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Les croisades vues par les arabes

Les croisades vues par les arabes

Titel: Les croisades vues par les arabes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amin Maalouf
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cette secte, la plus redoutable de tous les temps. Hassan as-Sabbah était né vers 1048 dans la ville de Rayy, tout près de l'endroit où sera fondé, quelques dizaines dlannées plus tard, le bourg de Téhéran. A-t-il été, comme le veut la légende, l'inséparable compagnon de jeunesse du poète Omar al-Khayyam, passionné, lui aussi, de mathématiques et d'astronomie? On ne le sait pas au juste. On connaît en revanche avec précision les circonstances qui ont amené cet homme brillant à consacrer sa vie à l'organisation de sa secte.
    A la naissance de Hassan, la doctrine chiite, à laquelle il adhère, était dominante en Asie musulmane. La Syrie appartenait aux Fatimides d'Egypte, et une autre dynastie chiite, celle des Boueyhides, contrôlait la Perse et dictait sa loi au calife abbasside en plein cœur de Baghdad. Mais, durant la jeunesse de Hassan, la situation s'est entièrement renversée. Les Seldjoukides, défenseurs de l'orthodoxie sunnite, se sont emparés de toute la région. Le chiisme, naguère triomphant, n'est plus alors qu'une doctrine à peine tolérée, et souvent persécutée.
    Hassan, qui évolue dans un milieu de religieux persans, s'insurge contre cette situation. Vers 1071, il décide d'aller s'installer en Egypte, dernier bastion du chiisme. Mais ce qu'il découvre au pays du Nil n'est guère réjouissant. Le vieux calife fatimide al-Moustan-sir est encore plus fantoche que‘ son rival abbasside. Il n'ose plus sortir de son palais sans l'autorisation de son vizir arménien Badr el-Jamali, père et prédécesseur d’al-Afdal. Hassan trouve au Caire beaucoup d'intégristes religieux qui partagent ses appréhensions et souhaitent, comme lui, réformer le califat chiite et se venger des Seldjoukides.
    Bientôt, un véritable mouvement prend forme, ayant pour chef Nizar, le fils aîné du calife. Aussi pieux que courageux, l'héritier fatimide n'a aucune envie de s'adonner aux plaisirs de la cour ni de jouer le rôle d'une marionnette entre les mains d'un vizir. A la mort de son vieux père, qui ne saurait tarder, il devrait prendre la succession et, avec le concours de Hassan et de ses amis, assurer aux chiites un nouvel âge d'or. Un plan minutieux est mis au point, dont Hassan est le principal artisan. Le militant perse ira s'installer au cœur de l'empire seldjoukide pour préparer le terrain à la reconquête que Nizar ne manquera pas d'entreprendre à son avènement. 
    Hassan réussit au-delà de toute espérance, mais avec des méthodes bien différentes de celles imaginées par le vertueux Nizar. En 1090, il s'empare par surprise de la forteresse d'Alamout,« ce a nid d'aigle » situé dans la chaîne de l’Elbrouz, près de la mer Caspienne, dans une zone pratiquement inaccessible. Disposant ainsi d'un sanctuaire inviolable, Hassan commence à mettre sur pied une organisation politico-religieuse dont l'efficacité et l'esprit de discipline resteront inégalés dans l'histoire.
    Les adeptes sont classés selon leur niveau d'instruction, de fiabilité et de courage, des novices au grand maître. Ils suivent des cours intensifs d'endoctrinement ainsi qu'un entraînement physique. L'arme préférée de Hassan pour terrifier ses ennemis est le meurtre. Les membres de la secte sont envoyés individuellement ou, plus rarement, en petites équipes de deux ou trois, avec pour mission de tuer une personnalité choisie. Ils se déguisent généralement en marchands ou en ascètes, circulent dans la ville où doit être perpétré le crime, se familiarisent avec les lieux et les habitudes de leur victime, puis, une fois leur plan mis au point, ils frappent. Mais, si les préparatifs se déroulent dans le plus grand secret, l'exécution doit nécessairement se passer en public, devant la foule la plus nombreuse possible. C'est pourquoi le lieu est la mosquée, et le jour préféré le vendredi, généralement à midi. Pour Hassan, le meurtre n'est pas un simple moyen de se débarrasser d'un adversaire, c'est avant tout une double leçon à donner en public : celle du châtiment de la personne tuée et celle du sacrifice héroïque de l'adepte exécuteur, appelé « fedai », c'est-à-dire « commando-suicide », parce qu'il est presque toujours abattu sur-le-champ.
    La manière sereine dont les membres de la secte acceptaient de se laisser massacrer a fait croire aux contemporains qu'ils étaient drogués au haschisch, ce qui leur a valu le surnom de « haschischiyoun » ou a haschaschin

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