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Les croisades vues par les arabes

Les croisades vues par les arabes

Titel: Les croisades vues par les arabes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Amin Maalouf
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places étaient débarrassées des batinis et les chiens hurlants se disputaient leurs cadavres.
    Les Damascains étaient visiblement excédés de la mainmise des Assassins sur leur cité, le fils de Toghtekin plus que tout autre, qui refusait son rôle de fantoche entre les mains de la secte et du vizir al-Mazda-ghani. Pour Ibn al-Athir, il ne s'agit cependant pas là d'une simple lutte pour le pouvoir, mais de sauver la métropole syrienne d'un désastre imminent : Al-Mazdaghani avait écrit aux Franj pour proposer de leur livrer Damas s'ils acceptaient de lui céder en échange la cité de Tyr . L'accord était conclu. Ils s'étaient même entendus sur le jour, un vendredi. Les troupes de Baudouin Il devaient en effet arriver à l'improviste sous les murs de la ville dont des groupes d'Assassins armés devaient leur ouvrir les portes, d'autres commandos étant chargés de garder les issues de la grande mosquée pour empêcher dignitaires et militaires de sortir jusqu'à ce que les Franj aient occupé la cité. Quelques jours avant la mise à exécution de ce plan, Bouri, qui en avait eu connaissance, s'était empressé d'éliminer son vizir, donnant ainsi le signal à la population pour qu'elle se déchaîne contre les Assassins.
    Ce complot a-t-il vraiment existé? On serait tenté d'en douter quand on sait qu’Ibn al-Qalanissi lui-même, malgré son acharnement verbal contre les batinis, ne les accuse à aucun moment d'avoir voulu livrer sa ville aux Franj. Cela dit, le récit d’Ibn al-Athir n'est pas invraisemblable. Les Assassins et leur allié al-Mazdaghani se sentaient menacés à Damas, aussi bien par une hostilité populaire grandissante que par les intrigues de Bouri et de son entourage. De plus, i-ls savaient que les Franj étaient décidés a s'emparer de la ville coûte que coûte. Plutôt que de se battre contre trop d'ennemis à la fois, la secte a fort bien pu décider de se ménager un sanctuaire tel que Tyr, à partir duquel elle pourrait envoyer ses prédicateurs et ses tueurs vers l'Egypte fatimide, objectif principal des disciples de Hassan as-Sabbah.
    La suite des événements semble accréditer la thèse du complot. Les rares batinis qui survivent au massacre vont s'installer en Palestine, sous la protection de Baudouin II, auquel ils livrent Banias, une puissante forteresse située au pied du mont Hermon et qui contrôle la route de Jérusalern à Damas. De plus, quelques semaines plus tard, une puissante armée franque fait son apparition dans les environs de la métropole syrienne. Elle groupe près de dix mille cavaliers et fantassins venus, non seulement de Palestine, mais aussi d'Antioche, d'Edesse et de Tripoli, ainsi que plusieurs centaines de guerriers, fraîchement arrivés du pays des Franj, qui proclament bien haut-leur intention de s'emparer de Damas. Les plus fanatiques d'entre eux appartiennent à l'ordre des Templiers, un ordre religieux et militaire fondé six ans plus tôt en Palestine. 
    Ne disposant pas de troupes suffisantes pour faire face aux envahisseurs, Bouri appelle à la hâte quelques bandes de nomades turcs et quelques tribus arabes de la région en leur promettant une bonne rétribution s'ils l'aident à repousser l'attaque. Le fils de Toghtekin sait qu'il ne pourra pas compter longtemps sur ces mercenaires qui, très vite, déserteront pour se livrer au pillage. Son souci premier est donc d'engager le combat le plus tôt possible. Un jour de novembre, ses éclaireurs l’informent que plusieurs milliers de Franj sont allés fourrager dans la riche plaine de la Ghouta. Sans hésiter, il dépêche la totalité de son armée à leur poursuite. Complètement pris au dépourvu, les Occidentaux Sont vite encerclés. Certains de leurs chevaliers n'auront même pas le temps de récupérer leurs montures.
Les Turcs et les Arabes revinrent à Damas en fin d'après-midi, triomphants, joyeux et chargés de butin, relate Ibn aI-Oalanissi. La population se réjouit, les cœurs en furent réconfortés, et l'armée décida d'aller attaquer les Franj dans leur camp. Le lendemain à l'aube, de nombreux cava1iers partirent à toute allure. Voyant beaucoup de fumée qui s'élevait, ils pensèrent que les Franj étaient là, mais, en s'approchant, ils découvrirent que les ennemis avaient décampé après avoir mis le feu à leurs équipements, car ils n'avaient plus de bêtes de somme pour les porter.
    En dépit de cet échec, Baudouin II rassemble ses troupes pour une

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