Les conquérants de l'île verte

la femme primordiale Cessair,
et qui deviendra le nom officiel de l’Irlande. De même, le nom de la mère de
Lug, Ethné, se retrouve dans de multiples variantes, dont Étaine ,
l’héroïne d’un autre récit, et qui n’est autre que la non moins célèbre Boann
(la Boyne), mère du héros Angus, ou encore la triple Brigit, alias Dana, déesse
des Commencements. Cette dernière a des origines extrêmement lointaines,
puisqu’on la retrouve au Moyen-Orient (Anaîtis, Anu, etc.), en Inde (Anna
Pourna), à Rome (Anna Parenna), dans le nom des fleuves Don et Danube (Tanaüs)
ou celui de certains peuples grecs (les Danaoi ) et, il
faut bien l’ajouter, dans la célèbre « sainte » Anne des Bretons.
Dans le folklore irlandais, elle donne son nom à deux sommets du Kerry,
« the Paps of Anu », autrement dit les mamelons d’Anna. Dans la
mythologie galloise, elle est devenue Dôn, la mère d’une série de dieux
analogues aux personnages des tribus de Dana. La complexité des récits
irlandais, où les noms changent sans cesse, ne doit pas faire oublier que, le
plus souvent, il s’agit d’une entité insaisissable et qui, comme telle, doit
avoir plusieurs aspects et plusieurs noms. Cela ajoute, certes, à la difficulté
de compréhension des récits mythologiques mais, une fois qu’on simplifie la
nomenclature, les personnages prennent tout leur relief et toute leur valeur
symbolique. De plus, il faut savoir que les Irlandais ont toujours cherché à
expliquer leurs noms de lieux par un fait mythologique ou merveilleux, quitte à
recourir à des étymologies métaphoriques ou des homophonies flagrantes.
    [40] La Pierre de Fâl, qui se trouve toujours à Tara,
servait pour l’intronisation du haut-roi d’Irlande. D’autres textes racontent
que, lors de l’élection de celui-ci, les candidats devaient toucher la
pierre : si elle criait, c’est que les dieux avaient choisi celui qui
devait le mieux gouverner l’Île Verte. Dans son Histoire
d’Irlande , Geoffroy Keating raconte qu’après la conquête de l’Écosse par
les Scots , c’est-à-dire les Irlandais, la Pierre de Fâl
fut prêtée pour l’intronisation du premier roi gaël d’Écosse, mais qu’elle fut
ensuite conservée dans l’abbaye de Scone. C’est cette pierre, connue désormais
sous le nom de « Pierre de Scone », que le roi d’Angleterre Édouard I er fit emporter pour son propre couronnement et qui se
trouverait actuellement sous le trône qui sert pour l’intronisation des
souverains anglais à Westminster. En vain, les Écossais réclament-ils
instamment sa restitution depuis des siècles. On ne peut manquer de faire un
rapprochement entre cette merveilleuse Pierre de Fâl et le mystérieux
« Siège Périlleux » de la Table Ronde, siège réservé à celui qui
mènera à leur terme les aventures de la Quête du Graal, donc au « Roi du
Graal ».
    [41] Dans un autre texte, on prétend que l’ardeur de cette
lance était telle que, pour la calmer, il fallait en plonger la pointe dans un
chaudron rempli de sang humain. Il n’est pas sans intérêt de la comparer à la
« Lance qui saigne » présentée au cours du célèbre cortège du Graal.
    [42] Elle est le prototype de Caledfwlch ,
donc Excalibur , la célèbre épée de souveraineté qui ne
peut être confiée qu’au roi Arthur.
    [43] À l’évidence, l’un des prototypes du
« saint » Graal chrétien dont l’apparition au-dessus des chevaliers
de la Table Ronde leur procure la nourriture et le breuvage qu’ils désirent.
    [44] Soit pendant la fête celtique de Beltaine ,
fête essentiellement sacerdotale qui marque la fin de l’hiver et le début de la
saison d’été.
    [45] Synthèse entre Le Livre des
Conquêtes , le récit de La première bataille de
Mag-Tured et le récit de La seconde bataille de
Mag-Tured , première version.
    [46] Actuellement, Moytura , plaine
située entre le lac Arrow et le lac Key, à la frontière des comtés de Sligo et
de Roscommon, non loin de la ville de Boyle.
    [47] Ernmas signifie
« étrange ». En réalité, les trois magiciennes sont trois aspects du
même personnage : Bobdh est la Corneille, Macha , la Cavalière et Morrigane , la
Grande Reine. Ce triplement se retrouve dans la tradition brittonique,
particulièrement dans la légende arthurienne où la fée Morgane apparaît parfois
sous l’aspect de la cavalière Rhiannon, parfois sous l’aspect d’une corneille,
puisqu’on lui prête ce pouvoir