Les contrebandiers de l'ombre
Elle est toutefois préférable à une conclusion plus funeste, quelque part dans la mer des Caraïbes.
Difficile pour moi de dire que ce fut toujours un plaisir de vous rencontrer.
Leighton garda assez longtemps la main de sir Morgan dans la sienne. Il était content que cet affrontement-là se terminât, et de cette manière.
— Je vous souhaite bonne chance.
— J'ai l'impression que je vais revoir votre sacré Irlandais d'ici peu, fit sir Morgan avec une grimace amusée.
— Longacres ? Il parle beaucoup, mais...
Sir Morgan Lloyd fit une courte révérence et esquissa un premier pas vers la porte, quand la voix impérieuse du duc 1’arrêta :
— Vous serez encore à Londres pour quelque temps, n'est-ce pas ?
L’officier du roi se retourna, gêné, car le ton du duc était celui du commandement.
— Non, en fait, deux jours seulement, avant de rejoindre Portsmouth, et peut-être, si le temps me le permet, irai-je chez moi, au pays de Galles.
Lord Dominick semblait avoir des difficultés à rassembler ses idées. Son regard reflétait la rage de se sentir impuissant devant les faits nus.
— Je voudrais avoir un petit entretien avec vous, sir Morgan. Vous êtes le témoin des tribulations de ma fille. Si vous le voulez bien, attendez-moi dans la salle, j'aurai quelques questions à vous, poser à ce propos. Vous éclairerez ma lanterne sur d'autres points qui me paraissent obscurs, ordonna le duc. L'occasion ne se représentera pas, car ma fille et moi quittons Londres d ici une heure.
Sir Morgan opina du bonnet servilement.
— A votre disposition, Votre Grâce.
— Merci, sir Morgan.
Ce dernier referma la porte. Lord Dominick interrogea sa fille :
— Est-ce vrai ?
— Oui, père. Je voulais vous l'annoncer d'une autre manière, pour que vous partagiez mon bonheur. Même Dante l'ignorait.
Elle chercha dans les yeux de son mari les effets de cette nouvelle impromptue. Dante Leighton n'était plus maître des événements. Tous les fils lui échappaient.
— On ne me met au courant de rien, ici. Est-ce vrai ? As-tu décidé de partir avec ton père ?
Il gardait encore quelque espoir, mais Rhea confirma cette décision :
— Ma mère est malade, Dante. Je l'ai appris au moment où vous entriez. Essaie de comprendre. Je dois aller à son chevet. Elle a besoin de savoir que je suis saine et sauve.
Sa détermination était évidente. Rien n'aurait pu la faire changer d'avis. Le duc eut un mouvement de satisfaction devant le dépit qui se peignit sur le visage de Dante et conclut :
— J'envoie une servante pour prendre tes affaires. Mon équipage est en bas. Nous pouvons avoir quitté Londres dans une heure si nous ne nous attardons pas. Des chevaux de rechange attendent notre passage dans plusieurs relais de poste, nous n'avons pas de temps à perdre.
Tout le monde sera ravi à Camareigh !
Le duc avait la situation en main, et tous les atouts se trouvaient maintenant dans son jeu. Il poursuivit ses explications : tout était parfaitement minuté. Lord Dominick était prêt à quitter la compagnie de Leighton, avec sa fille, dans la seconde qui suivait.
— Je pense que cela ne troublera pas trop votre emploi du temps, Votre Grâce, si j'ai un mot en privé avec ma femme, demanda Dante, sarcastique. Je suis certain que deux de vos valets de pied seront ravis de monter la garde devant cette porte si j'étais assez fou pour essayer de vous fausser compagnie avec ma femme, continua-t-il, moqueur mais amer. Je saurai toujours où trouver Rhea, n'est-ce pas ?
— Père, je vous en prie, demanda Rhea. Dante est mon mari et le père de mon enfant. Je voudrais m'entretenir avec lui pendant quelques minutes. Je vais me changer et vous devez parler à sir Morgan.
— Bien, je ne serai pas long, concéda le duc.
Il restait cependant hésitant à les laisser ensemble. En outre, il ne voulait pas manquer une occasion d'insulter Dante Leighton, ce qui laissait ce dernier parfaitement insensible.
Rhea suivit le départ de son père sans bouger. Ce ne fut que lorsque la porte se referma que Dante se rendit compte, en voyant ses épaules tressauter, qu'elle pleurait.
— Rhea ? demanda-t-il avec tendresse. Veux-tu que j'appelle un médecin ? Ou ton père ?
— Non, je suis simplement heureuse. Je n'arrivais pas à imaginer la réalité de ce qui allait se passer jusqu'à ce que j'entende la voix de mon père. Tout ce cauchemar est fini. J'ai senti toutes mes craintes s'enfuir quand j'ai compris que
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