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Les Dames du Graal

Les Dames du Graal

Titel: Les Dames du Graal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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ce qui suppose qu’il ne s’agit pas d’exclusivité, mais seulement d’un droit de préférence. Et Peredur d’ajouter. « Aussitôt que je t’ai vue, je t’ai aimée. » En somme, Peredur est semblable à Gauvain qui ne peut se retenir de prier d’amour toute dame ou toute pucelle qui se présente sur son parcours. Les chevaliers engagés dans la Quête du Graal n’ont pas tous fait vœu de chasteté, loin s’en faut, n’en déplaise à certains commentateurs qui ne voient dans cette quête que la recherche de l’absolu. L’absolu, certes, mais dans quelle dimension ? Les compagnons de la Table Ronde, bien qu’exceptionnels, sont quand même des hommes et supportent toutes les faiblesses humaines. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils sont terriblement présents dans notre imaginaire.
    Qui est donc cette mystérieuse femme ? Peredur lui demande où il pourra la rejoindre. Elle lui répond. « Tu me chercheras du côté de l’Inde. » Et elle disparaît après avoir mis dans la main de Peredur la pierre magique qui lui permettra de vaincre l’ addanc . Du côté de l’Inde ? C’est à la fois très loin et très vague, d’autant plus que la femme lui demande seulement de la chercher. Il n’est pas certain qu’il la trouve. Mais Peredur n’en a cure. Il continue sa quête et parvient devant un large estuaire où un passeur transporte des moutons blancs qui deviennent noirs de l’autre côté, et inversement. C’est ce qu’on appelle le « Gué des Âmes », le lieu d’échange entre le monde visible et le monde invisible. Peredur se trouve aux portes de l’Autre Monde, et l’on comprend alors que la femme qui lui a donné la pierre est un être féerique, une fée qui est tombée amoureuse d’un humain, comme cela arrive très souvent dans les contes traditionnels.
    Cependant, Peredur est vainqueur de l’ Addanc et traverse de multiples aventures avant de parvenir dans une prairie où sont dressés d’innombrables pavillons. Il s’adresse à un homme brun qui se révèle être un meunier et qui lui explique la raison de ce rassemblement : « Là se trouve l’ Impératrice de la grande Cristinobyl . Elle ne veut pour époux que l’homme le plus vaillant : pour les biens, elle n’en a pas besoin. » Peredur loge chez le meunier et, le lendemain matin, il s’en va vers le lieu du tournoi. C’est alors qu’il revoit l’Impératrice, car c’était elle, plus belle que jamais, « vêtue de brocart d’or ». Il reste toute la matinée à la contempler, dans un état d’extase voisin de celui qui saisissait Lancelot à la vue de Guenièvre. Pendant trois matinées, il persiste dans sa contemplation, mais ensuite il participe aux joutes et en sort vainqueur. L’Impératrice le fait appeler auprès d’elle et lui dit : « Beau Peredur, rappelle-toi la foi que tu m’as donnée lorsque je te fis présent de la pierre et que tu tuas l’ addanc . » Peredur lui répond. « Princesse, tu dis vrai, je ne l’ai pas oublié. » Et la conclusion de l’épisode tient en une phrase fort laconique. « Peredur gouverna avec l’Impératrice quatorze ans, à ce que dit l’histoire. »
    Mais qui est donc cette Impératrice ? Elle n’apparaît pas dans les autres versions de la Quête. On pourrait la confondre avec Blanchefleur-Condwiramur, l’épouse – ou presque – de Perceval, dont il semble assez souvent oublier l’existence. À ce que dit l’histoire … Il s’agit évidemment d’un conte oral que seul l’auteur gallois a transcrit, mais qui doit remonter assez loin dans le temps.
    Tout indique que la femme inconnue occupe un rang élevé puisqu’elle est dite « impératrice ». La localisation à la grande Cristinobyl est de pure convention, ce nom étant la transcription galloise de Constantinople, et l’on sait l’effet que produisait l’évocation de l’empire byzantin et de ses richesses supposées sur l’imaginaire médiéval occidental. Il ne faut pas oublier que lors de sa rencontre avec Peredur, la femme se tient sur un tertre , ce qui en dit long sur sa véritable nature. C’est en effet une bannshee , comme on dirait en Irlande, une « femme des tertres », et elle règne sur un peuple féerique, les fameux Tuatha Dé Danann qui vivent dans l’univers intérieur des monuments mégalithiques. Il ne faut pas oublier non plus qu’elle remet à Peredur une pierre qui le rendra invisible . Dès qu’il est en possession de

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