiser mon angoisse ? »
    Il regarda vers la chambre de la Pucelle. Quand il estima
que les valets s’étaient rendormis, il se leva de nouveau et marcha vers la
porte de la Pucelle. Mais, alors, il lui sembla qu’il portait sur les épaules
toutes les voûtes de la forteresse. Ce fardeau écrasant lui froissait les os et
déjà il se sentait défaillir. « À l’aide ! cria-t-il, à l’aide !
Bonnes gens, où êtes-vous ? Ce palais vient de s’effondrer sur mon dos et
je ne peux plus supporter ce fardeau ! »
    Les valets accoururent de nouveau et virent le Bel Inconnu
qui portait son oreiller à deux mains sur sa nuque. Quand il s’en aperçut, il
se retira à grande honte et confusion. Alors, il se rappela le conseil d’Hélie
et les dispositions qu’elle avait prises pour leur départ. Il ne pensa plus qu’à
fuir la magicienne qui l’ensorcelait ainsi. Et dès que l’aube commença à
poindre, il se vêtit en hâte et descendit. Le portier lui ouvrit sans défiance.
Il retrouva, devant la chapelle, Hélie, le nain et son écuyer qui tenait son
cheval par le frein. Sans perdre un instant, ils se mirent en selle et
sortirent de la ville. Le soleil reluisait sur les bois et sur les plaines. Ils
chevauchaient à bonne allure et, sur son palefroi, la jeune Hélie chantait
joyeusement.
    À la fin de la journée, ils s’arrêtèrent devant une
forteresse aux tours antiques et aux fortes assises. La grosse tour était élevée,
et les murailles très hautes. Autour de la forteresse était un gros bourg
populeux qui semblait riche. La contrée était belle et verdoyante, pleine de
cultures et de vignes. « C’est le Château Galigan, dit Hélie. Mais je ne
donnerai pas le conseil de loger en cette ville. J’en ai entendu parler comme d’un
endroit où il est très mauvais d’aller, à cause d’une coutume qui n’est guère
plaisante. Le seigneur Lampart, qui habite là, n’accueille aucun chevalier qui
ne daigne se mesurer d’abord avec lui. Si celui qui se présente renverse le
seigneur, il est logé avec les plus grands égards, mais s’il est renversé par
le maître des lieux, il doit traverser la ville à pied et souffrir mille
affronts de la part des bourgeois, lesquels lui jettent à la figure des
torchons embourbés et des pots pleins de cendre et d’ordures. Il vaudrait mieux
nous éloigner. – Je ne me laisserai pas ainsi intimider, répondit le Bel
Inconnu. Je veux être logé dans cette ville, et je jouterai avec le seigneur du
lieu. Avec l’aide de Dieu, je saurai bien le forcer à nous faire de la place. »
Ils se remirent en marche et franchirent les murailles du bourg, puis s’engagèrent
dans la grande rue. Les habitants les suivaient en ricanant et se les
montraient du doigt, car ils imaginaient par avance l’étranger déconfit par
Lampart. Et ils préparaient les torchons pleins de boue et les pots remplis de
cendre et d’ordures. Quant au seigneur, il achevait une partie d’échecs avec un
chevalier qu’il avait maté la veille. Il aperçut le Bel

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