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Les chevaliers de la table ronde

Les chevaliers de la table ronde

Titel: Les chevaliers de la table ronde Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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laisser cet honneur. Permets-moi seulement de te
rappeler que ton impétuosité t’a toujours attiré des ennuis, et cela malgré ta
valeur et ton grand courage. – Ne crains rien pour moi, répondit Kaï, je saurai
bien revenir avec le frein. Mais j’aimerais que cette jeune fille m’accordât
tout de suite le baiser que je mériterai. » La jeune fille parut très
irritée : « Il n’en est pas question, dit-elle. Reviens avec le frein
et tu auras ta récompense à ce moment-là. En attendant, monte sur cette mule et
laisse-toi conduire. Surtout prends garde de ne jamais la contraindre, de
quelque côté qu’elle veuille aller. »
    Sans plus attendre, Kaï se fit apporter sa lance, son épée
et son bouclier. Il revêtit son haubert et monta sur la mule. Aussitôt, celle-ci
détala au petit trot et se dirigea vers la forêt, sous les yeux étonnés de tous
ceux qui se trouvaient rassemblés devant la forteresse. Quant à la jeune fille,
on vit bien qu’elle demeurait triste et désespérée parce qu’elle doutait fort
que Kaï pût réussir dans son entreprise.
    Cependant, la mule poursuivait son chemin. Après être sortie
de la forêt, elle traversa une grande plaine et s’enfonça dans un bois très
touffu et très sombre, sur un sentier qui tournait et retournait sans cesse. Dès
qu’elle fut dans le bois, des bêtes surgirent des fourrés, des lions, des
léopards, des tigres, ce qui plongea Kaï dans une grande terreur, car il n’avait
aucun moyen de se défendre contre leur férocité. Mais, à son grand étonnement, les
bêtes sauvages s’agenouillèrent devant la mule, car elles la connaissaient bien
comme elles connaissaient la jeune fille à qui elle appartenait. Quant à la
mule, elle suivait sans hésiter le sentier, et il était visible qu’elle le
fréquentait depuis bien longtemps. C’est ainsi qu’elle sortit de la forêt et qu’elle
pénétra dans une très large et très profonde vallée.
    Là, la terreur de Kaï redoubla, car, au fur et à mesure que
la mule avançait, il voyait surgir d’énormes couleuvres, des serpents de toutes
sortes, des scorpions et d’autres bêtes dont la gueule crachait du feu. Et, de
plus, il y avait dans cette vallée une puanteur telle qu’il n’en avait jamais
senti de semblable, et il y régnait un froid plus intense que celui qu’on
aurait pu observer en plein cœur de l’hiver sur le sommet d’une haute montagne.
Mais la mule ne semblait prêter aucune attention à ce qui l’environnait. Elle
continuait son chemin et déboucha bientôt dans une plaine au milieu de laquelle
se trouvait une fontaine très claire et très pure, entourée de fleurs, de pins
et de genévriers. La mule s’arrêta et se mit à boire. Kaï descendit lui-même du
dos de la bête et s’abreuva longuement, car il était fort altéré. Puis ils
reprirent leur chemin.
    Ils parvinrent alors au bord d’une grande rivière. Mais Kaï
fut très désorienté de la voir aussi large et profonde. Il eut beau longer la
rive pendant longtemps, il ne découvrit ni passerelle, ni pont, ni gué. N’y
avait-il donc aucun moyen de franchir cette rivière ? À la fin, Kaï vit
une planche qui reliait les deux berges, mais c’était une planche de métal très
lisse, et si étroite qu’il paraissait impossible de s’y engager sans glisser et
tomber au plus profond des eaux noires qui bouillonnaient au-dessous. La mule s’était
arrêtée, semblant attendre que Kaï prît une décision. Mais jugeant qu’il
risquait sa vie pour peu de chose, Kaï, en maugréant contre la futilité des
femmes qui perdent le frein de leur mule, préféra faire demi-tour. Et la mule
refit le chemin en sens inverse, traversa la vallée aux bêtes immondes, la
forêt où rugissaient les animaux féroces, et finalement se retrouva sur la
prairie devant la forteresse de Kaerlion.
    Kaï n’était pas très fier. Il s’abstint de tout commentaire
et préféra regagner son logis, profondément ulcéré parce que tous ceux qui se
trouvaient là étaient les témoins de son échec. Et la jeune fille à la mule se
mit à pleurer, se lamentant sur son sort. Le roi Arthur était plutôt agacé par
cette situation : il devait aide et assistance à cette jeune fille comme
il le devait à tous ceux qui lui réclamaient justice ; mais il pensait qu’un
frein de mule ne valait peut-être pas qu’on exposât, pour le retrouver, la vie
d’un bon chevalier. « Puisque c’est ainsi, dit-il, je vais y

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