Les dîners de Calpurnia
Tage en défiant toutes les lois de l'équilibre et de la pesan-:eur. Il faut le comprendre : quand on est capable de faire cela, on veut être reconnu. Evidemment, ce n'est pas agréable pour sa femme, mais il faut qu'elle se fasse à la vie de nomade qu'il a choisie.
- Dis-tu cela parce que Terentia n'est pas ta fille ?
Rabirius p‚lit. Il prit la remarque de Calpurnia pour jne offense et contint avec difficulté sa peine et sa colére. Il saisit la main de sa femme qu'il regarda droit dans les ï eux :
- Comment peux-tu oser dire une chose pareille ? Vai-jepas été un tuteur irréprochable pour Terentia qui ~ 'a toujours considéré comme un second pére ? Assuré-
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moi tout de suite que tu ne penses pas ce que tu viens de me dire sous le coup du tourment et de l'inquiétude !
Calpurnia fondit en larmes, demanda pardon à son mari mais dit qu'elle n'admettrait jamais que les aspirations professionnelles de Lacer g‚chent la vie de Teren-tia.
- Parfois je me dis que je vieillis, que je ne reverrai plus ma fille. Je me console en pensant que son absence nous permet d'avoir Petronius tout à
nous. Mais cela n'est pas normal !
- Allons, viens, séche tes larmes et laisse-moi te prouver que je ne t'en veux pas. Il y a des choses tellement plus graves qui se trament sous les vo˚tes en berceau du Palatin. La beauté des palais o˘ ils vivent ne change pas la nature des princes !
- Moi, j'ai la consolation de la foi en Jésus-Christ, mais toi ? Je sais bien que les dieux romains ne t'aident pas beaucoup. Et pourtant tu restes fort, tu assumes toutes tes responsabilités comme à vingt ans !
- J'ai mon métier. Chaque pierre que je place dans l'agencement d'un monument me soutient. C'est vrai qu'il y a des moments o˘ je voudrais partager ta croyance, mais la foi n'est pas une chose qui se commande !
Petronius, qui avait suivi la conversation, demanda des explications, comme l'avait fait autrefois Terentia. Calpurnia lui répondit par des phrases embarrassées et finit par lui promettre qu'elle lui dirait tout sur le christianisme lorsqu'il serait plus grand.
Et Terentia revint un jour, alors qu'on ne l'attendait pas. D'Ostie, elle avait utilisé une voiture officielle, et elle arriva au Vélabre juste avant l'heure de passer à table.
- O˘ est Petronius, que je l'embrasse, que je voie comme il a grandi !
s'écria-t-elle en jetant son bagage dans l'atrium.
C'est Calpurnia qui se précipita la premiére pour étreindre sa fille et lui dire que le garçon était le plus
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parfait des petits Romains même si sa mére ne s'intéressait guére à lui.
- quelle bonne surprise ! Comment es-tu revenue ? s'exclama Rabirius qui faisait son entrée en compagnie de Petronius. Celui-ci tomba dans les bras de sa mére et l'explication du retour de Terentia fut remise à plus tard.
C'est au cours du dîner qu'elle raconta comment des plans destinés à
l'Empereur devaient être convoyés à Rome.
- Je me suis proposée sans grand espoir, dit-elle, mais Lacer a accepté.
- Ainsi Lacer a accepté ! Il t'a permis de revoir ta famille. quel bon mari ! lança Calpurnia, bien décidée à montrer le peu de cas qu'elle faisait de son gendre. Au moins, es-tu heureuse en Espagne ?
- Disons que je ne suis pas malheureuse ! Je te donnerai plus tard de plus amples détails.
On apprit un peu aprés que la colére du tyran n'était pas assouvie par l'arrestation de membres de sa famille. Flavius Clemens avait été exécuté
depuis longtemps et Flavia Domitilla reléguée dans l'île de Pandataria.
Comme eux, le consul Glabrio avait été condamné pour athéisme et exécuté.
La qualité de ces convertis avait surpris Domitien. Le christianisme, c'était flagrant, ne recrutait plus seulement dans les couches modestes mais touchait les plus illustres maisons. que cette découverte ait accru la rigueur de l'Empereur semble probable mais la persécution n'atteignit pas seulement les aristocrates. Elle s'étendit bientôt aux fidéles de toutes conditions et dans toutes les régions de l'Empire.
Les chrétiens de Rome n'avaient cependant pas renoncé à se rencontrer.
Comme les demeures privées n'étaient plus s˚res, ils commencérent à se réunir dans d'anciennes carriéres du pourtour de la ville o˘ de vieilles galeries creusées dans la pierre friable et la pouzzolane ne demandaient qu'à être agrandies pour servir de cime-257
tiéres aux premiers martyrs et d'asiles pour célébrer secrétement les
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